CHAPITRE 29

445 45 87
                                    

Version relue et améliorée 

Après trois heures de musculation intense, nous ressortons de la salle. Je cherche comment je peux faire pour rentrer chez moi quand Jérôme me demande :

– Cette après–midi, les enfants du foyer social viennent pour faire du kart, tu veux m'aider à les gérer ou tu as autre chose à faire ? Me demande–t–il d'un ton entendu.

– Non, je n'ai rien d'autre à faire, Carter est en voyage d'affaire jusqu'à samedi soir donc je suis complètement d'accord pour t'aider ! Rigolé–je en partant finalement vers les vestiaires pour prendre une douche.

– Tu me rejoins à l'accueil ! Répond–t–il alors que je referme la porte des vestiaires.

Je me lave en vitesse, légèrement stressée à l'idée de ce qui m'attends après... Les enfants de ce foyer sont particulièrement difficiles à gérer, ils ont vécu des choses ignobles avant d'être placés et souvent, ce passé douloureux se reflète dans leur personnalité. Ajoutez à ça une bonne crise d'adolescence à base de drogue, vous obtiendrez les enfants que je m'apprête à initier. Mais moi aussi j'ai vécu ces choses là, enfin, certaines choses. Et je comprends ce qu'ils ressentent, cette haine qu'ils vouent au monde entier, je l'ai ressentie aussi. Alors d'un autre côté, je ne leur en veux absolument pas d'être comme ça, ce n'est pas de leur faute mais bien de celle de leurs parents. Je sors de la douche et remets mes vêtements de ce matin, je sèche comme je peux mes cheveux avec une serviette avant de ressortir sur le circuit. Le vent finira de les sécher... Je rejoins Jérôme à l'accueil, il est en train de peaufiner les derniers détails avec la directrice du foyer. Je reste à l'écart, le visage dur, je n'ai pas envie de m'entretenir avec cette femme. Je ne sais pas pourquoi, je ne supporte pas le personnel des foyers d'aide à l'enfance, je ne leur fais pas confiance. Sans aucune raison, certes, mis à part mon expérience peu agréable de ceux-ci...

– Bien, à dans une heure ! Conclut la femme en quittant l'accueil.

Jérôme revient vers moi, traînant avec lui une ribambelle de gamins de tous les âges. Ils sont onze, tous des garçons. Pourquoi est-ce qu'il n'y a pas de filles ? Je leur adresse un petit sourire mais je reste en retrait, je préfère laisser Jérôme gérer. Ils ressortent tous sur le circuit où mon coach les fait asseoir à même le sol. Tous les enfants semble vraiment intéressés alors que Jérôme ne fait qu'énoncer les consignes de sécurité. Seul un des garçons, légèrement plus petit que les autres semble mis mal à l'aise dans cet environnement sûrement différent du sien. J'hésite à aller le voir, je devrais sûrement, après tout je suis là pour ça... mais je ne n'ose pas y aller, d'un côté il m'intimide un peu... Il me fait penser à moi, les premières fois que Jérôme m'a emmené ici. J'étais complètement stressée à l'idée de monter dans un kart, j'avais peur qu'il aille trop vite, ou d'avoir un accident. Et puis John et Zach me faisaient peur, j'étais très petite pour mon âge à l'époque donc même si Zach et moi étions tous les deux en neuvième année on me donnait facilement deux ans de moins. Alors avec John qui a neuf ans de plus que moi, j'étais un bébé ! Mais malgré ça, je me débrouillais pas mal et rapidement j'ai atteint leur niveau. A peine avais-je quitté le circuit que je ne pensais qu'à une chose, y retourner ; même si j'avais toujours un peu peur, assise dans mon kart. Et maintenant, je vais cinq fois plus vite et je n'ai presque pas peur. Même si ça ne disparaît jamais complètement, c'est sûr !

Je m'avance vers lui d'un pas motivé et je m'assois à côté de lui. Je le regard inquiète et déclare d'une voix mal assurée :

– Tu es stressé à l'idée de faire du kart ?

Il se retourne vers moi, ses yeux bruns me transpercent avec une intensité que seuls les enfants savent reproduire. Il ne dit rien pendant quelques instants, que nous passons à nous regarder dans un silence religieux puis il déclare d'une petite voix tremblante :

– Un peu...

– C'est normal, moi aussi j'ai peur avant de monter dans ma Formule 1, réponds–je avec un sourire.

– C'est toi Noémie ? Me demande–t–il avec admiration.

– Oui, tu me connais ? Je poursuis, essayant d'en connaître plus sur lui.

– Mon papa me parlait beaucoup de toi... soupire–t–il alors qu'un éclair de tristesse passait dans ses yeux.

Je décide de ne pas m'attarder sur le sujet, voulant éviter un drame, et poursuit plutôt dans une autre optique :

– Tu aimerais essayer le kart ?

– Ça me fait peur... Me répond–t–il d'une voix tremblante.

– Mais tu ne penses pas que tu seras content d'essayer ?

– Tu resterais avec moi ? Me demande–t–il, une lueur d'espoir dans ses yeux sombres.

– Si ça peut t'aider, évidemment ! Rigolé–je en lui faisant un petit clin d'oeil alors que tout le monde courait, suivant les ordres de Jérôme, jusqu'à l'entrée du garage.

Je lui tends ma main en me relevant mais il ne l'attrape pas et part devant tout seul. Je le suis, légèrement surprise par son comportement. Il me fait penser au mien, vis-à-vis de Carter lors de notre premier rendez-vous... L'enfant rejoint Jérôme qui en profite pour se moquer de moi :

– Tu t'es fait un ami ?

– Arrête, je ne fais que le rassurer !

Il rigole en rejoignant le groupe alors que je cherche des yeux le petit garçon avec qui je venais de discuter. Il est au fond, il me fait de grands signes pour que je le rejoigne. Je me dépêche d'aller à sa hauteur puis je lui conseille à voix basse :

– Écoute bien ce que va te dire le monsieur, c'est super important !

– Tu crois qu'on peut lui faire confiance ?

Cet enfant et décidément très étrange... Il semble se méfier de tout et garder une distance avec tout ce qui s'approche trop près de lui...

– Oui, c'est sûr ! Tu sais, c'est un peu comme mon papa...

– Justement, peut–être que tu ne devrais pas trop lui faire confiance... Chuchote–t–il, comme si on aurait pu l'entendre.

– Tu veux connaître un secret ? Je lui demande avec un grand sourire malicieux.

– Quoi ? Me répond–t–il déjà impatient que je lui confie mon secret.

– Quand j'avais 14 ans, je me suis échappée de chez moi, et je l'ai rencontré. Il s'est très bien occupé de moi comme si j'étais son enfant. Et jamais il ne m'a montrée le moindre signe de méchanceté. Tu peux lui faire confiance...

– Pourquoi tu es partie de chez ton papa et ta maman ?

– Ça, c'est un autre secret, réponds–je avec un clin d'œil.

Il fait la moue alors que Jérôme arrive vers nous. Il tend un casque au petit garçon, sans cesser de me sourire niaisement. Je le foudroie du regard alors qu'il repart vers les autres. Le garçon enfonce son casque sur sa tête, ses petites mains tremblent quand il le ferme, je le rassure :

– On laissera partir les autres et on ira à notre rythme nous, d'accord ?

Il hoche la tête et monte dans son kart. Il boucle son harnais de sécurité sans me quitter des yeux. Jérôme passe vérifier que tout est bien réglementaire avant de lancer le départ. Les enfants se lancent tout droit, à fond sur la piste de karting. Une fois qu'ils sont assez loin, je demande à l'enfant se trouvant à mes côtés :

– T'es prêt ?

Il acquiesce alors je poursuis :

– Vas–y je te surveille.

AdrénalineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant