Chapitre 8 : Voyages spatio-temporels

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Stupéfait et dans l'incompréhension la plus totale, je sentis mon cœur bombarder ma poitrine de contractions accélérées et envahissantes. Tels des coups de poings enragés. Comme si mon organe vital cherchait à sortir de mon corps trop encombrant. Je n'arrivais pas à faire le lien entre ce que je voyais et la réalité.

Mon cristallin renvoyait l'image d'un camarade disparu et mon cerveau se remémorait la présence de Loan encore quelques secondes auparavant. Il était pourtant bien là, je l'avais bien vu de mes propres yeux. Et maintenant même avec toute ma volonté je devais admettre que l'anneau doré l'avait emmené ailleurs.

Dans son monde.

Et c'était la peur qui prenait place dans mes synapses, prenant possession de mes membres qui refusaient de bouger. J'étais immobile dans le noir. Dans ce lugubre et affreux couloir qui entourait la pièce ovale isolée du château. Les reflets bleus que renvoyaient l'unique lumière se répercutaient contre ma rétine, l'anneau désormais démuni de toute brillance.

Prenant une grande respiration, je lorgnai Bryan et Sofia à mes côtés. Tous deux étaient dans le même état stupéfait que moi, n'en revenant pas. Nous étions cloués sur place, se demandant comment cela était possible.

Mais nous n'avions aucune explication scientifique convenable. Nous devions admettre une obscure évidence : c'était de la magie. Une sorte de magie.

Les secondes défilèrent et seules nos respirations saccadées étaient audibles dans ce silence pesant. Le directeur et le professeur ne parlaient pas non plus. Ils attendaient, certainement le retour de Loan. Le directeur remettait l'anneau dans la mallette, la refermant à double tour.

Mais où avais-je atterri ?

Parler des différents mondes était une chose. Le vivre en était une tout autre. Cela paraissait irréel. Insensé. Comme un secret millénaire. Une énigme impénétrable.

Le temps défila rapidement. Mes courbatures refaisaient indéniablement leur apparition, mes sens de nouveau contrôlés par ma volonté. J'atterrissais sur la terre ferme, ma stupéfaction s'évaporant dans l'air lugubre du couloir.

Après de longues minutes interminables et inestimables, une lueur dorée irréelle éclaira à nouveau la pièce. Comme si l'anneau rappelait l'humain à qui il avait été lié plusieurs minutes auparavant. Je clignai des paupières, humidifiant mon cristallin asséché, et en une fraction de seconde, Loan réapparu devant nous. Inchangé. Ténébreux.

Me remettant de mes émotions, je laissai mon fessier toucher disgracieusement le sol poussiéreux et je m'adossai au mur inconfortable derrière moi. Jamais je n'aurais cru vivre cela de ma vie. Jamais.

Ne voyant plus par les fenêtres insalubres du couloir, j'entendis seulement des pas quitter la pièce et des chuchotements lointain. Ils partaient.

《- Je n'avais jamais vu ça. 》

Personne ne répondit à Bryan. Personne ne trouva rien à redire. Nous ne saurions expliquer ce que nous avions vu. Nous savions seulement que nous l'avions vu.

Et plus les jours passaient et plus les langues se déliaient. Nous osions seulement en discuter, comme si nous avions vu l'interdit. Et nous avions pris conscience que nous voguions vers l'inconnu. Loan avait fait preuve de plus de discernement que nous, reprenant le cours de sa vie normalement. Alors que nous trois, nous étions en plein chamboulement. En plein questionnement.

Je savais que je voulais savoir le fin mot de l'histoire. Mais étais-je assez forte pour surmonter les épreuves ? J'en doutais fortement.

Tandis que je me lavai les dents un soir en sortant de la douche, j'entendis de faibles battements à ma porte. Je fronçai les sourcils en crachant avec désobligeance dans l'évier avant de mettre un peignoir pour seul habit.

Empires : L'émergenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant