Chapitre 39

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Liam allume son briquet et protège la flamme du vent avec sa main. La cigarette s'enflamme aussitôt, Liam souffle et une fumée grise s'envole dans les airs, jusqu'au ciel où le soleil va bientôt apparaître.

-Tu sais que c'est très mauvais pour la santé ?

Il me regarde en levant les sourcils.

-Je suis un mort vivant cannibale. C'est pas ça qui va me faire peur.

Je rigole et regarde la rue. Il y a quelques minutes, la maison d'en face s'est allumée et les volets d'une des chambres à l'étage se sont ouverts. Le monde est en train de se réveiller. Mes mains posées sur le muret froid, je frisonne, mais je ne veux pas retourner à l'intérieur maintenant.

-Ça m'aide à garder le contrôle.

Je tourne la tête vers Liam, à ma droite.

-Quoi ?

-La cigarette. C'est bizarre mais ça m'aide. Certains démons trouvent un autre moyen, un truc pour leur faire oublier la fin. Moi, je fume. Seulement du tabac.

-Ça explique que tu ai beaucoup fumé au bar, le soir où tu m'as accompagné.

-Sans que tu t'en aperçoive, je suis allé m'acheter un hot dog pas très loin, j'ai demandé au vendeur de mettre une tonne de viande et il m'a fait payer un supplément. Je me souviens t'en avoir beaucoup voulu pour ça.

Je rigole avec lui.

-Je te rembourserai.

-Merci.

Je regarde la cigarette, qu'il tient entre son pouce et son index. Avant qu'il ne la remette entre ses lèvres, je lui prends des mains et la porte à ma bouche. J'aspire la fumée qui envahie ma bouche. Je tousse aussitôt, la gorge en feu et un goût horrible sur la langue. Liam éclate de rire à côté de moi et me reprend la cigarette.

-Arrête de te moquer de moi !

-Désolé.

Nous restons en silence quelques instants. Je ne sais pas trop depuis combien de temps nous sommes ici, mais ça fait longtemps. Le soleil fini par arriver au loin, les premiers rayons éclairent, et quelques nuages arrivent de l'autre côté.

-Ne dis rien à ma sœur sur ce qui s'est passé dans ce jardin.

-Pourquoi ?

-Je ne veux pas qu'elle s'inquiète plus qu'elle ne le fait déjà pour moi.

-Comme tu veux.

Son visage fatigué et ses yeux rouges le trahirons. Et je ne veux plus jamais revivre ça. Ça m'a fait beaucoup trop mal de le voir dans cet état.

-Liam, Maxwell ne peut plus te faire de mal. Tu n'es plus un enfant. Aujourd'hui, tu peux te défendre.

-J'aimerais dire que je n'ai pas peur de lui.

-Tu as le droit d'avoir peur. Moi aussi il me fait peur.

Il prend une autre bouffée de sa cigarette, avant de l'écraser contre le muret.

-Tu veux me parler de...de ce qu'il te faisait ?

Il ne dit rien, le regard perdu dans le vide.

-T'es pas obligé.

-Ça a commencé quand ma mère a trouvé un boulot. Octavia était à l'école et ce jour là, je restais à la maison. J'ai fait semblant d'être malade pour pouvoir jouer aux jeux vidéos.

-On l'a tous fait.

-Ouais. Mon père m'a surpris. Il a tout cassé et m'a hurler dessus. Il disait qu'il allait refaire mon éducation. Que j'étais inutile, un moins que rien, un fardeau qu'il devait porter. C'était pas la première fois qu'il me le faisait comprendre, ça n'a pas forcément commencé comme ça mais cette fois là, c'est la première fois que j'ai eu réellement peur de mon père. Les jours suivant, peu importe ce que je faisais, il me disputait. Ma mère ne faisait rien vu qu'elle était de plus en plus malade. Octavia, si elle avait le malheur de réagir, se faisait punir avec moi. Et ensuite ma mère est morte. Après ça c'est devenu...Il a levé la main sur moi. Il me frappait chaque fois que je faisais une bêtise, ou chaque fois qu'il en avait envie, après une dur journée. Il disparaissait pendant des heures, nous laissant seuls. On sait pourquoi, aujourd'hui. Octavia s'occupait de moi comme elle pouvait mais elle n'était qu'une enfant, elle aussi. Mon père avait toujours quelque chose à me reprocher et en particulier la mort de sa femme. J'ai fini par y croire et je le laissais faire. Il me donnait à manger seulement quand il n'avait plus le choix. Mon école ne posait aucune question, je cachais mes bleus. Et puis qui soupçonnerait un père qui croit en Dieu et qui paraît si gentil de maltraiter son fils adoré ? Ah et aussi, il m'enfermait dans les placards jusqu'à ce que j'arrête de pleurer.

KrystalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant