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L'atmosphère dans la villa était désormais pesante, comme si chaque pièce était imprégnée du mépris de Lori. Je ne pouvais pas me défaire de la douleur qui pulsait encore sur ma joue. La gifle était une blessure physique, mais c'était la trahison silencieuse de Rick qui me hantait. Pourquoi n'était-il pas intervenu ? Pourquoi restait-il là, immobile, tandis que je subissais l'arbitraire de sa femme ?

Je me levai lentement, prenant le temps de rassembler les morceaux de porcelaine brisée. Chaque éclat était un rappel de ma vulnérabilité, de ma position précaire au sein de cette famille. Lori ne se contentait pas de m'ignorer ; elle cherchait à me rabaisser, à me prouver que je n'étais rien d'autre qu'un intrus dans sa vie parfaite.

Après avoir nettoyé le désordre, je me dirigeai vers la chambre d'enfants, espérant que leur présence m'apporterait un peu de réconfort. Judith était endormie, paisible dans son berceau, tandis que Carl jouait silencieusement avec ses jouets, le regard absent. Je m'assis près de lui, tentant d'oublier la douleur, de me concentrer sur son innocence.

- Tu veux jouer, Elyria ? me demanda-t-il en levant les yeux vers moi, son visage s'illuminant.

Je hochai la tête, m'efforçant de sourire. Cela me fit du bien, même si ce n'était qu'un moment éphémère. Je commençai à l'aider avec ses blocs de construction, mais la façade de joie était fragile, prête à s'effondrer à tout moment.

Les heures passèrent, et la routine se poursuivit, mais l'angoisse restait sourde, tapie dans l'ombre. Lori semblait avoir intensifié ses attaques. Elle était là, partout, guettant chaque mouvement, chaque erreur, prête à frapper. Mes tâches étaient surveillées de près, et je ne pouvais m'empêcher de ressentir son regard acéré sur moi.

Un soir, alors que je préparais le dîner, elle entra dans la cuisine sans prévenir, ses talons claquant contre le carrelage.

- Tu devrais vraiment faire attention à la manière dont tu prépares les repas, Elyria. L'apparence est importante, tu sais. Rick ne doit pas voir une cuisine en désordre, dit-elle d'un ton glacé.

Je tournai la tête vers elle, surprise par son intrusion. Je ne voulais pas lui donner satisfaction. Mon cœur battait plus vite, mais je me contentai de hocher la tête.

- Oui, Lori, je vais faire de mon mieux, dis-je d'une voix neutre.

Elle s'approcha, son visage à quelques centimètres du mien, son sourire déformé par une méchanceté à peine dissimulée.

- Juste un conseil : n'oublie pas que je suis celle qui tient les rênes ici. Ne te fais pas d'illusions sur ta place.

Je serrai les dents, retenant des répliques qui brûlaient sur ma langue. J'avais l'impression d'être dans un labyrinthe sans issue, piégée dans une situation dont je ne pouvais pas me défaire. Elle me surveillait, toujours prête à réagir.

Un soir, après une journée particulièrement éprouvante, je décidai de sortir prendre l'air sur le balcon. La nuit était douce, et la brise fraîche contrastait avec l'atmosphère suffocante de la maison. Je pouvais voir les lumières d'Atlanta scintiller au loin, un panorama magnifique qui me semblait maintenant étranger. La ville, avec sa vie vibrante, me paraissait inaccessible.

Alors que je contemplais le paysage, je sentis une présence derrière moi. Je me retournai pour voir Rick, appuyé contre la porte, les bras croisés, l'expression fermée.

- Tu ne devrais pas rester seule dehors si tard, Elyria, dit-il enfin, sa voix grave et posée.

Je n'avais pas envie de lui parler, de m'ouvrir à lui après tout ce qui s'était passé. Je me contentai de le fixer, cherchant dans ses yeux un indice de ce qu'il ressentait. Mais son regard était indéchiffrable.

- Tu sais que Lori est de retour, n'est-ce pas ? dis-je finalement, ma voix trahissant mon amertume.

Il acquiesça lentement, son visage se durcissant légèrement.

- Oui, je le sais.

- Elle est insupportable, Rick. Elle ne fait que me rabaisser, me mépriser. Je ne peux pas continuer comme ça.

Il se redressa légèrement, son expression changeant, mais il ne réagit pas. Son silence m'agaçait. Je voulais qu'il se batte pour moi, qu'il me défende. Mais à la place, il restait là, immobile, comme un spectateur de ma souffrance.

- Je ne peux pas rester ici éternellement, dis-je, ma voix tremblante d'émotion. Je ne peux pas vivre dans cette peur constante.

Il ferma les yeux un instant, comme s'il cherchait les mots justes. Puis il souffla doucement.

- Elyria, je...

Mais je ne voulais pas l'entendre. Je savais qu'il allait dire quelque chose qui ne ferait qu'ajouter à ma frustration.

- Tu es son époux, Rick. Tu devrais la soutenir, pas me laisser ici seule face à elle. Tu me vois, mais tu ne fais rien. Je me sens invisible.

Il s'approcha enfin, l'expression sur son visage changeant, une lueur de culpabilité dans ses yeux.

- Je ne sais pas quoi faire, Elyria, murmura-t-il. Je veux t'aider, mais Lori est... compliquée. Elle ne comprend pas.

Je ne pouvais pas croire ce que j'entendais. Ce n'était pas une excuse. Cela ne justifiait pas son inaction. Je sentais une colère sourde monter en moi.

- Compliquée ? C'est tout ce que tu as à dire ? C'est ta femme, Rick. Tu dois la confronter, lui dire que ce qu'elle fait n'est pas acceptable.

Il soupira, son regard s'assombrissant davantage.

- Ce n'est pas aussi simple, Elyria. Je suis pris entre deux feux. Je ne peux pas me mettre en danger pour toi.

Ses mots résonnèrent en moi comme un coup de poing. Je ne pouvais pas croire qu'il venait de dire ça. J'étais son problème, mais pas au point de risquer son confort. Je me sentais de plus en plus piégée.

- Je suis désolée si je te mets dans une situation délicate, Rick, dis-je avec sarcasme, ma voix tremblante de colère. Peut-être que je devrais simplement partir.

Je tournai les talons, ne voulant pas lui donner la chance de me retenir. Je savais que je devais garder mes distances. Mais au fond de moi, je savais que je ne voulais pas partir. Pas sans lui. Mais je ne pouvais pas supporter cette vie.

Je rentrai dans ma chambre, ma colère bouillonnant à l'intérieur. J'entendis Rick appeler mon nom, mais je l'ignorai, m'enfermant dans ma bulle, serrant les poings pour ne pas pleurer. Je me sentais seule, abandonnée, perdue dans cette maison qui n'avait jamais été la mienne.

L'angoisse grandissait, et je savais que la situation ne pouvait plus durer. Mais je ne savais pas quoi faire. Alors je me laissai tomber sur mon lit, ma tête bourrée de pensées sombres, espérant qu'un jour, tout cela finirait. Que je pourrais retrouver ma liberté, même si cela signifiait partir pour toujours.

BabyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant