Chapitre vingt

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Quand j'ouvre les yeux, le ciel étoilé est déployé au-dessus de moi. La lune brille, nous éclaire de sa lumière blafarde. J'entends les vagues déferler sur la plage, près de nous.

Je suis dans les bras glacés de Jason, serrée contre son torse. Il tient ma tête d'une main, et soutient mes reins de son autre bras, assis dans le sable.

Il m'observe attentivement, et en voyant ses yeux rieurs, je détourne les miens, honteuse. Je ne suis qu'un être faible, putain.

« Je te fais tant d'effet que ça ? ricane-t-il, fier comme un paon.

-       Je ne suis qu'une petite chose fragile. Il suffit qu'un garçon s'intéresse à moi pour que mon pauvre cœur papillonne et m'abandonne, tu sais, je plaisante pour essayer de faire passer ma honte. »

Il ne répond rien. Il me serre toujours contre son torse froid. Je me relève doucement de ses bras et m'assois sur ses genoux pliés. Il me regarde faire, toujours sans rien dire. Je passe mes bras autour de son cou et il hausse les sourcils, surpris. Je cale alors ma tête dans son cou, ma bouche près de son oreille.

« Je t'aime, je murmure. »

Il tressaute dans mes bras, et la première surprise passée, me serre un peu plus fort contre son corps froid. Ses mains me font mal mais je m'en fiche. C'est trop bon de l'avoir près de moi, en vie – il ne l'est pas tout à fait, mais c'est déjà plus que le cadavre que j'ai vu la dernière fois que je me suis retrouvée près de lui. Il me serre contre lui à m'en faire mal, et c'est tout ce qui compte.

Et alors que ce moment parfait s'éternise, et que je suis toujours blottie contre lui, ma tête calée contre son épaule et la sienne dans mon cou, il me repousse brusquement. Je tombe les fesses au sol, et sans que je m'en rende compte, il se tient debout, les poings serrés à quelques mètres de moi. Je ne l'ai même pas vu se déplacer.

« Qu'est-ce qu'il y a ? je demande doucement, encore surprise qu'il m'ait repoussé aussi brutalement. »

Il inspire brusquement avant de couper sa respiration. Sa poitrine ne bouge plus, et me rappelle douloureusement qu'il n'est plus vraiment lui-même. Il ouvre la bouche pour parler et la lueur de la lune brille alors sur ses canines.

« Je préfère garder de la distance. Pour ta sécurité, grogne-t-il avec difficulté. »

Comment ça pour ma sécurité ? Comme si j'avais pensé à voix haute, il recule encore tandis que je me lève, avant de répondre.

« Je n'ai pas chassé depuis hier, j'ai soif et j'avais ta... Ta gorge trop près de moi. »

Je me fige, le cœur battant. Il grogne et serre les poings. J'essaye de me calmer en me rappelant qu'il entend très bien le sang courir dans mes veines, ce qui l'affame encore plus, et je décide de garder la distance de sécurité qu'il a instaurée.

« Je suis désolée, je fais doucement.

-       Tu... Tu devrais partir. »

Son ton dur et sec me fait mal, mais je sais qu'il ne fait pas exprès de l'employer. Il est juste tellement tendu qu'il ne peut s'empêcher de parler ainsi.

« Mika, vas-t-en. S'il te plait. »

Je hoche doucement la tête, et je le dévisage une dernière fois avant de reculer, petit pas par petit pas.

« Ma voiture est garée sur la promenade, je chuchote, sachant qu'il m'entend quand même. Je t'attendrais là-bas. »

Je fais volte-face, et je m'éloigne peu à peu de lui, le cœur déchiré de le quitter encore une fois, même pour quelques minutes ou quelques heures. Je sais qu'il reviendra, et c'est ce qui me permet de quitter la plage sans faire demi-tour pour vérifier que tout ce qui vient de se passer n'était pas une simple hallucination de mon esprit fatigué.

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