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< C'est dans un moment difficile et un mood pourri que j'essaye de vous écrire ce chapitre, tentant de me changer les idées. J'espère que vous aimerez quand même ce chapitre, hésitez pas à voter ou commenter, love. ♡>

Ça faisait déjà une dizaine de minutes que je patientais, dans le silence et angoissé, dans ce fauteuil, face à l'homme qui contemplait mon dossier pour la énième fois. Parce que oui, aujourd'hui, je devais faire face à mon passé, et à mon dossier, puisqu'en effet, c'était aujourd'hui que les services sociaux et d'aide à l'enfance avait voulu me rencontrer, m'analyser, me juger.
Claire m'avait préparé à ce moment, me prévenant qu'ils allaient tenter de me déstabiliser, me pousser à bout. Pourtant, après m'être préparé durant de longues heures, je n'aurais jamais pu penser que ce qui me déstabiliserai le plus serai son silence et son visage fermé, à la relecture de mon dossier.
Puis, sans prévenir, il me coupait dans mes pensées en claquant le dossier contre la table, se redressant dans son fauteuil.

- Alors monsieur, il se penchait sur le dossier pour relire mon nom, d'un air hautain, Samaras. Qu'est ce qui vous intéresse dans la garde de Noah ?

Comment ça qu'est ce qui m'intéresse ? C'est une question piège ça ?
Mes yeux ronds semblaient le rendre fier, alors je réfléchissais à la meilleure réponse possible, essayant de paraître serein, comme me l'avait conseillé Claire, même si j'étais totalement en panique.

- Bah, Noah c'est ma soeur alors..

- Votre demi soeur, me rectifitiait-il, en me coupant, ce qui m'énervait.

- C'est pareil, il n'y a pas de différence pour moi.

Il haussait les sourcils, me défiant du regard, alors que ce vieux croûton semblait tenter de trouver la meilleure attaque possible suite à cela.

- Dans ce cas vous n'y connaissais rien à la loi, monsieur Samaras.

Je soufflais du nez, me canalisant, et tentant de respecter au mieux les paroles de Claire, me demandant de garder mon calme, puisque c'est la seule chose qu'ils attendaient de moi : que je craque.
L'homme rouvrait encore une fois le dossier, à une page bien précise qu'il semblait avoir repéré.

- Il est noté ici que vous avez de nombreuses fois été arrêté en possession de stupéfiants, que vous avez effectué plusieurs gardes à vues, ou aussi que vous voyez encore aujourd'hui un psychologue. Il fermait le dossier, joignait ses mains sous son menton et me fixait d'un regard sévère. N'est ce pas le profil parfait de quelqu'un de déséquilibré mentalement et donc, non apte à la garde d'une enfant d'à peine trois ans ?

Je m'apprêtais à lui répondre, mais m'abstenais. J'aurais aimé le contredire dans un long discours, une éloge de moi-même, tentant de le convaincre que je ne suis plus cet adolescent en garde à vue, et non plus cet homme, voyant un psychologue à la mort de mon père, enfermé dans mon appartement des semaines entières et défoncé. Pourtant, je ne pouvais pas m'empêcher de penser : Et s'il avait raison ? Et si je n'avais pas tant changé que ça, et si finalement, je n'étais pas apte à prendre soin de Noah ? Peut être que je me voilais la face, que je me forçais à croire que j'ai changé, grandit, alors que non, ce n'était qu'une passade.
Le silence régnant dans la pièce semblait le satisfaire, tout comme mon attitude soumise face à ses idées. Mais alors que je pensais qu'il avait finit de me démonter et que je pourrais enfin partir, il se raclait une nouvelle fois la gorge, signe qu'il allait réellement m'acheter.

- Rappelez-moi votre profession, monsieur Samaras ?

Je relevais directement les yeux vers lui, alors que mes doigts continuaient de s'emmêler sous l'angoisse.
Il savait ce que je faisais, il savait que j'étais rappeur. Pourtant il voulait me l'entendre dire, par simple envie de me montrer que je n'étais réellement pas en capacité d'avoir une once d'espoir pour Noah.

- Je suis artiste, dans la musique.

Il pouffait doucement, se moquant de moi, alors que ma réponse ne semblait pas le satisfaire.

- Mais encore ?

Jusqu'à maintenant, la déception et la faiblesse face au découragement qu'il m'imposait étaient les seuls sentiments éprouvés. Pourtant, c'est à cet instant que la colère s'était réveillée, et que j'avais osé le regarder de mon regard le plus noir, avant de lui répondre sèchement que j'étais rappeur.
Après ces quelques mots, il replongeait dans son dossier avant de me demander, sans même lever les yeux de ses feuilles, de quitter la pièce, prétendant qu'il en avait vu et entendu assez pour composer son avis sur mes capacités.
Je me levais, presque machinalement et suivant bêtement ses ordres. Pourtant c'est quand je posais ma main sur la porte et que je m'apprêtais à quitter définitivement la pièce que je me rendais compte que je n'avais absolument pas joué toutes mes cartes. Je ne pouvais abandonner maintenant. Il ne m'avait pas laissé parler, il ne m'avait pas laissé me racheter face à mon dossier, ou encore lui montrer que j'étais réellement prêt à tout pour Noah.
Je m'arrêtais dans mon élan et me retournait d'un demi tour, ne voulant pas le regarder.

- En fait non, j'en ai rien à foutre de ce que j'ai pu faire il y a dix ans, ou de ce que je peux encore faire aujourd'hui. Il relève la tête vers moi, étonné que je contredise enfin ses paroles. Pour moi, le plus important c'est ce que je fais maintenant, ce que je fais pour Noah et avec Noah, le reste vous avez pas besoin de le savoir. J'ai acheté un appartement, j'ai ralenti sur mon taff, sur la clope, je vais la voir le plus souvent possible, et j'essaye de lui faire oublier qu'on a tout les deux des vies détruites. Ma voix se baisse et ne devient qu'un murmure. J'essaye de lui donner tout mon amour et toute mon âme, même s'il ne m'en reste plus beaucoup. Je passe pour un canard au près de mes potes, je suis crevé en rentrant du centre après une heure de trajet en métro, je me torture pour essayer de me dire que c'est pas une bonne idée, que je dois pas faire ça pour elle et que je suis mauvais. Je reprend mon souffle après ce long monologue, et mes bras qui s'étaient légèrement levés le temps de mes paroles, retombent. Et vous savez pourquoi ? Parce que Noah, maintenant, c'est ma seule source de renouveau, ma seule bouffée d'oxygène dans cet océan impure de ses habitants, dans ce monde où l'abandon est plus répandue que l'amour. Noah c'est ma soeur, vous aurez beau dire n'importe quoi, tout ça, toute cette histoire, c'est plus qu'une histoire de loi. Je suis sûrement pas le mec le plus clean de la planète, ou le plus organisé et prévoyant. Mais je peux vous assurez que personne ne pourrai être plus motivé et meilleur pour Noah que moi. Je lui donnerai ma vie s'il le fallait.

Désormais et après ces longs mots, l'homme affichait un léger sourire alors qu'il tenait encore son stylo entre ses lèvres.
J'estimais alors que j'avais maintenant donné toutes mes cartes, et que je ne pouvais plus rien faire à part attendre. Je le remerciais brièvement d'un signe de tête et sortais enfin de cette pièce.

NOAHOù les histoires vivent. Découvrez maintenant