Prologue

3.1K 102 14
                                    

Les aléas de la vie. C'est stupéfiant ce qu'ils peuvent provoquer comme chahut. Un grain de sable dans l'engrenage et tout déraille. Absolument tout. Ils provoquent des petites choses, aussi infimes soient-elles, qui finissent par nous atteindre. J'ai un exemple éloquent à vous soumettre. Je vous jure, vous allez rire.

Une soirée, un anniversaire où je suis invitée avec ma sœur. Jusqu'ici, rien de bien sensationnel vous me direz, certes. C'est que le début. Une belle soirée d'été digne de la Louisiane, chaud, humide et lourd. Tout compte fait, je déteste cette ville, Baton-Rouge. J'ai les cheveux qui frisent et je sue comme une glace fond en plein soleil. Je suis glamour, n'est-ce pas ? Et pourtant, ce n'est pas le clou de la soirée. Non, aucunement. La maison d'Amber est pleine à craquer, comme d'habitude. Je ne voulais pas y aller, mais ma sœur a insisté comme d'habitude. Alors, j'ai cédé, comme d'habitude. Croiser les mêmes têtes que je croise tous les jours dans mon lycée, supporter leur remarques stupides et infondées, parce que, selon eux, je suis coincée. D'ailleurs, « être coincée », je serai curieuse de connaître votre avis sur la question. Je suis coincée parce que je suis avec le même garçon depuis un peu plus d'un an, et par conséquent, aucun autre ne m'intéresse. Est-ce que cela fait de moi quelqu'un de coincé ? Vous avez deux heures.

Je ne butine pas de bouche en bouche, je ne laisse pas traîner des mains largement aguerries sur mon corps et surtout, je ne partage pas mon lit avec la moitié de la ville. Une fille pleine de bon sens, et de principes.

Revenons à nos moutons. Les aléas de la vie. Ils commencent toujours quand on s'y attend le moins. C'est là que vous allez rire d'ailleurs. Drew, mon amoureux de toujours (c'est niais, hein ?), est bien évidemment de cette soirée. La musique pop hurle dans la maison, le décor rose et blanc me colle la nausée. Je ne m'amuse pas, je n'aime pas ces soirées répétitives qui se finissent toujours de la même manière. Des filles en pleurs parce qu'untel a couché avec une autre, ou parce que le garçon le plus beau de la soirée s'est envoyé sa meilleure amie. Ou bien d'alcools ingurgités trop vite et qui se termine en bagarre. Une soirée absolument normale, dans cette ville que j'exècre.

Drew est ce que l'on peut appeler un gentil garçon, pas dans le sens péjoratif du terme. Doux, pertinent, mignon, et patient. Des lunettes, des cheveux marrons, une fossette sur la joue, un sourire timide, le tout sur un bon mètre soixante-quinze. Drew est quelqu'un qui sait tout de moi, comme ma sœur. Je ne suis pas très extravertie, mais ce n'est pas la question. Tellement gentil qu'il s'est excusé lorsque je l'ai retrouvé emboîté dans notre chère Amber. Oui, la même personne qui a eu la gentillesse de m'inviter.

- Ce n'est pas ce que tu crois. A-t-il dit, toujours profondément investi dans cette roulure de bas étage.

Amber. Cette fille est la plus jolie de notre lycée, et elle a tout ce qu'elle veut. Y compris mon gentil copain.

- C'est une nouvelle façon de jouer à Tétris ? Ai-je fini par dire.

Ils étaient nus, en sueur, et à ce que j'ai pu voir, ils prenaient un pied d'enfer avant que je les interromps. Les aléas de la vie. Je vous ai déjà dit à quel point il était gentil ? Et à quel point je suis stupide ? Ce soir-là, la fille en pleurs, c'était moi.

À l'orée de ToiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant