33 - Du calme

2.1K 208 184
                                    

- Ce n'est pas elle Kayden.

Mon poing tape fort sur la surface lisse de sa table en bois. Remettre mes jugements en question est inacceptable. Jonigan a juste de la chance que ça soit lui qui défende l'aimant à preuves de culpabilité.

Jonigan n'a pas encore accepté le fait que son assistant l'espionnait sans arrêt et rapportait tous nos faits et gestes aux Moordiens. Il a passé des semaines à enquêter sur le meurtre d'Yves, mais rien : Simple empoisonnement. Tous les employés chargés d'apporter le repas des prisonniers ont été violemment interrogés, parfois même tués pour connaitre la vérité.

Jonigan n'est qu'un malade qui n'a pas accepté sa maladie. Il fait sortir toute son énergie, toute sa volonté d'un seul coup. J'attends juste que l'énergie qu'il a à sortir s'affaiblisse et s'épuise, qu'il reprenne conscience pour faire face à la dure réalité.

- Prouve-moi le contraire Jonigan.

- Eh bien, tu as été le premier à me dire que Hazar a du talent. Elle est active, rusée, expérimentée... Elle n'est pas conne au point de discuter avec le traitre dans sa propre chambre !

- Alors qu'est-ce qu'elle faisait avec cet enculé ?

Cette question m'est totalement inutile, le dernier argument de Jonigan a bien suffit à donner la petite étincelle. C'est bien vrai, si Hazar était une espionne, - j'ai du mal à l'admettre – j'aurais difficilement pu la piéger. Elle est née avant les démons, la coincer serait mission impossible.

- Elle baisait, qu'est-ce que ça peut nous faire ? Ce dont je suis sûr c'est qu'elle est loin de l'affaire, grogne-t-il de sa voix de soldat.

Ma mâchoire se serre quand j'imagine que la femme qui m'a fait bander en quelques secondes écartait les jambes pour une taupe. Qu'elle couche avec des hommes cinq fois par jour, je m'en bats les couilles. Mais pas lui ! Pas cet imbécile !

Je suis sûr que son engin est minuscule de toute façon...

La mort de ce connard me laisse encore frustré. Je jouais avec ses nerfs depuis des jours, je tirais les ficelles de cette marionnette. Et ils ont pu se débarrasser d'un homme fatigué qui aurait pu tout dire sur leurs stupides plans.

Mon rêve de conquérir les terres de Moord s'éloigne comme un bateau qui dérive, se laissant entrainer par le courant. Les derniers évènements me font perdre l'équilibre, je ne sais plus quoi faire pour reprendre confiance, et planter mes pieds fermement dans le sol pour ne pas voir le vent des problèmes me faire tomber à la renverse. Je suis perdu.

- Sois logique Kayden, Hazar est innocente et tu le sais. Tu étais même le premier à la défendre !

- C'était avant que...

- Avant que quoi, me coupe-t-il. Qu'elle parle avec Yves ? C'est devenu interdit ? N'oublie pas qu'ils avaient le même boulot.

Ses paroles sonnent dans ma tête. C'est ce qui se rapproche le plus de la voix de ma conscience. Mais l'entendre dire des choses qui ne me plaisent pas me pousse à détester la voix de ma conscience.

Mon souffle frustré sort semblable à la vapeur d'une marmite sous pression. Rien n'y fait, il faut avouer que j'avais peut-être tort.

- Tu as intérêt à aller t'excuser Kayden...

- Quoi ? Tu veux rire ? Jamais je...

- Kayden, me coupe-t-il d'une voix semblant sortir d'une grotte. Je te connais, tu n'as sûrement pas été très clément en la traitant de taupe.

- Et alors ? Je ne suis pas censé être clément, sinon tout le monde me monterait sur le dos...

Jonigan me fixe avec un regard aussi bizarre que notre discussion. Il arrange sa cravate pour la troisième fois depuis que je suis arrivé. Il n'a jamais été très à l'aise avec les costumes, beaucoup plus habitué aux armures de combat, mais mon père a insisté à ce qu'il porte des vêtements plus « habillés » : En tant qu'assistant du leader, et responsable de la protection du sang en chef, se promener en pantalon délavé ne serait pas l'idée du siècle.

BraveryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant