LXIV.

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Pierre vient d'arriver à Caen, un taxi l'a conduit jusqu'à son domicile, et maintenant il est affalé sur le divan son téléphone entre les mains à errer sans but sur les réseaux sociaux, divaguant entre les infos qu'ils trouvaient trop sombres, les dernières sorties musicales, et des vidéos idiotes. Au bout d'un moment, lassé par ce flux de nouvelles, il décide d'ouvrir sa galerie photos pour revoir les souvenirs du week-end, entre les concerts, son amoureuse, ses amis... Quand l'application lui suggère un souvenir photo. C'est un cliché d'Héléna et lui, de leur première vie. Encore et toujours cette même photo sur la plage il y'a cinq ans, et à cet instant, une idée lui vient en tête. Son album n'est pas tout à fait fini, il reste encore une ou deux chansons à écrire, et là, face à cette photo, qu'il aime tellement qu'il l'a faite imprimer pour un médaillon, des paroles lui viennent naturellement. C'est comme ça qu'il a toujours fonctionné, depuis son adolescence. Il est timide, pudique, réservé, et vient d'une famille où l'on ne se livre pas vraiment facilement sur ses sentiments. Il a toujours eu du mal à s'exprimer, particulièrement sur ce qu'il ressent, et la musique a toujours été libératrice, une façon d'être lui-même et de se dévoiler sur ses sentiments et ses ressentis. Après avoir écrit une chanson de rupture sur leur relation, pour s'aider à tourner la page et qui a d'ailleurs fait décoller sa carrière, aujourd'hui il a envie de lui écrire une nouvelle chanson d'amour. Il adore ça les chansons d'amour, celles qui l'écrit le mieux sont celles à propos d'une rupture, à vrai dire c'est ce qu'il connaît le mieux. Mais aujourd'hui c'est différent, sa vie a changé, sa vision de l'amour aussi, alors il a envie d'écrire une chanson d'amour heureuse. Doucement mais déterminé, il se lève du divan, attrape un carnet et un stylo laissés sur un coin de table la dernière fois qu'il est venu se réfugier ici, et il commence à griffonner ce qui lui vient à l'esprit, jetant de temps au autre un coup d'œil à cette fameuse photo qui l'inspire.

« J'ai parcouru le monde, j'ai traversé les années
Sans jamais t'oublier
Et j'ai vécu chaque seconde
À penser en secret, qu'un jour on se retrouverait »

Ces paroles résonnent en lui plus fort qu'il n'aimerait l'admettre. C'est vrai, durant toutes ces années il a tout fait pour l'oublier et pourtant, peu importe où il était, il n'y a pas une seconde où il n'a pas pensé à elle.

« J'ai fait la fête partout sur la planète
J'voulais pas l'admettre, mais t'étais dans ma tête
J'ai parcouru le monde, j'rentre à la maison ce soir
Dis-moi qu'c'est pas trop tard »

La suite du refrain vient naturellement, continuant de se baser sur ce qu'il a fait durant ces quatre dernières années, par rapport à cette relation indélébile qu'il a essayé d'effacer de toutes les façons possibles avant de la retourner aujourd'hui. Et maintenant qu'il l'a retrouvée, il n'espère qu'une chose c'est avoir du temps avec elle malgré sa carrière. Il espère que quand il rentrera de tournée ou de toutes ses obligations, il ne sera pas trop tard.

Les paroles lui viennent avec aisance, sans vraiment réfléchir. Ce soir, dans son petit appartement dans sa vie natale, alors qu'il est en plein dans une tournée épuisante à travers tous les zéniths de France, de Belgique et de Suisse, qu'il vit à mille à l'heure entre cette tournée éprouvante, son album qui doit sortir dans moins d'un mois, la promo, et maintenant sa fille, il est plus inspiré que jamais. Depuis le début, l'album doit s'appeler Chaque Seconde, tout simplement parce que ces derniers temps il n'a plus une seconde à lui, que tout peut basculer en une seconde, et que justement il essaye de profiter de chaque seconde. Tristan, avec qui il travaille, lui avait dit lorsqu'ils ont trouvé le nom de l'album que ça serait chouette qu'il nomme une chanson pareil, ça se fait souvent. Pierre n'avait pas d'idée, il a co-écrit avec ses partenaires de toujours une dizaine de chansons, autour de divers sujets, comme son public, sa maman, ses ruptures, etc... Mais aucune ne correspondait au titre de Chaque Seconde. Maintenant c'est bon, il a trouvé, ce sera celle-ci. Pas pour les mêmes raisons que l'album. Non, cette chanson c'est parce que, depuis le vingt-et-un juin deux mille dix-neuf, Héléna a occupé chaque seconde de ses pensées. Et depuis qu'elle l'a quitté, il a vécu chaque seconde à penser et à espérer en secret qu'il la retrouverait.

Pour le dernier couplet, il repense à son trajet en train, quand cette question d'avenir a germé dans sa tête, et que pour la première fois il y a pensé avec le sourire.

« Je vois, l'avenir
Avec toi, un peu de voyages et des souvenirs heureux
J'veux plus jamais, me mentir
Je sais que c'est toi si tu m'aimes encore un peu
On pourrait, s'enfuir
Mais cette fois j'aimerais qu'on le fasse tous les deux,
J'espère que tu vas me dire,
Qu'on peut »

Ça y est, il a réussi à exprimer ce qu'il ressent, à poser sur le papier ces mots qu'il aimerait tant dire à Héléna. Parce que oui, aujourd'hui il n'y a pas mieux que ce couplet pour refléter sa pensée, il le sait, c'est avec elle qu'il veut construire l'avenir, un avenir heureux rempli de souvenirs et de voyages. Dans quelques jours, quand il les retrouvera il chantera cette chanson d'Héléna, et il espère qu'elle comprendra, qu'elle comprendra enfin qu'il rêve seulement qu'elle accepte de rester avec lui, et de l'aimer enfin sans jamais plus de mensonge.

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Chapitre du soir, plus court mais j'espère qu'il vous plaira tout autant que les précédents :)

Passez une bonne nuit, à demain <3

PS : Comme vous l'aurez remarqué, dans cette histoire, les deux chansons dédiées/écrites pour Héléna sont Chaque Seconde et Ceux qu'on était, tout simplement car je trouvais qu'elles se prêtaient mieux à leur relation dans mon histoire que Comme Toi et Tout en mieux... De toute façon tout cela reste une fiction, c'est toujours plus drôle qu'un copier/collé de la réalité, et je suis ravie qu'elle vous plaise ;)

J'aimerai garder le meilleur de ceux qu'on était ☁️Où les histoires vivent. Découvrez maintenant