Chapitre 18 : Voyage

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La nuit avait été longue. J'en avais des courbatures dans tout le corps meurtri par un matelas inexistant. Ma robe me collait à la peau, telle une sangsue, et mon visage terne devait être recouvert de crasse. Je devais être affreuse.

Le soleil venait à peine de se lever, quelques rayons traversant les gros nuages gris. Je pouvais presque sentir la fraîcheur ainsi que l'humidité et l'électricité des orages voguant dans l'air. Encore une journée sous les gouttes d'eau qui s'annonçait.

La pluie battante de la nuit m'avait empêchée de fermer l'œil. En plus, une bagarre avait éclaté au petit matin, me réveillant en sursaut par les bruits des coups et des cris. J'avais vraiment atterri au Moyen-âge, dans tous les sens du terme.

Sans grande envergure, je m'étais levée du lit, les jambes engourdies et avais commencé à me préparer pour la journée d'aujourd'hui. Je devais marcher jusqu'à une grande ville. Ou du moins m'en approcher.

Me tenant fermement les cheveux pour les tresser, je grognai une nouvelle fois de lassitude devant mon incapacité à les coiffer correctement. Les nœuds et la boue rendaient la tâche difficile. Je soufflai d'énervement lorsque j'entendis une personne frapper avec énergie sur ma porte, faisant battre mon cœur au rythme des coups. J'attendis quelques secondes, la peur me paralysant, avant de me lever péniblement et d'ouvrir la porte.

« - Je vous apporte de l'eau, si vous voulez vous laver ! »

Les paroles fortes et audibles de la barman d'hier soir me firent sursauter comme une brebis effrayée.

« - Je ... Merci, réussis-je à dire dans un murmure. »

Elle me regarda de haut en bas de ses yeux hautains et froids avant de me tendre le seau d'eau rempli à ras bord. Je le rattrapai de justesse alors qu'elle filait déjà dans la chambre d'à côté, m'ignorant totalement.

Je restai un moment sur le bas de la porte, dans mes pensées avant de rentrer une nouvelle fois dans ma chambre. Au moins j'allais pouvoir ressembler à quelque chose. Je me lavai rapidement, ne voulant pas m'éterniser avec peu de vêtements sur moi. Puis je descendis à contre-cœur dans le village, le pas lent.

Cette auberge aux escaliers grinçants et aux chambres rustiques était dans le centre. Située à côté du bar et d'une office qui devait servir aux impôts. Le reste n'était que maisons abandonnées, sales et puantes.

J'entendais à peine les oiseux voler dans le ciel. L'air envoyait valser les derniers feuilles marrons des arbres qui venaient s'écraser dans la boue. La fin de l'automne s'annonçait. Plus d'oiseaux, qui avaient migré, et encore moins de branches fleuries. Le temps allait de plus en plus se gâter. La pluie et la boue laissant place à la neige et au froid hivernal. Je devais vite trouver la ville la plus proche pour la saison polaire.

« - Ce n'est pas très prudent de sortir seule, mademoiselle. »

Je me retournai sur-le-qui-vive, le cœur ratant un battement, et me retrouvai face à l'homme bourré du bar. Ce roux était beaucoup plus impressionnant à quelques centimètres de mon corps qu'à l'autre bout de la pièce. Sa carrure imposante était inquiétante. Je n'étais pas très rassurée.

« - Il est vrai mais je n'ai pas d'autres choix, lui répondis-je en reculant d'un pas. »

Il sourit, ravi de me voir dans cet état. Ses pommettes étaient recouvertes d'une barbe rousse grandissante et peu soignée. Ses yeux rieurs m'envoyaient des éclairs. Il se jouait de moi. Il prit ses cheveux dans un geste expert et les attacha en queue de cheval, ne me quittant pas du regard.

« - Et pourquoi cela ?

- Je voyage jusqu'à la prochaine grande ville.

- Seule ? N'avez-vous pas de parents ou de mari ? »

Empires : L'émergenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant