Chapitre treize

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Une caresse titille ma joue. Mon nom est murmuré dans le creux de mon oreille.

« Ouvre les yeux, Mika. Allez, réveilles-toi. »

Je bats lentement des paupières. Un visage est découpé en contre-jour au-dessus moi.

« Salut, princesse. »

Oh mon dieu. Je me relève d'un bond et me jette à son cou.

« Jason ! Tu n'es pas mort ! Oh mon dieu, tu es vivant ! »

Un soulagement sans nom m'envahit. Il est vivant. Jason est vivant.

« Je ne t'abandonnerai jamais, Mika.

- J'ai cru que tu étais mort... »

Je savais qu'il y avait eu une erreur. Jason ne pouvait pas mourir.

« C'est le cas. »

Douche froide.

« Je suis mort Mika. Réveilles-toi maintenant. »

Panique. Non. Pas ça, pas de faux espoirs, tout mais pas ça.

« Ouvre les yeux. Retourne à la réalité. »

Ses yeux verts rieurs et son sourire chaud me retiennent auprès de lui.

« Ce n'est qu'un rêve Mika.

- Non, ne me laisse pas ! »

Pourquoi il s'éloigne de moi ? Pourquoi je suis tirée en arrière par une force invisible ? Pourquoi il s'efface et disparait comme s'il n'avait jamais existé ?

« Adieu. »

*

Le jour m'aveugle alors que je me relève d'un bond. Je suis en sueur, paniquée ; et je suis presque sûre d'avoir crié son nom.

Quelqu'un m'a allongée sur mon lit, et je porte les mêmes vêtements que j'avais lorsqu'ils m'ont injecté le sédatif.

Mon cœur ralentit dans ma poitrine jusqu'à retrouver son rythme normal et mon souffle s'apaise. Je pose mes pieds nus au sol, marche jusqu'à la salle de bain et me passe de l'eau glacée sur le visage.

Je relève la tête et deux yeux bleus me fixent dans le miroir face à moi. Ils sont ternes, fatigués, et cernés. Le vide se lit en eux, comme si chaque goutte de joie en avait été extraite, remplacée par un trou béant, brisant chacune des émotions qui rendent humain un être vivant.

Je ne ressens plus rien. Je devrais être effondrée sur le sol, pleurant Jason. Je n'arrive même pas à savoir pourquoi il faut que je sois triste, pourquoi j'étais attachée à lui. Je ne suis plus qu'une enveloppe charnelle sans une once d'humanité en elle, et je m'en fous totalement. Plus rien n'a d'importance. Plus rien ne compte autour de moi. Je peux tout autant mourir de suite que cela ne changerait rien.

Je passe rapidement sous la douche. En temps normal, j'y reste des heures, à ressasser mille et une pensées. Je la prends en à peine cinq minutes et enfile les fringues qui me tombent sous la main. Je quitte ma chambre pour rejoindre le réfectoire. Je ne sais pas s'il est encore ouvert, l'heure qu'il est m'étant inconnue alors que j'ai regardé mon réveil avant de partir.

Je me retrouve assise à une table, seule, sans savoir comment j'y suis arrivée. Un plateau-repas rempli est posé devant moi et je ne me souviens même pas avoir attrapé les brioches, les pains et les confitures qui y sont entassés.

« Mika ? Eh oh ? »

Une main aux longs doigts manucurés s'agite devant mon visage et je relève les yeux. Un gâteau sec s'effrite dans mes mains. Mes ongles sont sales, couverts de sang séché et ma main droite est bandée. Je n'avais même pas vu.

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