Point de vue de Kayden.
Le seul mouvement visible dans cet abris sous-roche sont les gouttes d'eau qui abandonnent nos corps mouillés pour se loger dans le sol dur de notre cachette. Nous sommes à quelques centaines de mètres de la base qui se trouve à la merci des attaquants, aussi trouée qu'un gruyère, entourée par la merde comme un chewing-gum après digestion.
Absorbé par ma comparaison douteuse, je ne remarque pas la chaleur qui s'infiltre doucement dans mon épiderme glacé et trempé. Hazar a fini par allumer un feu et est assise proche de celui-ci, espérant que les flammes minuscules, maltraitées par le vent qui frappe tout ce qu'il trouve, arrivent à sécher ses vêtements. Avec un temps pareil, ce truc ne tiendra pas plus de quelques minutes.
La jeune femme est absorbée par les flammes qui jouent aux danseuses dans ce lieu sombre dépourvu de vie. La couleur du feu se retrouve ancrée dans la peau de la combattante, qui reprend une couleur plus vive, une couleur pleine d'illusion, vu que le froid et la fatigue ont effacé toute couleur de sa peau devenue pale.
Ses vêtements mouillés collent à son corps mangé par l'effort qu'elle a dû subir ces dernières minutes. Soudain, son regard croise le mien sans s'attarder sur le fait que je la fixe depuis un bon moment, puisqu'elle fait de même : Son regard me dévore, pas parce que ce qu'elle voit est délicieux, mais parce qu'elle a faim et que c'est le seul truc devant elle ; car il n'y a rien d'autre à regarder et que fixer le feu pour des heures promet d'être assommant pour une femme respirant la vie et le changement.
- On va rester ici cette nuit, dit-elle après un temps indéterminé de contemplation. Demain, ça sera sûrement fini...
J'hoche la tête, docilement pour une fois, et la laisse me guider. Tel un homme qui n'a plus rien à perdre, et qui sait que cet évènement ne sera visiblement pas pris comme une carte contre lui. Elle ne sera pas fière d'avoir pu prendre les rênes avec moi, simplement parce qu'être contente de ça dans un moment comme celui-ci serait juste con.
Les battements de mon cœur, qui risquent de faire lâcher les os qui me retiennent debout, annoncent haut et fort que je n'approuve pas le fait d'être caché ici alors que mes hommes affrontent une attaque, plus surprenante que la fête surprise des quarante ans de mon père.
Ses hommes, Jonigan à leur tête, ont voulu le surprendre dans ses appartements durant sa sieste d'après-midi, et m'ont emmené avec eux. On l'a effectivement surpris, en train de coucher avec ma mère, qu'on aurait visiblement du mettre dans la confidence avant de s'élancer dans la fête surprise.
Les hommes, le gâteau et les ballons toujours en main, et la bouche grande ouverte, ont détournés le regard en fermant la porte du bout des doigts sous les jurons peu délicats de mon père. Mais le plus drôle était Jonigan qui essayait d'expliquer au gamin de dix ans devant lui ce que ses parents étaient en train de faire.
« Un simple entrainement de combat à mains nues jeune ami. »
Et ce n'était pas uniquement les mains qui étaient nues.
Ce souvenir ne devrait pas m'arracher un sourire dans un moment aussi critique. La tension dans la grotte est omniprésente, presque palpable. Je devrais me considérer comme un lâche, et accuser Hazar pour m'avoir sorti de la guerre sans avoir combattu. Mais je suis un homme objectif, dans ces situations, une seule règle survit : Sauver la tête du serpent, le corps se reconstruira.
Cette règle ne m'enchante pas entièrement, mais il faut bien avouer qu'elle est logique, et que Hazar n'a pas hésité une seule seconde, quitte à risquer sa propre vie, à la faire respecter.
Les flammes prennent leur dernier souffle avant de tomber et de disparaitre, ne laissant que leur cadavre de cendre et une fumée blanche traduisant leur agonie.
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Bravery
Science Fiction2160. Tuer est une habitude, torturer un loisir quotidien. L'Homme n'est plus humain, la compassion est noyée dans les cendres des guerres qui font rage. Bravery, un des territoires les plus puissants au monde, n'a qu'un but: Massacrer pour ga...