Chapitre XXII

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Respirant à plein poumons pour s'imprégner de l'odeur de cuir, de sueur et de sexe qui régnait tout autour de lui, Aaron entra dans la salle principale du Gardian Club en replaçant le col de sa chemise noire. Son regard se perdit dans la masse d'hommes et de femmes sur la piste de danse avant de remonter vers les deux sièges non loin du bar. L'un d'eux était vide mais l'autre était occupé par Christian qui faisait jouer ses doigts dans les cheveux de son mari. Il s'avança vers eux et salua le dominant d'un hochement de tête en demandant :

— Où est Jean ?

— Dans sa chambre, Aiden a mérité une punition apparemment, répondit-il avec un petit sourire moqueur, pourquoi ?

— Besoin de lui dire qu'il a des idées de merdes. Je le ferai plus tard.

Sans dire un mot de plus, le roux s'éloigna vers le bar. Il s'assit sur un tabouret et demanda un whisky qu'il attendit en fixant le bois luxueux.

Hugo. Hugo l'obsédait tellement. Il ne savait pas ce qu'il devenait, à vrai dire, il n'avait pas essayé de lui envoyer de nouveaux messages pour respecter ses volontés mais c'était une véritable torture. Son verre se posa devant lui et il remercia distraitement le barman avant de le boire cul sec. Pourquoi ? Pourquoi Patrice effrayait-il autant son fils ? Qu'est-ce qu'il avait loupé sur Hugo ? Oh beaucoup de choses... vraiment beaucoup... il le connaissait si peu. C'était de sa faute, il n'avait fait attention à lui que quand il l'avait perdu. Il soupira longuement et redemanda un verre.

— Vous paraissez bien triste, monsieur, constata une voix juste derrière lui.

— Ce ne sont pas tes affaires, répondit l'avocat en avalant son deuxième verre.

Il se tourna pour voir qui était le jeune homme qui lui avait parlé. Il manqua de s'étouffer en rencontrant ses yeux noisettes un peu rieurs. C'était les mêmes que Hugo. Il détailla donc plus longtemps les cheveux châtains foncés et le corps frêle dont le torse était habillé d'un harnais en cuir, se disant qu'avec un peu d'imagination il ferait sûrement l'affaire.

— Tu veux bien monter avec moi ?

— Oui, monsieur, je veux bien.

L'avocat laissa un fin sourire naître sur son visage et prit le poignet du jeune homme pour le tirer à l'étage. Il avait beau ne pas venir régulièrement au club, il y avait sa propre chambre, et c'est donc ici qu'il emmena le sosie de Hugo.

Il lui ordonna de se déshabiller en fermant la porte. Il observa le corps en face de lui. Trop bronzé. Hugo était pâle.

— Monsieur ?

Il releva les yeux vers les siens et un grognement lui échappa quand il remarqua qu'au lieu de devenir verts à la lumière, ils conservaient la même couleur.

— En fait... je crois que tu devrais sortir.

— Quoi ? Mais, monsieur...

— Sors. Ça ne sert à rien que l'on aille plus loin, je n'y arriverai pas.

Oh, il paraissait bien insensible en annonçant cela. Mais dès que le petit soumis eût quitté la pièce avec bon nombre de regards noirs, il se laissa tomber sur le grand lit à baldaquin en attrapant ses cheveux. Des larmes salées coulèrent le long de ses joues.

— Hugo, sanglota-t-il, bordel de merde...

— Hey... Je peux savoir pourquoi un soumis vient de se plaindre de ton comportement ?

— Jean, casse-toi.

—Woah, quel accueil. Pourquoi as-tu fait ça ?

Le roux soupira longuement et se redressa en prenant son téléphone. Il n'eut pas le temps de voir qui lui avait envoyé un message car Jean lui prit des mains en s'asseyant près de lui.

— Ton chéri n'est pas là ?

— Ta gueule. La prochaine fois tu garderas tes idées de merde pour toi.

— Ça n'a pas marché, comprit le châtain.

— On ne se parle plus. Ça fait deux semaines. Pourtant... Pourtant je l'ai embrassé et il a répondu ! Et après il s'est enfui... son père semble l'effrayer mais je ne sais pas pourquoi. Certes, il est homophobe cependant ça nous empêche pas d'être ami !

— Il t'a paru être battu, demanda de but en blanc Jean.

- Quoi ? Je... Non... enfin si. Si au café. Quand son père l'a attrapé par le bras, il semblait le serrer fort et il m'a jeté un regard effrayé. Mais il n'a aucune marque sur le corps alors...

— Alors son père bat peut-être quelqu'un de sa famille et il a peur pour lui. 

Aaron tourna la tête vers son aîné qui avait les poings serrés et la mâchoire contractée. Il savait parfaitement à quel point il détestait ce genre de personne, il en avait lui-même été victime, mais pourquoi lui posait-il toutes ses questions sur Hugo aussi soudainement. Et pourquoi aussi précisément. Il se redressa et remarqua que son meilleur ami avait ouvert le message qu'il avait reçu. Son visage, déjà pâle, le devint encore plus quand il comprit qu'il était sûrement arrivé quelque chose à Hugo. Son cœur se serra. Il devait le protéger à tout prix.

— Il faut que j'aille l'aider.

— Aaron...

— Je sais. Je suis... attaché à ce petit con, avoua-t-il en baissant les yeux, alors je ne peux pas le laisser là-bas. Donne-moi mon téléphone.

Jean ne se fit pas prier et s'exécuta. Le roux prit l'appareil entre ses mains et un hoquet de surprise lui échappa quand il vit de qui venait le message qu'il avait reçu un peu plus tôt.

De : Petit agneau 🐏

30/06/2018, 20h56

Il a tout découvert. Viens m'aider. Je peux compter que sur toi.

— Jean... Dis-moi que ce n'est pas trop tard…

— Continues de lui parler, on va le sauver. Je te le promets.

Bal VénitienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant