34. MATTEO

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J'ouvris les yeux et m'étirai. La soirée de la veille m'avait laissée un mal de tête carabiné et la bouche pâteuse. Je n'avais pas assez dormi et étais prêt à m'offrir quelques heures de sommeil en plus. C'était sans compter ma mémoire qui se rappela à mon bon souvenir.

Je me redressai d'un bon dans le lit et me retournai. J'étais seul. Je tendis l'oreille pour m'assurer que Caz n'était pas dans la salle de bain, mais il semblait avoir complètement déserté la chambre. Je poussai un soupir de soulagement. Cela me laissait un peu de temps pour me remettre les idées en place.

La veille nous nous étions immédiatement endormis et n'avions pas pris le temps de discuter de ce que nous venions de faire. Nous n'étions de toute façon pas en état. Mais aujourd'hui il allait falloir que nous parlions. Je tenais à savoir ce que cela signifiait pour lui, et pour notre amitié.

Me levant, je sentis une douleur qui m'arracha une grimace. Cela faisait longtemps que je n'avais plus pratiqué et mon corps me le faisait sentir. Je filai sous la douche et fis couler l'eau chaude avant de me glisser sous le jet. Je laissai l'eau me laver alors que les souvenirs de la nuit remontaient. Ça avait été impulsif et torride. Rien à voir avec le sexe doux et tendre que nous partagions avec Laurent.

Je me figeai à cette pensée, les yeux grands ouverts, la panique se ruant sur moi.

Laurent.

Je me frappai le front du plat de la main et jurai. Pas une minute, pas une seconde je n'avais pensé à lui durant le week-end. Encore moins cette nuit.

La culpabilité m'assaillit, me nouant le ventre et me donnant la nausée. J'avais trompé mon petit ami sans la moindre gêne, sans même une pensée pour lui. Et pire que tout, je l'avais trompé avec le mec dont il se méfiait le plus.

J'avais envie de vomir. À cet instant, je me sentais comme le pire connard de la terre.

Je terminai de me doucher et me dépêchai de m'habiller. Il fallait vraiment que je trouve Caz et que nous discutions de ce que nous allions faire. Pour le moment j'étais incapable de réfléchir sereinement et de prendre une décision. Est-ce que je devais tout dire à Laurent, quitte à le faire souffrir et rompre avec lui ? Ou bien devais-je garder ça pour moi et vivre avec ma culpabilité ?

Discuter avec Caz m'aiderait sûrement à prendre une décision, il était toujours de bon conseil.

Je descendis jusqu'à la salle à manger et le cherchai du regard. Il était installé à une table avec les autres qui étaient, bien entendu, déjà levés eux aussi. Je ne savais pas de quoi ils discutaient mais ils riaient, Caz se joignant à eux.

Mon cœur se serra à la vue de son sourire, un flash de la nuit me revenant. Je chassai le souvenir de mon esprit. Ce n'était franchement pas le moment.

Passant par le buffet, je me servi un verre de jus d'orange. Je n'avais pas faim et ne pouvais rien avaler d'autre. Je rejoignis ensuite les autres qui s'exclamèrent en me voyant.

— Ah bah enfin levé, c'est pas trop tôt !

— Oh ça va, répondis-je en donnant le change. Tout le monde n'est pas parti se coucher avec les poules.

— Oh bah j'en connais au moins un qui est parti se coucher avec une poule, renchérit Enzo en éclatant d'un rire graveleux.

— Tiens d'ailleurs, toi qui partage ta chambre avec lui, tu pourras peut-être nous en dire plus, ajouta Étienne en me regardant.

— Ouais, Caz refuse de nous dire qui est la nana qui lui a laissé un tel suçon, termina Nathan en désignant la petite tâche sombre qui marquait le cou de Caz.

Je regardai les autres. Enzo, Étienne et Nathan étaient suspendus à mes lèvres, Karim et Clément avaient interrompu leur conversation et nous regardaient en souriant, curieux. Quant à Jérémy, il m'observait bizarrement. Mon regard croisa celui de Caz. Ses yeux brun me fixaient avec la même intensité que la veille.

Il n'avait visiblement rien dit aux autres, mais je savais à son attitude nonchalante que ce n'était pas par gêne. S'il n'avait rien dit c'était vis-à-vis de moi. Il me laissait le choix de révéler ou non ce qu'il s'était passé.

Je portai le verre de jus d'orange à mes lèvres et en bus une longue gorgée avant de le reposer et de hausser les épaules. J'avais besoin de me donner une contenance et de me concentrer pour ne pas rougir.

— Désolé les gars, j'en sais pas plus que vous. Avec ce que j'ai bu hier, je me suis écroulé comme une masse à peine dans la chambre. Et ce matin en me réveillant, Caz n'était déjà plus là.

Les autres s'exclamèrent de dépit et repartirent dans des conjectures auxquelles Caz ne répondit pas, se contentant de rire, et dans le meilleur des cas, d'éluder les questions. Au bout d'un moment les garçons se lassèrent et changèrent de sujet. Je me joignis à eux, tentant de faire comme si de rien n'était.

— Au fait l'avion est à quelle heure ?

— À 14h30, répondit Caz.

Karim regarda sa montre.

— Merde, ça nous laisse même pas le temps de profiter de la piscine comme il se doit.

— Bon bah moi, je vais monter préparer mes affaires et me reposer un peu, dit Étienne en se levant.

Chacun y alla de son programme. Nous devions nous retrouver d'ici quarante-cinq minutes pour prendre la navette qui nous emmènerait à l'aéroport, ce qui nous laissait un peu de temps.

Je m'apprêtai à me lever moi aussi pour remonter à la chambre, mais Caz me demanda :

— Je vais reprendre à manger, tu veux quelque chose ?

Je n'avais absolument pas faim, mais c'était l'occasion de discuter. Je me rassis et acquiesçai.

— Ouais je veux bien une assiette composée s'il te plait.

— On vous laisse alors, dit Jérémy en nous regardant l'un après l'autre.

— Ouais, on se retrouve tout à l'heure dans le hall, répondis-je en lui souriant.

Je me retrouvai seul à la table, mais Caz ne tarda pas à revenir avec deux assiettes pleines d'œufs brouillés et de bacon. Il s'assit en face de moi.

— C'est ce que tu appelles une assiette composée ? demandai-je en souriant.

— C'est une assiette avec de la nourriture. Et c'est bon, alors mange, répondit-il.

Je le regardai se mettre à manger, sans paraître le moins du monde gêné. Il avait fait en sorte que nous nous retrouvions tous les deux, et je m'attendais à ce qu'il entame la conversation, mais il garda le silence. Je ne savais pas trop quoi en penser, et commençai même à me dire qu'il ne se souvenait peut être pas de la nuit.

Au bout d'un moment, n'en pouvant plus, je me lançai :

— Caz, il faut qu'on parle.

Il reposa sa fourchette et me regarda.

— Et de quoi ?

Je sentis mon expression se décomposer. C'était ça, il ne s'en souvenait pas ; ou bien pire, il s'en fichait. Alors que mon esprit commençait à délirer, je vis un petit sourire en coin étirer ses lèvres.

— C'est bon, me dit-il. Arrête de paniquer. 

Pour un bouquet de fleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant