Chapitre 8.1

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Le silence ne dura pas longtemps dans l'habitacle. À peine avions-nous quitté le Repaire que Jase s'emporta.

« Je peux savoir ce que c'était que ça ? cracha Jase tout en slalomant entre les voitures à une allure folle. »

J'ignorai sa remarque acerbe et m'accrochai à la poignée de la portière, trop préoccupée par la vitesse à laquelle il roulait que pour répondre. Il était si brusque dans ses mouvements que j'étais bringuebalée dans tous les sens. À cet instant, j'aurais donné cher pour pouvoir activer la conduite automatique. L'intelligence artificielle aurait repris le contrôle du véhicule et aurait empêché Jase de nous faire frôler la mort à chaque virage. Malheureusement pour moi, le bouton était hors d'atteinte.

Je déglutis, mon cœur battant encore la chamade suite au baiser que j'avais échangé avec Kaden. Un tas d'émotions contradictoires m'assaillait : joie, désir, frustration, peur, stress, énervement... J'en avais déjà parlé avec mon frère. Il ne voulait pas que je fréquente des humains, et encore moins que je sorte avec eux. C'était trop dangereux. Pour lui, pour moi. Et il avait raison. Si Kaden apprenait la vérité, ce qu'il s'était plus que probablement passé aujourd'hui, cela signait son arrêt de mort. Et mon exclusion de la BPP par la même occasion. Je pestai. Je m'étais enfoncée moi-même dans ce bourbier. Depuis le début, j'avais pris les mauvaises décisions. Je n'aurais pas dû écouter mon cœur, mais ma raison. Je ricanai. Un grand philosophe ne disait-il pas : « Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point » ?

« Lili, je te cause, siffla mon frère entre ses dents serrées face à mon manque de réaction. »

Il était furibond. Et je savais au fond de moi que j'aurais beau lui expliquer, il ne comprendrait pas. Il était si protecteur envers moi. Il n'accepterait jamais qu'un autre homme face partie de ma vie, Chasseur ou non.

« Lili, répéta-t-il, au bord de l'explosion. »

Ses muscles tressaillaient et sa mâchoire semblait à deux doigts de se briser tant elle était contractée. Une petite veine près de sa tempe pulsait sous sa peau légèrement halée et ses mains étaient si contractées sur le volant qu'il aurait pu le broyer. Je haussai les épaules pour toute réponse, ne voulant pas rentrer dans son jeu, et regardai le paysage défiler à toute vitesse à travers la vitre. Mon frère était loin d'être idiot. Il m'avait vue embrasser Kaden. Il savait ce que cela signifiait pour moi.

Pourtant, alors que je tentai de garder mon calme, un tas de réponses sarcastiques, comme « c'est mon problème, pas le tien » ou encore « ce n'est pas parce que ta vie sexuelle est aussi trépidante que celle d'un poisson rouge que je n'ai pas le droit de fréquenter quelqu'un », me brûlait la langue. Mais je me retins. Je n'avais pas envie de m'étendre sur le sujet avec mon frère. C'était ma vie privée, mon problème, mes erreurs. Si je lui en parlais, je savais qu'il ne se contenterait pas de me donner son point de vue ou des conseils. Non. Il déciderait à ma place ce qui était bon pour moi. Jusqu'ici, je l'avais laissé façonner ma vie. Mais en ce qui concernait Kaden, je refusais. Un pincement au cœur me surprit lorsque je pensai à lui. Plus je m'éloignais de lui, plus ma mauvaise humeur grandissait. Je n'avais qu'une envie : sortir de la voiture et le rejoindre en courant.

Je fermai les yeux et fit abstraction de mon frère qui crachait, furibond, toute sa colère. Il ne cessait de me questionner, de me rappeler ce qu'il était bon de faire et de ne pas faire, de prévoir l'interdiction de me laisser sortir ou de revoir ce « con », comme il se plaisait à le dire. Je le laissai évacuer sa rage, ses remarques me laissant indifférente. Parler avec lui maintenant ne servirait à rien. Il ne comprendrait pas, et je ne voulais pas m'énerver. J'en avais encore pour un bout de temps dans cet espace confiné avec lui et je n'avais pas envie que la situation dégénère.

X-TeriaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant