Chapitre 3 : Le premier des Monstres

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ADAM

Quand on est immortel, quand on vit aussi longtemps que moi, les souvenirs, le passé, tout a tendance à se mélanger.

L'écoulement du temps devient un labyrinthe dans lequel les moments se fondent les uns dans les autres, les époques se chevauchent, et la distinction entre hier et aujourd'hui s'estompe progressivement.

Je me souviens avoir pleuré, une seule fois, il y a tellement longtemps. Pourtant, je n'ai pas oublié les raisons de ces larmes, elles demeurent ancrées en moi comme une empreinte indélébile du passé. La seule chose que je suis incapable d'oublié...

Combien de fois ai-je emprunté les mêmes routes ? Combien de fois ai-je tué ? Combien de fois est-ce que je suis tombé ? Je ne voulais pas perdre son amour, je voulais le garder près de moi aussi longtemps que moi.

Les cauchemars qui m'empêchent de dormir ne se sont jamais arrêtés. Ainsi, je suis devenu un cauchemar à mon tour. Me tenant au sommet des démons, j'ai fusionné avec les ténèbres que je redoutais autrefois.

J'ai longuement attendu, observant chaque jour le sablier qui ne semblait pas bouger. Le temps refusant d'avancer. Mais j'ai attendu, jusqu'au jour où je pourrais la trouver elle.

La Porte vers la lumière.

Mais elle n'était pas comme les Séraphins me l'avaient dit. Ils m'avaient promis une âme rebelle, et c'est vrai que quand elle a pulvérisé cette bouteille de champagne sur ma tête, je l'ai senti passer, j'avais baissé le Bouclier, j'ai été un peu arrogant... Mais à ce moment, je me suis dit que ça ne pouvait être qu'elle.

Mais maintenant qu'elle chiale, je me demande si le résultat était correct. Il est impossible que le Sablier du Paradis ne se soit trompé...

Je me demande si je dois tuer sa famille. Je me retiens depuis que je suis entré dans cette maison. Mais je crois que ça va la briser.

Ça arrive souvent avec mes jouets. Ils sont fiers, au début, et puis après quelques coups, quelques os brisés, ou quelques dents arrachées, ils deviennent silencieux, leurs cerveaux s'éteignent, et leurs yeux deviennent vides. Et alors, ils ne réagissent plus du tout. C'est moins drôle comme ça, autant mettre sa queue dans une poupée gonflable.

- Est-ce mauvais de vivre sa vie en restant caché dans les ténèbres ?

- Comment ça ?, je lui demande sans comprendre où elle veut en venir.

- Je n'ai jamais aimé attirer l'attention, j'ai toujours tout fait pour ne pas me démarquer des autres, je voulais rester dans la moyenne. Vivre ma vie sans attirer l'attention. Je voyais des choses, le monde se déformait sous mes yeux, j'avais peur que l'on m'enferme dans un hôpital psychiatrique, j'entendais même des voix que j'ai dû apprendre à ignorer...

Elle a au moins la Vision. Mais ces crétins de parents auraient pu l'informer de ceux qu'elle était, de son utilité pour moi, et des choses que je vais devoir lui faire subir pour obtenir ce que je veux.

Je pourrais être doux, c'est vrai, mais l'idée de l'enchaîné au lit et de la défoncer brutalement jusuq'à qu'elle chiale me fait déjà bander outre mesure. J'ai tué trop de personnes...pour faire la différence entre le bien et le mal, et j'ai été en colère trop longtemps pour réprimer mes pulsions aujourd'hui.

- Alors, c'est ça ton plan, elle demande en essuyant mes larmes, me violer jusqu'à ce que je n'en puisse plus.

Je hoche calmement la tête. Oui, en gros, mon plan se résume à son viol et à son meurtre quand j'aurai obtenu ce que je veux.

À la fin, on auras tout ce que l'on mérite, chacun paiera pour ses péchés, je n'y échapperais pas non plus. J'aurais pu tenter de lui expliquer, mais qu'elle soit d'accord ou non, qu'elle comprenne la situation, cela ne change rien à l'exécution du plan.

- Pourquoi mes parents ne font rien, elle demande avant de se remettre à pleurer, me violer, et pourquoi ils te laissent m'emmener ?

Je détourne les yeux et regarde la lune par la fenêtre.

- Si je les tuais maintenant, tu arrêterais de penser à eux ?

- Bien sûr que non, elle hurle, ne fais pas ça, je t'en supplie...

Elle a vraiment peur. Pourtant, jusqu'à maintenant, je n'ai rien fait de particulier, enfin, j'ai manqué d'exploser le crâne de son frère, c'est pour ça qu'elle chiale autant ?

Je ne comprends pas les humains. Mais son hurlement est plutôt mélodieux, sa voix se brise magnifiquement à la fin. Je ne peux pas me contrôler et me jette sur elle, ma main s'enroule autour de sa gorge. Un peu plus de force et je lui aurais brisé le crâne. Il faut que je me contrôle, j'aurai tout le temps de m'occuper d'elle après. Elle tente un hurlement, mais rien ne sort, je lèche son visage, ma langue parcourant sa joue. Mon cœur bat violemment.

Il me faut beaucoup d'énergie pour réussir à la lâcher et à reculer.

- Dépêche-toi, qu'on se casse d'ici, dans dix minutes, je t'apporte le cadavre de tes parents.

Je la laisse traumatisée et descend rapidement les escaliers, il est déjà minuit, il faut partir présentement si on veut arriver avant le lever du soleil. Je regarde par la fenêtre pour observer ma Mercedes noir toujours garé dans l'allée. C'est étrange...tout est bien trop calme, aucun ange ne tente de m'arrêter ? Ils vont me laisser prendre la clé...

Lucie arrive finalement, avec juste son sac sur le dos. Je n'aurais qu'à lui acheter ce qui lui manque. Elle prend d'abord son petit-frère entre ses bras qui lui souffle quelques choses. Elle dépasse ses parents sans même leur adresser un regard et s'arrête devant la porte où je me tiens et lâche un froid "Je suis prête".

Je croise le regard des parents, qui baissent les yeux presque automatiquement. Je pense qu'eux aussi sont vides à présent.

- Tu ne peux pas partir sans dire adieu à tes parents, tu ne les reverras sans doute jamais, je lâche.

Je n'aime pas ça, devoir jouer à l'humain, mais leurs regards me rappellent une amertume que j'ai déjà ressentie.

- Et pourquoi ça, elle rétorque froidement, ils me donnent à un Démon, sans même lutter.

Je leur lance un regard d'agacement.

- Je vois, je murmure, c'est pour ça qu'ils ne t'ont pas dit que je venais. Tes parents t'ont sauvé, et maintenant, pour cet acte, ils vont souffrir pour l'éternité... Tu ne comprends peut-être pas, mais ne te trompe pas, en te donnant à moi, ils t'ont sauvé.

Elle hésite et se retourne, elle saisit d'abord son père qui s'effondre dans ses bras, les larmes dévalent des joues pour finir dans sa barbe, il la serre tellement fort que j'ai peur qu'il la brise avant que moi, je n'ai le temps de le faire. Et puis vient le temps de sa mère qui prend son visage entre ses doigts et lui ordonne d'être fort, avec moi, avec le monde tout entier.

Elle ne le sait pas, et c'est pourquoi ils n'ont rien dit. Le blasphème... Ils seront condamnés à être envoyés au dixième étage du Tartare. Personne n'y est jamais allé, c'est une prison que Dieu a créée spécialement pour moi. Aucun criminel humain, même les pires, aucun démon, même ceux qui ont commis des actes si horribles que les hommes ne peuvent même pas l'imaginer... Personne n'a jamais été envoyé au dixième étage du Tartare. Personne ne sait à quoi ça ressemble...à part moi.

Je revois les chaînes sur mes poignets, et je me souviens. C'est pour ça que je vais tout brûler, je ne dois pas oublier, je dois me rappeler pourquoi je me bats.

Il n'existe que deux personnes que je suis incapable de tuer, et avec elle, je vais réduire ce nombre à zéro.

Je suis tombé amoureux d'elle dès que je l'ai vu. Je sais bien que je n'ai aucun contrôle sur ça. Tout cela fait partie de son plan, je me demande si tout ce passe comme il l'a prévue.

Blasphemous (DARK ROMANCE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant