Chapitre 12

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Quand Iwaizumi voit rentrer le cortège du roi, de retour d'Inarizaki, impatience et crainte se disputent son cœur. D'un côté, il a hâte d'annoncer à Oikawa que Tobio est vivant, qu'il va bien, qu'il est dans le royaume voisin et que tout va s'arranger ; de l'autre, il redoute les conséquences de ce séjour chez Atsumu, et se demande se que le mage a bien pu prétexter pour l'appâter là-bas.

Debout à une fenêtre de la tour royale, il scrute attentivement les hommes qui entrent, l'escorte royale, composée de quelques soldats accompagnés de serviteurs. Oikawa descend seul du carrosse, et le chevalier devine que Tendou n'y est plus... Resté pour toujours à Inarizaki, suppose-t-il. Il se compose un visage aussi neutre que possible en attendant qu'Oikawa le rejoigne. Ils sont rarement séparés aussi longtemps ; même si Iwaizumi a parfois voyagé pour représenter son roi dans diverses cérémonies, la dernière date du mariage de Sawamura, quatre ans plus tôt.

Ses pensées le ramènent aussitôt à Sugawara, à la gentillesse et la simplicité du consort. Il n'est reparti que quelques jours plus tôt, n'est sans doute pas encore rentré au château –quel dommage qu'Oikawa l'ait raté, pour pouvoir entendre de sa bouche toutes les nouvelles de Tobio. Iwaizumi peut parfaitement se le figurer, accroché à chaque parole qu'aurait énoncée le consort, l'interrogeant sur les moindres détails, avide d'informations après ces longs mois de silence. Un sourire léger vient jouer sur ses lèvres, mais alors la porte s'ouvre pour révéler Oikawa, et l'expression sombre du monarque vient tout de suite le ternir.

-Comment s'est passé ton voyage ? demande le chevalier, voyant que le roi entre et s'assied sans un mot.

-C'était très instructif, répond Oikawa d'un air absent. Je ne sais pas par où commencer.

-Moi non plus, avoue Iwaizumi à mi-voix.

Le roi ne semble pas l'écouter.

-Atsumu m'a parlé d'un moyen de résorber la malédiction. C'est, de fait, extrêmement simple : il suffit de me bénir. Même s'il demeure un peu de la magie de Tendou, cela pourrait tout de même m'ôter un poids des épaules. Le peuple serait rassuré de me voir retrouver mon apparence d'antan, non ?

-Certainement, répond prudemment Iwaizumi. Et que demande-t-il en échange ?

-Une alliance.

-Une alliance ?

-Lui, moi, Inarizaki et Aoba, explicite Oikawa sans le regarder.

Iwaizumi plisse les yeux. Il sait bien qu'Oikawa ne dit pas tout, ses yeux baissés et ses doigts nerveux le trahissent amplement ; et quelque chose lui souffle à l'oreille que cette fameuse alliance n'a rien d'un simple traité commercial ou pacifique...

-Et en quoi consiste-t-elle ? demande-t-il.

-A... rassembler nos deux armées.

-Les armées ? C'est une guerre que tu prépares ?

Sa voix lui paraît lourde, et l'insistance à laquelle le force Oikawa ne fait que renforcer la tension qui pèse sur la pièce. Le cœur d'Iwaizumi, paradoxalement, semble battre plus lentement, et il distingue chacun de ses coups tant le silence est profond.

-Oui, avoue Oikawa.

Le chevalier se lève, essayant de se débarrasser de la pesanteur de ce dialogue interminable par une mise en mouvement. Le roi s'est de nouveau tu.

-Et contre qui ? interroge Iwaizumi, ne cachant pas l'agacement dans sa voix.

-Karasuno, répond Oikawa d'une voix à peine audible, puis, sentant le besoin de se défendre : écoute, Iwa, c'est vraiment la meilleure solution. Nous l'avions déjà prévu avec Shiratorizawa, mais cette fois-ci cela va se réaliser pour de bon, avec en plus l'appui du prince-mage. Nous prendrons en tenaille leur royaume, nous par le Nord, eux par le Sud, dans une attaque-éclair pour fondre sur le château et soumettre Sawamura. Une fois cela fait, Karasuno deviendra une province d'Aoba, et nous pourrons ainsi regagner tout ce qui nous fait défaut –des hommes et des denrées. Atsumu, de son côté, va simplement s'assurer que son frère –qui est sous la protection de Karasuno- n'est pas une menace pour lui.

Memento Amari - IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant