Chapitre 18

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Iwaizumi est toujours dans sa petite cellule, et n'a pas vu de visage humain autre que celui de Kageyama. Le premier soir, il a dormi sans couverture, à même le sol, grelottant sous la brise nocturne qui entrait dans sa prison en sifflant à travers les barreaux ; mais le lendemain, il a reçu une couverture par la trappe, suivi d'un petit bol de soupe et un quignon de pain.

Il s'est inquiété que Kageyama ne veuille plus le voir, après la fin abrupte de leur dernière conversation, qui laisse entendre que Tobio a du ressentiment envers Oikawa et lui. Toute la journée et la matinée suivante, Iwaizumi a pu élaborer mentalement plusieurs explications sur cette réaction, la plupart fondées sur des quiproquos, d'autres, plus sombres, sur une rupture qui ne pourra peut-être plus se combler.

Le troisième jour, en début d'après-midi, la porte s'est finalement de nouveau ouverte pour laisser entrer Tobio. Il dépose une pomme et une assiette de riz sur le sol à côté du chevalier et s'assied face à lui sans rien dire ; Iwaizumi mange lentement, tâchant de déguster les aliments. Il relève ensuite les yeux sur Kageyama, et un doute le saisit :

-Cette nourriture... m'est-elle réellement destinée ? Karasuno serait bien généreux de m'en faire parvenir en état de siège.

-Oui, répond Tobio du bout des lèvres.

Son expression bornée ne convainc pas Iwaizumi :

-Ce n'est pas la tienne, n'est-ce pas ? Ce serait stupide de ta part de te priver pour un prisonnier, Kageyama.

Tobio ne répond pas et préfère poser son regard ailleurs que sur le chevalier, feignant la distraction ; Iwaizumi soupire en y trouvant l'aveu qu'il redoute.

-Tu auras besoin de toutes tes forces pour sortir d'ici, dit-il doucement.

-Pourquoi voudrais-je sortir d'ici ? répond Tobio en fronçant le nez.

-Vous n'allez pas rester éternellement enfermés. Daichi est déterminé, mais trop fier ou trop sage pour laisser son peuple mourir de faim.

Kageyama reste pensif un instant, puis acquiesce avant de changer de sujet :

-Je vais refaire votre bandage.

La plaie n'a pas tellement saigné depuis, le pansement est à peine souillé ; la douleur s'est vaguement atténuée au fur et à mesure des jours, même si son épaule reste douloureuse et qu'Iwaizumi la ménage le plus possible –ce qui, dans son état de prisonnier, n'est pas difficile. Tobio recommence, comme la première fois, à nettoyer et désinfecter la plaie avant de remettre un pansement propre.

Tout le temps que durent les soins, Iwaizumi hésite à lui reparler, de la guerre, d'Oikawa, de ce qui s'est passé, des raisons qui ont mené jusqu'ici. Tobio doit savoir que le roi d'Aoba était désormais soumis à une malédiction, peut-être a-t-il fait le rapprochement lui-même avec ce jour où Tendou a lancé ses imprécations devant eux ? Il finit par choisir de se taire pour laisser le contact se renouer paisiblement, craignant que forcer les choses éloigne Tobio pour de bon.

Lorsque l'archer repart, Iwaizumi est du moins rassuré sur une chose ; celle que sa colère ou sa rancune ne semblent rien n'avoir d'irrémédiable. En effet, pourquoi a-t-il sauvé le chevalier, et pourquoi le soigne-t-il et prend-il soin de lui s'il lui attribue le blâme de son départ ? D'un autre côté, cela signifie-t-il que tout retombe sur Oikawa ?

Tobio revient le cinquième jour avec encore un peu de nourriture et de nouveaux bandages, mais reste un peu plus longtemps, debout à la fenêtre, profitant d'une vue plongeante pour observer le camp d'Aoba. Iwaizumi ne peut s'empêcher de remarquer sa posture tellement semblable à celle d'Oikawa lorsqu'il se trouve dans son bureau, toujours songeur à regarder au-dehors... C'était ainsi qu'il était, songe le chevalier en frissonnant, lorsqu'il avait regardé Kageyama partir.

Memento Amari - IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant