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Le matin se leva plus rapidement que je ne l'avais imaginé. Je sentais la chaleur de la lumière sur mon visage avant même d'ouvrir les yeux. Le poids de la nuit passée était encore là, mais étrangement, il ne m'écrasait plus. Je m'étirai lentement dans le lit, sentant chaque fibre de mon corps se réveiller avec une nouvelle énergie, comme si quelque chose en moi s'était enfin relâché.

Rick n'était pas là. Le lit à côté de moi était vide, encore chaud, preuve qu'il s'était levé récemment. Je n'avais pas peur qu'il parte sans dire un mot, sans que les choses soient redevenues compliquées. Non. Nous étions au-delà de ces jeux de doutes et de questionnements. Ce matin-là, tout semblait simple, presque naturel. Une nouvelle normalité, un fragile équilibre que je n'aurais jamais cru possible avant.

Je m'habillai rapidement et descendis dans la cuisine, là où l'odeur du café flottait dans l'air. Rick était là, debout près de la fenêtre, une tasse à la main. Il portait encore cette chemise légèrement froissée de la veille, et ses cheveux étaient ébouriffés de la manière la plus charmante possible. Il se tourna vers moi lorsque j'entrai, un sourire discret illuminant son visage.

- Bonjour, dit-il doucement, sa voix toujours aussi apaisante.

- Bonjour, répondis-je en m'approchant, me sentant presque timide, bien que je n'aie aucune raison de l'être.

Je pris place à côté de lui, savourant l'odeur du café fraîchement préparé. Il m'en tendit une tasse et je l'acceptai, mes doigts effleurant les siens un instant de plus que nécessaire. Ce simple contact déclencha en moi une vague de chaleur, comme si ce petit geste en disait bien plus que n'importe quelle parole.

- Les enfants dorment encore ? demandai-je en prenant une gorgée.

Rick hocha la tête, son regard toujours rivé sur moi, comme s'il savourait simplement le fait de me voir là, avec lui. C'était apaisant, presque familier, et pourtant encore nouveau. Un équilibre délicat que nous venions à peine de découvrir.

- Carl se lèvera bientôt, il aime bien profiter de ses dessins animés avant le petit déjeuner. Judith... elle nous laissera peut-être quelques heures de répit, dit-il avec un sourire amusé.

Je souris à mon tour, profitant de cette légèreté, de cette normalité qui contrastait tant avec la tension des semaines passées. Il y avait quelque chose de magique à vivre ces moments simples, comme si l'univers nous offrait une trêve. Mais au fond de moi, je savais que ce calme ne durerait pas. Lori était toujours là, quelque part, et même si son absence physique apaisait les choses, elle restait une menace qui planait au-dessus de nous.

- À quoi tu penses ? me demanda-t-il soudain, brisant le silence.

Je le regardai, cherchant mes mots, mais je ne pus m'empêcher de sourire légèrement.

- À tout ça. À nous. À ce que ça veut dire maintenant, répondis-je honnêtement.

Rick posa sa tasse sur le comptoir et s'approcha de moi. Il prit mes mains dans les siennes, ses yeux plongés dans les miens avec une intensité qui me fit frissonner.

- Ça veut dire qu'on avance. Ensemble. Qu'on affronte tout ce qui viendra, ensemble, répéta-t-il doucement.

Je savais qu'il croyait sincèrement à ce qu'il disait, et une part de moi voulait y croire aussi. Mais une autre part, plus réaliste, savait que Lori ne resterait pas à l'écart indéfiniment. Elle reviendrait, et quand ce moment arriverait, tout ce que nous avions construit serait mis à l'épreuve.

Rick semblait lire dans mes pensées, car il ajouta :

- Je sais que tu penses à Lori. Moi aussi. Mais... je te promets que je ne la laisserai plus te faire de mal. Jamais.

Il se rapprocha encore, et je sentis son souffle chaud contre ma peau. Mon cœur s'accéléra. Sa présence, son assurance, me donnaient la force que je n'avais pas imaginée. J'avais déjà décidé de ne plus avoir peur d'elle, de ne plus fuir. Et pourtant, savoir qu'il était là, prêt à me défendre, rendait cette résolution plus solide.

- Je sais, murmurai-je. Mais ce n'est pas seulement elle. C'est tout ça, Rick. Nous. Ce que ça implique.

Rick se pencha, son front contre le mien, et ses mains caressèrent mes bras, m'apportant un réconfort que j'avais tant cherché sans m'en rendre compte.

- Je ne regrette rien, Elyria. Pas une seconde. Et je ferai en sorte que toi non plus, tu ne regrettes rien.

Je fermai les yeux, savourant la proximité de son corps, la douceur de ses mots. Le doute se dissipait, remplacé par une conviction plus forte à chaque instant. J'étais prête à prendre ce risque, à assumer les conséquences. Peu importe ce qui viendrait, j'étais avec lui. Nous étions ensemble dans cette histoire, pour le meilleur et pour le pire.

La journée se déroula dans une étrange routine. Rick et moi échangions des regards complices, des sourires furtifs, tout en gardant un semblant de normalité pour les enfants. Carl ne semblait rien remarquer d'inhabituel, toujours plongé dans ses histoires et ses jeux, tandis que Judith riait de tout et de rien, insouciante de la tempête qui se préparait.

Le soir, après avoir couché les enfants, je sortis une nouvelle fois sur la terrasse. Le vent frais de la nuit faisait onduler les arbres dans le jardin, et les lumières de la ville, au loin, brillaient comme des étoiles. Je m'appuyai contre la rambarde, perdue dans mes pensées.

Rick me rejoignit peu après. Il s'installa à mes côtés, silencieux. Je sentais son regard posé sur moi, mais il ne parla pas tout de suite. Finalement, je tournai la tête vers lui, incapable de contenir plus longtemps les pensées qui tournaient en boucle dans mon esprit.

- Tu crois vraiment qu'on y arrivera ? demandai-je doucement.

Il me regarda longuement avant de répondre, ses yeux remplis d'une certitude que je n'arrivais pas encore à comprendre pleinement.

- Oui, je le crois. Parce que je t'aime. Et parce que je sais que c'est réciproque, dit-il, sa voix calme mais déterminée.

Ces mots me frappèrent à nouveau. Ils avaient ce pouvoir de tout simplifier, de rendre tout ce qui semblait compliqué un peu moins effrayant. Il avait raison. Nous nous aimions. Peut-être que c'était tout ce qui comptait.

Je me tournai vers lui, et dans un élan, je l'embrassai, sans hésitation, sans crainte. Ce baiser n'était pas celui de deux personnes qui fuient quelque chose, mais celui de deux âmes qui s'étaient enfin trouvées. Peu importe ce que Lori ferait, peu importe les obstacles. Nous étions là, ensemble.

Et cette nuit-là, pour la première fois depuis longtemps, je n'avais plus peur de l'avenir.

BabyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant