CHAPITRE 19

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Version relue et améliorée

Je l'ai tué... Le monde s'effondre autour de moi, un voile glisse devant mes yeux ébahis. Mais la vie continue pour les autres, certains des pilotes sont en train de se faire prendre en photo par des journalistes, des filles à moitié nues sur leurs genoux. Moi aussi on me photographie, les flashs lumineux qui jaillissent en ma direction en témoignent. Le ciel s'est assombri, il semble en deuil lui aussi. Pourquoi mis à part le petit groupe que nous formons, tout le monde s'en fiche ? Ils ne le connaissaient pas ? Ils ne sont pas au courant ? Je me retourne vers Wendy, elle est immobile, sa main serre si fort celle de la mère de John qu'elle risque de la lui briser. Zach n'est pas là, je le sais, il est parti. Il fait ça à chaque fois qu'il y a un problème. Je l'ai tué... Ces mots repassent en boucle dans ma tête depuis deux bonnes minutes... Je me suis assise par terre, sur la route humide. Cette putain humidité qui a coûté la vie à John ! Putain de merde c'est moi qui aurait dû mourir ! Si je n'avais pas essayé de le doubler comme une folle, il serait encore là ! Je le déteste ! Comment a-t-il pu être assez inconscient pour accélérer alors qu'il n'avait plus aucune adhésion sur chaussée humide ? Je te déteste John, mon grand frère ! Je te déteste pour avoir été assez con pour prendre ce risque ! Bordel de merde t'es mort trop bêtement, sur la dernière ligne droite, t'aurais dû ralentir putain ! Je... Je n'aurai pas dû te doubler... Ce n'est pas de ta faute... C'est moi qui t'ai tué ! Tout ça pour une foutue place au championnat du monde ! Ce n'est pas toi que je déteste John, c'est moi ! Je me hais, je n'ai pensé qu'à ma gueule encore une fois ! Je suis tellement désolée... Je suis la plus grosse conne de l'univers !

- Noémie ? Tente de m'appeler doucement Carter.

Il pose une main sur mon épaule mais je me dégage de lui.

- Noémie arrête, relève toi ! Poursuit-il d'une voix plus ferme.

Je lève la tête vers lui, mes yeux sont rougis par les larmes que je tente de retenir et mes joues flambent de haine pour moi-même.

- Tu parles à la fille qui vient de tuer son meilleur ami putain ! Lâché-je d'une voix rendue rauque par les pleurs.

Ma gorge est nouée par l'horreur et le désespoir. Je me sens abandonnée, comment vais-je faire ? Je suis incapable de vivre sans lui ! Pourquoi a-t-il fallu que ça tombe sur lui ? Je suffoque, il n'est plus là ! Pourquoi n'est-il plus là ! Je vais mourir, je ne me sens pas bien. Tout se bouscule dans ma tête, j'ai si peur... Ce n'est pas possible qu'il ne soit plus là ! Je suis forcément en train de faire un cauchemar !

- Mais qu'est-ce que tu racontes ? S'inquiète-t-il en me relevant de force, coupant court à mes pensées.

- Lâche moi Carter ! Je me déteste !

Je n'arrive plus à respirer; j'ai si mal...

- Tu te déteste peut-être mais moi non, et John non plus ! Répond-t-il d'une voix ferme et sèche.

- Qu'est-ce que t'en sais ? Il t'a envoyé un SMS du paradis ? Je m'exclame d'un ton moqueur, mauvais.

- John a eu un accident ! Comme n'importe quel pilote peut en avoir un ! Ce n'est pas toi qui lui a dit d'accélérer !

- Peut-être que sa pédale de frein ne marchait plus !

- Si, elle marchait, il a voulu prendre le risque de mourir. Et il a perdu, ce n'est pas de ta faute !

- Je me déteste quand même ! Comment vais-je faire pour me rendre à son enterrement alors qu'il est mort par ma faute ?

- Je t'ai dit que ce n'était pas de ta faute ! S'énerve-t-il en me secouant par les épaules.

- Je n'en peux plus Carter, j'ai mal partout, je suis crevée, déprimée, c'est à peine si je tiens sur mes jambes... J'en ai marre !

Il me serre dans ses bras sans rien dire et je me laisse faire. Je ne me dégage pas de son étreinte, laissant plutôt son odeur masculine m'apaiser du mieux qu'elle puisse. Je tremble de tout mon corps, je suis secouée de puissants soubresauts rythmant mes pleurs.

- Tu aimes piloter Noémie, pourquoi aimes-tu ça ? Me demande-t-il d'une voix douce.

Il attend ma réponse mais celle-ci ne vient pas, alors il poursuit sur le même ton :

- Pour l'adrénaline. Tu fais ça pour la vitesse, les sensations fortes... Lui aussi, conduisait pour ça. Il en connaissait les risques, mais il aimait les prendre parce qu'il n'était pas fait pour regarder le foot à la télé. Il aimait l'action, et malheureusement dans ces sports, ça passe ou ça casse. Mais il est mort sur le circuit, quoi de mieux pour un pilote ?

- C'était sa dernière saison...

J'éclate en sanglots après ces paroles. Il me prends dans ses bras et me conduit à l'intérieur des loges.

- Ne pleure pas comme ça, c'est un nid à journalistes ici, tu vas finir à la une des journaux ! Poursuit-il en essuyant mes larmes.

Il veut me reposer sur une chaise mais je ne le lâche pas, je n'ai pas la force de supporter ça toute seule. Je veux qu'il soit avec moi...

- Je vais juste chercher tes vêtements... Murmure-t-il.

- J'me fous de ça, ne me laisse pas seule... Je souffle en m'asseyant sans le lâcher.

Il s'assoit à côté de moi, sans rien ajouter. Il me regarde, j'en fais de même, toujours silencieuse. J'ai de la chair de poule, et même si mon rythme cardiaque a diminué, il reste quand même très élevé...

- T'es parfaite... Fait-il sans me quitter du regard.

- Quoi ? Je réponds de manière pas du tout classe.

- Sur le circuit, précise-t-il, t'as été parfaite, je n'ai jamais vu quelqu'un conduire aussi bien.

- Euh... Merci... Je réponds, trop gênée pour faire une phrase entière, sentant déjà mes joues s'empourprer.

Je fais comme si de rien n'était, mais son compliment me touche énormément... Il n'aurait pas pu m'en faire de plus beau... Il me sourit sincèrement, les sourcils froncés d'inquiétude.

- Si t'as besoin de quelque chose, tu me le dis... soupire-t-il à voix basse.

- J'ai besoin d'une seule chose Carter, que tu m'embrasses.

- Quoi ? Noémie, je ne crois pas que ce soit le moment...

- Si c'est le moment ! J'ai besoin d'aller mieux, et ça me permettra d'aller dix mille fois mieux !

Je n'ai rien le temps d'ajouter que je me retrouve sur ses genoux. Il m'embrasse doucement, comme s'il avait peur de me briser. Je passe mes doigts dans ses cheveux, approchant ses lèvres pulpeuses plus proches encore des miennes. Je soupire contre sa bouche alors que nous nous relevons. Ses mains jusque là sur ma nuque descende au creux de ma taille. Je frissonne, alors que sa langue rencontre la mienne. Durant un instant, j'oublie tout. Avant que tout me revienne en pleine face, me forçant à rompre l'étreinte qui m'unissait à Carter... Je reprends mon souffle quelques instants, dans mes yeux brillent la peur. Je suis terrifiée par moi-même... Carter a beau me rappeler encore et encore que je n'y suis pour rien, je n'arrive pas à me défaire de cette idée... Je culpabilise encore d'avoir gagné cette course, d'avoir causée la mort de John...

- Ce n'est pas de ta faute Noémie, me souffle justement Carter.

- Je sais... J'ai seulement du mal à me faire à l'idée que je ne conduirai plus jamais à ses côtés...

Pourquoi est-ce que ça arrive toujours lors de la dernière saison ?

AdrénalineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant