Chapitre 26

1.2K 56 9
                                    

Yuna

Une fanfare a élu domicile dans ma tête. Je savais bien que j'allais regretter ces verres en trop. Ouvrir les yeux se révèle être aussi laborieux que de mettre un fil dans une aiguille. Encore une idée brillante, McKinley ! Point positif, il n'y a pas un bruit. Est-ce que ça aurait fait une différence vu le vacarme qui vrille mon cerveau ? Aucune idée, mais j'apprécie. Les yeux toujours fermés, des bribes de ma soirée me reviennent. J'ai hurlé sur Elijah. Vraiment. Et lui aussi. J'ai été mesquine, mais ça, je ne le regrette pas. Pourquoi faire ? De toute façon, il ne s'est pas gêné pour m'en foutre plein la tête.

Il est quelle heure, d'ailleurs ? J'ai une journée de cours qui m'attend. Et il vaut mieux commencer cette étape par du café et une aspirine. Et rajouter des litres de café. Le réveil posé pas loin de moi me nargue. Oh bordel, il est quasiment neuf heures, je suis en retard. Ça ne m'est jamais arrivé. Je me lève beaucoup trop vite, ma tête proteste violemment. J'ai l'impression que mon cuir chevelu va fondre sous la douleur. Mais quelle idée, aussi !

- Aïe ! Oh ça va, je recommencerai plus.

C'est une fois assise dans le lit que je me rappelle que je suis chez lui. À quel moment j'ai cédé ? Je vais avoir une sérieuse conversation avec moi-même. À n'en pas douter. Je frissonne et remonte la couette sur mes bras. Ce ne sont pas mes fringues. Ça veut dire que c'est lui qui m'a changé. Un t-shirt noir avec inscrit Judas dessus et un de ses boxers. Il se donne beaucoup de mal pour, je cite "une casse-couilles niveau expert". Je me souviens de sa gentillesse, c'est déjà ça. Je vais finir par me sentir tellement mal que je ne vais plus jamais sortir de cette chambre. Point positif : il n'est pas là. Est-ce que je peux encore sauver ma journée en accélérant le mouvement ? Aucune chance. Je me traîne aux toilettes parce que ma vessie, elle, elle est en pleine forme. Tu parles de solidarité. Je t'en foutrais. Mes sous-vêtements ne sont plus sur moi. Est-ce qu'on a fait quelque chose ? Pour le coup, ça serait dommage que je ne m'en rappelle pas. La tête coincée entre mes mains, ma vessie se vide. Et ça dure des lustres.

L'odeur du café chatouille mes narines, je pourrais baver tellement j'en ai envie. Totalement dépendante de ce truc. Appelez un spécialiste, je ne suis plus à ça près. La lumière du jour est une agression pour mes rétines. Mais c'est là que se trouve le café. Sois forte, McKinley. Tu seras récompensé pour cet effort surhumain. Oui, je vais finir aveugle. Super. Mais j'aurais une bonne dose de caféine. Ça vaut le coup. Chacun ses priorités.

Là, dans l'immédiat, pour la survie de l'espèce humaine, il me faut une tasse d'or noir. Je traverse le salon lumineux ouvert sur la cuisine et trouve une tasse, du sucre et mon précieux. Je crois que j'ai réveillé la Terre entière tellement ma délicatesse laisse à désirer. Ils s'en remettront, je suis sûre qu'ils ont entendu pire de toute façon.

Je soupire de satisfaction quand je sens la saveur chaude couler sur ma langue pâteuse. Si le café n'est pas le meilleur réconfort du monde, je suis prête à vendre mon âme au diable.

- Tu ne seras jamais agent secret avec le bordel que tu fais.

Instant bien-être terminé. Il est là. Et ça me dérange. D'accord, je suis chez lui, mais il est obligé d'être là ? Il n'a pas autre chose à faire ? Je sais pas moi. Torturer des chatons, s'entraîner ou diriger la mafia. Un truc tordu, comme lui. Au lieu de ça, monsieur est installé dans son canapé à jouer à la console et à dégommer des gens avec un fusil. Foutu karma.

- Qu'est-ce que t'en sais ? Je suis pleine de surprises.
- Pleine comme une barrique, ouais.

Cette pointe de sarcasme, je lui ferai bien ravaler. Mais j'ai beaucoup trop mal à la tête et je n'ai pas bu assez de café. Je pourrais déclencher une guerre mondiale par contre. Il se lève et attrape sa tasse à lui. Je me force à ne pas le regarder. Il est vraiment trop beau pour une tête de con. Mais ce n'est pas le sujet. J'ai mal à la tête. Il semblerait que la guerre à lieu dedans finalement. Un tube de comprimés se retrouve sous mes yeux, que je refuse de faire bouger dans sa direction.

À l'orée de ToiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant