XXIII.

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Le reste du trajet se passe dans le calme le plus complet, Lise et Rosalie discutent toujours, mais Émilie a allumé la radio pour ne pas plus embarrassé Héléna. Elles arrivent, descendent de la voiture, Héléna prend la main de sa fille, et Émilie, une idée derrière la tête, pose une question.

Émilie : Tu vas répéter avec ta fille ?
Héléna : Euh, non... faut que je trouve quelqu'un de la prod pour s'occuper d'elle, et pendant le prime aussi.
Émilie : Je peux te la garder si tu veux ? Comme ça elle sera dans le public pendant le prime, elle pourra bien voir !
Héléna : Mmh... Mon chat, est-ce que tu veux rester avec Lise et Émilie cette après-midi et pendant le prime ?
Rosalie : Je peux pas rester avec toi?
Héléna : Non, désolée...
Rosalie : Alors d'accord, je veux bien !
Héléna : Vous êtes sûre que ça vous... que ça te, dérange pas ?
Émilie : C'est ma petite-fille après tout, non ?
Héléna : Oui... Oui, tu as raison, il fait qu'elle apprenne à vous connaître, vous, vous êtes sa famille aussi...

Émilie se contente d'afficher un sourire rayonnant jusqu'aux oreilles, ravie qu'Héléna soit prête à accepter que sa fille fait partie de leur famille, presque quatre ans après sa naissance. Héléna embrasse sa fille, lui laisse un petit sac à dos avec des cahiers de coloriage, son doudou et des jouets, puis elle remercie Émilie avant d'aller retrouver tout le monde pour les répétitions. Elle entre dans la loge, tout le monde est là, sauf les deux finalistes bien sûr. Il manque aussi Lénie et Lola qui n'étaient pas disponibles avant ce soir. La belge arrive la dernière des neufs présents dans la loge, en plus elle ne les a pas revus depuis leurs départs respectifs, mis à part rapidement mercredi soir. Clara s'avance vers elle pour l'étreindre.

Clara : Ça va ma reine de Belgique ? Toujours en avance toi finalement !
Héléna : Aha, très drôle !
Axel : T'avais des soucis pour faire garder ta fille ?
Héléna : Mais tu fais peur toi ! T'es madame Irma ou quoi ? On dirait que tu lis dans les pensées !
Axel : Donc j'ai raison ?

Elle hoche simplement la tête.

Djebril : Mec de la prod jusqu'au bout on a dit ! Il réfléchit même à la garde des gosses mdr, jsuis mort !

Il est mort de rire, entraînant les autres avec lui.

Axel : En même temps ma piouce elle va pas laisser sa fille de trois ans seule tout un après-midi et lui demander de venir la rejoindre ce soir en voiture.
Clara : Oui, non, c'est sûr !
Héléna : Bref, c'est réglé.
Victorien : Elle sera dans le public tout à l'heure ?
Axel : Bien sûr ma piouce, faut qu'elle encourage son papa !

Au moment où il prononce cette phrase, Héléna le toise du regard de haut en bas, un demi sourire en coin.

Djebril : Ouhla ça va ma vie ? Détends toi hein, tu préfères qu'on l'appelle son géniteur peut-être ?

Ils rient, elle lève les yeux au ciel, elle est dos à la porte et ne l'entend pas s'ouvrir, mais Djebril et Axel sont faces à elle.

Pierre : Vous parlez de moi ?
Victorien : T'inquiètes, les pioupious qui racontent des conneries comme d'habitude !
Axel : Eh, c'est la vérité !
Héléna : Mouais...
Axel : Ah si ma piouce je suis désolé, mais t'as couché avec Pierre et t'es tombée enceinte, t'as eu un bébé, donc biologiquement c'est le père.
Djebril : Ou le géniteur, comme tu préfères !
Axel : Mais on s'en fout ma piouce !
Héléna : Oh mais Axel merci, je sais !
Pierre : Vous partez trop loin les deux des fois !

Héléna a la tête baissée, les yeux fermés, son pouce, son majeur et son index appuyés à la base de son nez, mais une légère sourire sur son visage.

Victorien : Des fois ? Tout le temps oui !
Pierre : Oh biscotte, t'es dur là !
Victorien : Hyper drôle ça, Pierre !
Héléna : T'es pas sensé aller répéter toi, le grand finaliste ?
Pierre : Si c'est bon, j'y vais, je vous laisse les losers !
Djebril : Oh le traître !

Avant de s'éclipser, Pierre dépose un baiser furtif mais tendre sur le front d'Héléna, sans vraiment réfléchir. Elle sourit, puis se ressaisit aussitôt, et heureusement ils sont tous appelés pour aller répéter. La fin de la journée se passe dans les rires du bonheur d'être réunis, la bonne humeur, les larmes remplies de nostalgie et les souvenirs émouvants. Le prime en est à plus de la moitié, Julien vient de partager une chanson de Tayc, et c'est autour de Pierre de chanter aux côtés d'un artiste urbain, qui n'est autre que Dadju. Ses douze camardes sont assis sur le banc à quelques mètres de lui, captivés par le début de sa prestation, quand l'artiste lui fait le plus beau des cadeaux : il lui permet de chanter sa chanson en live sur scène pour la première fois, devant des millions de téléspectateurs. Sous les yeux ébahis de ces camarades, de ses professeurs et de sa famille, il entonne les premières  notes de « Ceux qu'on était ».  Il chante le premier couplet, un peu timide, puis vient le refrain où, à son grand étonnement, tout le studio 217 chante avec lui. Puis vient le deuxième couplet, et un peu plus confiant, il se décide à regarder dans les yeux la personne à qui cette chanson est destinée, puisqu'elle est présente ce soir dans la salle.

« S'il fallait recommencer
Je crois que je n'changerais rien
De nous j'ai tout aimé
Même quand ça s'passait pas bien
T'avais de l'or dans les mains »

Elle est assise sur le banc, à côté des autres, mais c'est comme s'il n'y avait personne autour. À l'instant où il a prononcé la première phrase de ce couplet, il a plongé ses yeux dans les siens, et elle a compris. Cette chanson, ça fait des semaines qu'il l'a chante, qu'elle l'entend, qu'elle la connaît, mais jamais elle ne l'avait interprétée comme ça. Ces mots résonnent en lui tout particulièrement, et à travers un simple regard il les transmet à celle qui malgré tout, lui a brisé le cœur. Puis c'est à nouveau le refrain, et les douze autres académiciens le rejoignent sur scène, accompagnés de Vitaa, Tayc, et Patrick Bruel. Héléna se positionne derrière Pierre, ils chantent tous ensemble, et beaucoup ont les larmes aux yeux de voir leur ami interpréter sa propre chanson, mais elle c'est une tout autre raison qui la met dans cet état. Il sait qu'elle est juste derrière lui, il sent son parfum, il entend sa voix tout près de son oreille, mais il a besoin de la lui chanter, rien qu'à elle. Même s'il y a des millions de personnes qui peuvent les voir, c'est la première fois qu'il chante officiellement cette chanson, et il a besoin de rendre cette première fois encore plus spéciale, en la chantant directement à celle pour qui il l'a écrite. Alors, le plus discrètement possible, donnant l'impression qu'il veut simplement mieux voir tous ses camardes, il se tourne légèrement, et chante pour elle, rien que pour elle, malgré le monde autour et les caméras braquées sur eux.

« J'aimerais garder le meilleur de ceux qu'on était
Et je sais qu'ailleurs t'iras chercher
Un peu de ce que je ne t'ai pas donné
Je vais garder le meilleur de ceux qu'on était
Et c'est pas grave si tu vas chercher
Un peu de ce que je ne t'ai pas donné »

Évidemment, pour ne pas éveiller les foules, Pierre donne l'impression de chanter avec ses amis, pour eux, pour le public aussi. Il essaye de ne pas la regarder avec trop d'insistance, les gens doivent être à l'affût du moindre détail se dit-il. Mais elle elle sait, elle a compris que ce regard qui se veut vague et destiné à tout le monde est en réalité plongé dans ses beaux yeux bleus, que chaque parole est appuyée en pensant à cette idylle passée, qui fut la plus belle de leurs jeunes vies respectives, et qui a donné naissance à un merveilleux petit être. En fait ça lui plaît, même si la chanson est triste, ça lui plaît d'être la seule avec Pierre à savoir pourquoi cette chanson existe, et à avoir compris à qui elle était réellement destinée, plutôt qu'à une jeune femme normande comme tout le monde semble penser.

« On se regarde
Peut-être pour la dernière fois
Et sans se parler
C'est comme un dernier au revoir »

À ce dernier couplet elle s'avance pour être juste à côté de lui, et il se tourne vers le public, plus précisément vers la petite Rosalie et ses grands yeux émerveillés. En chantant ces dernières phrases il pense désormais à elle, grâce à cette enfant ce qu'il pensait être un dernier au revoir n'était en réalité que la fin d'un chapitre.

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Désolée d'avance pour ce chapitre qui est loin d'être le meilleur, mais j'espère qu'il vous plaît quand même 🙈

Pour me faire pardonner, et comme j'ai quatre heures de train, je vous sortirais un autre chapitre dans l'après-midi ;)

Bonne nuit et encore merci <33

J'aimerai garder le meilleur de ceux qu'on était ☁️Où les histoires vivent. Découvrez maintenant