Chapitre VII

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Hugo fixait son assiette vide, assis sur un des tabourets autour de l'îlot central. Il savait ce qui allait arriver maintenant mais le comportement de Aaron l'avait un peu refroidi. Comment pourrait-il ignorer l'accès de violence dont il avait fait preuve et le fait qu'il n'était rien de plus qu'un plan cul pour lui ? C'était clairement impossible ! S'il n'avait pas eu son train à prendre le lendemain et nul part où aller, il se serait déjà sauvé, aucun doute !

— Bon...

— J'ai pas envie, le coupa sèchement le brun en plongeant ses yeux marron-vert dans ceux miels de l'ancien barman.

— Pardon ? C'est pas pour ça que tu es venu squatter chez moi ?

— Je suis pas une pute, qu'est-ce que tu crois au juste ?! Tu te permets de me...

— Oh pitié, petit agneau, ne me dis pas que tu n'as pas été un tout petit peu excité quand je t'ai plaqué contre le mur... 

L'étudiant piqua un fard à la remarque du plus vieux alors que ce dernier lâchait un petit rire moqueur. Il se leva en prenant les assiettes et les déposa dans son lave-vaisselle avant de se tourner vers son cadet et de poursuivre avec un calme olympien :

— Tu viens dans ma chambre, petit agneau ?

— J'ai dit que je n'avais pas env-...

— Soit. Je vais jouer du piano.

Le brun contracta la mâchoire en le regardant s'éloigner vers l'instrument. Décidément, il semblait être tombé sur un beau, très beau d'ailleurs, connard. Mais il ne voulait pas céder aussi facilement à Aaron. Il l'avait déjà fait la première fois et ça ne s'avérait pas être une excellente idée  vu la situation dans laquelle il se trouvait désormais. Il jeta un œil vers la porte de sortie et son sac posé juste à côté, se disant qu'il aurait sûrement de quoi payer une nuit d'hôtel de toute manière. Pourtant, il voulait rester. Parce qu'au fond de lui, il ne pouvait pas résister à ce corps d'Apollon tout près de lui... 

Hugo soupira longuement avant de prendre sa décision. Il ne partirait pas, parce que pour le moment il avait besoin de l'attention de quelqu'un et que seul le roux lui en donnait. Il ne devait simplement pas s'attacher plus qu'il ne l'était déjà. Ce qui serait plutôt simple si Aaron continuait à se comporter comme un connard. Il regarda l'ancien barman s'asseoir à son piano, caressant pensivement les touches, et il annonça :

— Je t'attends dans ton lit, enfoiré.

— Quelle politesse, petit agneau, rigola Aaron en commençant à jouer les premières notes d'une mélodie.

— Tais-toi...

Mais mon rêve, ma chérie, c'est de me perdre dans tes yeux bleus, d'être en vie, d'être amoureux, de s'en aller un peu... Mais mon rêve, ma chérie, c'est de me perdre dans tes yeux bleus, d'être en vie, d'être amoureux, de s'en aller un peu...

Va t'faire enculer va bien t'faire enculer, salope, j'en ai plus rien à faire, j'te cracherais bien mes glaires, salope, t'es là tu fais ta pute comme une taspé en rute, salope, alors va t'faire enculer va bien t'faire enculer, salope.

En l'entendant cracher la suite des paroles, le roux se tourna vers lui en ouvrant de grands yeux surpris. Hugo se contenta de lui répondre par un joli doigt d'honneur avant de partir en direction de la chambre. Il ne vit pas que dans son dos, un sourire carnassier était apparu sur les lèvres de Aaron et que ses iris dorés le fixaient comme une délicieuse proie.

Quand l'étudiant entra dans la pièce, il manqua de tomber sur le sac de frappe qui était posé près de la porte et il jura intérieurement contre le plus vieux qui laissait les affaires traîner n'importe où. Il releva ensuite la tête pour détailler ce qui l'entourait, soit une chambre assez simple avec un lit double, un bureau qui servait aussi de bibliothèque et un dressing. Le seul élément personnel était donc ce sac de frappe et les gants de boxe rouges posés à côté. Ce qui était en soi un peu triste pour le brun qui aurait voulu en savoir un peu plus sur son aîné. Alors qu'il allait vers les étagères du bureau pour observer quelles lectures il pouvait bien avoir, un raclement de gorge attira son attention et il se retourna vers son hôte.

— Tu connais cette chanson ?

— Une de mes amies est fan de Thérapie Taxi, c'est une de ses chansons préférées. J'avoue que moi aussi je l'aime bien... ça te surprend ?

— Je pensais que tu étais un coincé du cul, répondit Aaron avec un sourire narquois.

Le plus jeune gonfla les joues et, simplement pour prouver au roux qu'il avait tort, il commença à se déshabiller. Il sentit bien que les iris miels le fixaient, à la fois totalement médusés et très intéressés. Il s'appliqua à ne pas les croiser pour ne pas se liquéfier aussitôt à cause de la honte. L'ancien barman le laissa continuer son petit manège jusqu'à ce qu'il soit entièrement nu et allongé sur le dos dans le lit.

— T'attends quoi, siffla l'étudiant en voyant qu'il était immobile.

— Je réfléchis... à la manière dont je vais te prendre et avec quoi. Mais je crois que j'ai trouvé. Bouge pas.

— Me parle pas comme ça ! Je suis pas ton chien !

Pour seule réponse, le brun eut le droit au rire de Aaron qui était sorti de la chambre. Il patienta cinq petites minutes avant que ce dernier ne revienne, des cordes de chanvre ainsi qu'un foulard noir dans les mains.

— Où est-ce que tu as trouvé ça ?

— Dans une armoire magique.

— Genre ! Celle de Narnia ?!

— Non, celle de mon salon...

— Tu n'as aucune culture... l'armoire magique qui mène à Narnia, ouhouh, t'as jamais vu Le Monde de Narnia ou quoi, s'indigna Hugo en se redressant, les bras croisés sur le torse.

— Ce... c'est pas le sujet. Rallonge-toi, petit agneau, que je m'occupe de ton cas.

L'étudiant fronça légèrement les sourcils en voyant passer une lueur de tristesse dans les yeux de son aîné mais il préféra ne pas s'attarder et lui obéir. S'il commençait à se soucier de chaque nuance dans l'or des yeux de Aaron, il allait forcément finir par s'attacher à lui plus qu'il ne le devait pour un simple plan cul.

Mais il se fit la promesse de lui faire découvrir Le Monde de Narnia dès qu'il en aurait l'occasion.

Bal VénitienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant