Chapitre 2

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Le château de Karasuno est indéniablement la place-forte du royaume. Tout semble y converger : par les larges portes de bois, toujours ouvertes, passe constamment une foule particulièrement dense, habitants du château et marchands ambulants se mêlant aux gardes et aux domestiques. Les marchandises entrent à flot, viandes et poissons, légumes et fruits exotiques, tissus précieux et armes en vrac.

L'édifice en lui-même est massif, construit en pierre clair. Ses murs sont assez bas, mais très épais ; sur les angles, et dominant les bâtiments intérieurs, se dressent des tours carrées et crénelées. Plusieurs divisions régissent l'espace : d'abord les espaces publics, comme les places réservées pour le marché, la promenade, ou les salles d'audiences ; ensuite les lieux destinés aux habitants du château, les chambres des courtisans et des serviteurs, ainsi que les lieux de production comme la forge ou la boulangerie.

Le roi, Sawamura, occupe avec sa famille des appartements privés, les plus luxueux du château, situés dans une tour surplombant l'aile ouest. Enfin, l'armée dispose d'une partie du château comprenant les chambres, les salles d'armement et d'équipement, ainsi que la cour d'entraînement.

Dans les quelques bâtiments épars qui bordent cette cour, on trouve notamment une écurie et une infirmerie. Si l'écurie sert tous les jours, sollicitée tant par les cavaliers en exercice que par les patrouilles et les messagers en mission, l'infirmerie est déserte pour la plupart du temps, et ne sert guère que lors d'accidents de combats amicaux.

Ce jour-là du début de printemps, pourtant, elle reçoit un patient tout particulier. Après un branle-bas de combat de plus d'une heure où se sont succédé les guérisseurs soucieux et les infirmières nerveuses, le calme est enfin revenu ; seuls quelques curieux pointent leur nez à l'entrée de la salle, sans oser rentrer toutefois. Seules deux personnes y demeurent ; l'une est une petite infirmière aux cheveux blonds et courts, l'air vive et fraîche, bien que ses traits soient encore affectés par l'angoisse de tout à l'heure. Le second et un jeune homme de petite taille aux cheveux roux flamboyants, vêtu d'une armure en cuir, les bras croisés sur la poitrine ; l'inquiétude dans ses yeux noisette n'éclipse pas leur éclat habituel.

-Hinata, il va s'en sortir, n'est-ce pas ? murmure l'infirmière en joignant ses mains.

-C'est à toi de me le dire, Yachi, répond le chevalier. C'est toi l'infirmière, non ?

L'objet de leur contemplation est le même que celui qui a bouleversé le quotidien du château plus tôt dans la journée. Hinata est parti en balade dans la forêt avoisinante, balade qui avait pour but subsidiaire de trouver le moyen de devenir un héros en chassant une bête énorme ou en tuant un ennemi embusqué, bien que Karasuno n'ait aucun ennemi ; il a entendu un bruit suspect dans un fourré proche, et pensant avoir trouvé l'occasion de s'illustrer et d'enfin se couvrir de gloire, s'y est précipité seulement pour trouver un jeune homme vêtu de noir et singulièrement mal en point.

Le chevalier avait tout de même examiné cette curieuse rencontre avant de la ramener au château. Ils devaient être du même âge, avait-il estimé, et cet homme n'avait pas l'air hostile –en l'occurrence, il était désarmé et sans connaissance. Hinata s'était décidé à l'emmener après avoir remarqué la blessure qui lui ouvrait le flanc gauche ; il l'avait hissé sur son cheval après quelques efforts, et foncé à bride abattue vers ce qui était son foyer depuis qu'il était entré dans l'armée -le château de Karasuno.

-Le guérisseur en chef, Takeda, a dit que ça irait, renifle Yachi. Il n'y a plus qu'à attendre.

-Alors ça ira, la réconforte Hinata. Il ne dirait pas ça si ce n'était pas vrai.

Memento Amari - IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant