Bravery

40 - Sous hypnose

Je converge toutes mes forces sur ce seul et unique test. C'est l'instant où j'ai le plus besoin de mes talents. Je m'assois face à Hazar, et l'observe, de haut en bas, de gauche à droite, chaque détail jouant le rôle d'une pièce à conviction que je range soigneusement dans mon esprit.

La sueur coulant sur son front, ses cheveux blonds en bataille et la main stressée qu'elle passe dans ceux-ci, son corps figé, troublé par de légers tremblements. Rien ne doit m'échapper, même si je dois observer son corps pendant des jours... quoique, je ne suis pas contre cette idée.

Je veux en finir avec cette journée de merde. Je supplierai le destin de changer de décision : Qu'Hazar ne soit pas une traitre, et que personne n'essaye de tuer mon père dans son sommeil. Ou bien, que le traitre soit la femme de ménage, un technicien de la base, le cuisinier... tout sauf elle.

Le fait qu'Hazar soit un traitre me fait plus mal que le fait que je n'ai pas pu protéger mon père. Que je le veuille ou non, je faisais confiance à cette jeune Moordienne, plus qu'il ne le fallait, d'une manière qui est tout sauf objective !

La réponse à la question que je vais lui poser est la plus importante de toutes les questions que j'ai posé jusqu'à ce jour. Je dois absolument savoir si elle ment ou pas, je ferais travailler toutes mes notions de psychologie, et toute mon expérience en interrogatoire et torture, pour la cerner. Elle me regarde encore silencieuse, et je fixe ses yeux bleus encore perdus par ma longue observation.

- J'ai une seule question, commencé-je en me concentrant. Je veux une réponse sincère, et courageuse.

- Tu sais très bien que je suis la définition du courage, dit-elle.

- Peut-être... mais je doute pour la sincérité...

Elle lâche un souffle tremblant qui montre à la fois qu'elle est nerveuse, mais aussi qu'elle se sent mal.

- Imagine avec moi, reprené-je en ajustant mon costume.

Je la fixe alors qu'elle fait de même, attendant mes paroles comme s'il s'agissait d'un véritable trésor.

- Tu es de retour dans la chambre de mon père... tu l'as endormi, je ne t'ai pas interrompu. Qu'est-ce que tu fais ?

Chaque mot de cette satanée phrase a du mal à sortir. Je fais un effort surhumain pour garder ma silhouette droite de chef insensible, contrairement à Hazar qui semble troublée par ma demande.

- Je... le tue.

Cette phrase devrait me rendre fou de rage, néanmoins, je sors une expiration remplie de soulagement caché. Un bégaiement, une voix tremblante, un regard honteux qui ne me regarde pas, et cinq secondes exactement avant de me répondre. Tous les signes d'un parfait mensonge.

- Hazar, reprené-je.

Je me surprends moi-même par le ton doux que j'ai adopté, et me racle la gorge pour retrouver une voix rauque et sévère.

- Tu sais tout autant que moi que tu ne peux pas me mentir...

Hazar me regarde un moment avant de souffler.

- Pourquoi tu insistes ? Hein ? Tues-moi... Vaux mieux se débarrasser de la mauvaise herbe avant qu'elle ne se multiplie...

Un frisson traverse mon corps comme une décharge électrique en entendant ces mots qui ressemblent étrangement à ceux de mon père.

- Pourquoi tu continues à essayer de raisonner avec moi ? Insiste-elle.

Je fronce instantanément les sourcils en me rendant compte qu'au final elle avait tout à fait raison. J'essaye de l'interroger alors qu'elle a déjà tout avoué, qu'elle est prête à mourir et que rien ne m'empêche de le faire.