Chapitre 37 : Ange

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ADAM

Il y a des êtres humains qui aiment les monstres parce qu'ils les comprennent. Après tout, les humains sont aussi des monstres à leur manière.

Lucy me haïssait au début. Pourtant, il était évident qu'elle éprouvait une certaine attirance pour moi, une attirance qu'elle ne pouvait nier, et ce, depuis le tout début.

Son dédain initial n'était qu'un masque, une défense contre les sentiments contradictoires qui bouillonnaient en elle. Je pouvais voir à travers son regard, percer ses résistances et comprendre que, malgré sa haine apparente, il y avait une part d'elle qui était intriguée, fascinée même, par ce que je représentais.

Les humains ont souvent peur de ce qu'ils ne comprennent pas, mais parfois, cette peur se transforme en fascination. Oui, les humains aiment les choses dangereuses, terrifiantes, monstrueuses. 

Maintenant, à la manière, elle posait ses lèvres sur ma peau, sur mes tatouages, entre mes cuisses tout en plongeant son regard dans le mien, il était claire qu'elle ne pouvait plus se passer de moi, comme moi je ne pouvais plus me passer d'elle. 

On était tellement opposé pourtant...

Je me demande si elle serait capable de tuer une personne...je ne suis pas sûr qu'elle puisse faire quelque chose qui me semble si banale, mais elle devra bien se salir les mains pour survivre. 

Ses lèvres se posent aux creux de mon cou, ses doigts caressent ma nuque et un frisson de plaisir parcourent ma peau. 

- Tu ne dors pas, elle murmure, tu n'es jamais fatiguée. 

- J'ai encore envie de toi, je lui réponds en chuchotant dans son oreille. 

Un simple "Hmmm" s'échappe de ses lèvres, je vais la casser si ça continue, elle ne tiendra jamais le rythme, les anges et les démons...n'ont visiblement pas les mêmes habitudes.

- Plus sérieusement, je continue, je me demandais juste... si tu serais capable de tuer quelqu'un...

Ses yeux sombres s'ouvrent abruptement, me tirant de mes pensées. Mes yeux parcourent sa peau d'ébène, chaque détail, chaque courbe, comme pour m'assurer qu'elle est bien réelle. Il y a quelque chose de magnétique dans son regard, une intensité qui me captive et me fait oublier le monde autour de nous.

Elle hésite un instant, puis chuchote, presque inaudible :

- Je ne sais pas. Je ne crois pas.

Un frisson me parcourt. Sa réponse, douce et incertaine, contraste avec la noirceur de la question. Il y a une vulnérabilité dans ses mots, une humanité qui me rassure autant qu'elle me trouble.

- C'est bien ce qu'il me semblait, je rétorque avec un sourire léger, cherchant à détendre l'atmosphère.

Nous restons là, plongés dans un silence lourd de significations, nos regards toujours enlacés. Le vent souffle doucement, portant avec lui des murmures de la nuit. Elle rompt le silence, sa voix tremblante, mais déterminée, un simple "Je t'aime" sort de ses lèvres suivi d'un "Tu n'es pas un monstre". 

Qu'est-ce qu'un monstre, si ce n'est quelqu'un d'aussi mauvais que moi. Elle est vraiment étrange comme fille. 

*************

Nerveusement, je glisse la bouchée entre mes lèvres, sentant immédiatement le piment envahir ma bouche. La sensation de brûlure est à peine soutenable, une vague de chaleur intense se répand dans mon corps, me faisant presque suffoquer. Chaque fibre de mon être semble crier à l'aide, cherchant un moyen d'apaiser ce feu insoutenable. Mes yeux commencent à larmoyer, mes mains tremblent légèrement sous l'intensité de la douleur.

Un léger sourire se dessine sur les lèvres de Lucy, spectatrice de mon calvaire. Elle semble savourer ce moment, sa satisfaction palpable alors que je lutte pour ne pas céder à la douleur.

- Tu as dit que tu pouvais supporter n'importe qu'elles piment, mais, visiblement, tu t'es trompé. 

Je lui avais dit que durant ma longue existence, j'avais quasiment tout mangé. Jamais je n'aurais imaginé qu'elle me ferait goûter un piment rouge capable de faire cracher du feu à un démon.

Putain de merde...

Je retiens des larmes, elle rigole encore plus fort avant de venir enrouler ses bras et de venir poser ses lèvres sur mon front. 

Elle cuisinait bien, ma Lucy, je n'allais pas me plaindre de ça, même si les 13 démons qui étaient chargés de me préparer des plats étaient bien meilleurs, je crois...

- Je t'aime, elle murmure encore. J'ai toujours un léger frisson quand elle le dit, pourtant beaucoup de femmes m'ont déjà déclaré leurs amours, je suis un sacré coup après tout...et j'ai déjà dû faire semblant d'être amoureux pour me vider les couilles.  

J'ai encore envie d'elle. 

La sonnerie retentit à ma grande surprise. Je ne crois pas qu'une personne ait déjà sonné à la porte avant, à part peut-être une fois pour une collecte de sous pour diverses causes avec des cookies... 

Lucy est la première à se relever, j'observe la soupe plus rouge que le sang, une soupe au piment, autant mourir. Une légère fumée s'échappe de la mixture...quand je pense qu'elle a tout bu d'une traite...

- Adam, j'entends sa voix murmurer avec panique. 

Lorsque je tourne les yeux, je vois d'abord une tignasse d'un blanc platinée, et des yeux bleus qui m'observent avec une certaine froideur. 

- On dirait que j'ai finalement réussi à trouver le Premier des Démons, Asmodée, ou devrais-je dire Adam...

Je lève les yeux au ciel. Ce n'est pas non plus la première fois qu'un ange tente de m'attaquer dans ma maison, des suicidaires qui pensent souvent que je suis un vieillard inoffensif à cause de mon âge et qui cherchent à se créer une réputation chez les anges et attirer l'attention des meilleurs Séraphins.  

Je m'avance vers lui lorsqu'il saisit brutalement le bras de Lucy. Elle hurle, puis il lui ordonne de le suivre. Lucy cesse de se débattre, la lueur dans ses yeux s'éteint lentement, ne laissant place qu'à un vide mécanique, semblable à celui d'un robot.

- Lucy, reste-la. 

Son corps s'arrête immédiatement, mais commence à se tordre. 

J'avance vers eux, mais une lumière me repousse, un mur de lumière. Quand est-ce qu'il a été mis là ? 

- Il semble vraiment que l'amour t'ai fait baisser ta garde. J'ai été surpris de la facilité avec laquelle j'ai pu placer ma barrière sans que tu ne l'aies remarqué. Et puis, tu sais ce qui se passe quand deux ordres de rang divin sont donnés, bientôt le corps de ta petite ami va se déchirer en deux pour nous obéir tous les deux. Ce serait mauvais. 

Je souffle... J'avais oublié ce petit sourire mesquin que les anges affichent lorsqu'ils se croient les plus intelligents dans une pièce.

- Tu es arrogant, je murmure, comme tous les anges, j'imagine...

- Peut-être, murmure l'ange, mais ma mission est claire, je dois rapporter la Clé du Temps...cette barrière est toute-puissante, elle s'évaporera dans 24 heures, je serais déjà au Paradis avec Eve quand tu sortiras...et...

- Ta gueule, je rétorque, tu parles trop...

Il ne rajoute rien, et enroule son bras autour de son épaule pour avancer avec lui accompagnée d'un léger rire. Il me provoque vraiment...

Quand je pense qu'elle voulait que je sois "gentil", que je ne tue plus. Je ne crois pas que je vais pouvoir garder cette performance de gentil petit-ami très longtemps. 




Blasphemous (DARK ROMANCE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant