CHAPITRE 4

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ALINE ADAMS

   Cela doit faire une vingtaine de minutes que je suis dans la voiture d'Helen. Elle m'a proposé d'aller faire des courses avec elle et sa fille. Comme souvent, je suis assez stressée car je n'ai jamais fait les magasins : papa ne m'y emmenait jamais, c'est lui qui m'achetait toujours mes vêtements.

- Et toi, Aline ? Tu as une idée de ce que tu voudrais acheter ? me demande gentiment Helen en se tournant vers moi, me sortant de mes réflexions.

Je ne réponds pas et secoue négativement la tête.

- Tu vas voir, ça va être super, ajoute la jeune fille blonde à côté de moi, un grand sourire aux lèvres.

Je ne les connais pas encore, mais elles sont très gentilles avec moi toutes les deux.

   Pendant qu'elle conduit, je ne peux m'empêcher d'observer Helen, au volant : c'est une belle femme brune aux grands yeux sombres, très charismatique, mais quelque chose en elle m'intrigue et m'intimide à la fois ; elle est mère de deux grands enfants, mais me parait pourtant très jeune : elle n'a pas l'air d'avoir plus de quarante ans.

   Quant à Ashley – il me semble que c'est son nom –, c'est vraiment une très jolie fille, bien qu'elle ne ressemble absolument pas au reste de sa famille : blonde aux grands yeux bleus, sa peau de pêche et ses joues roses complètent à merveille son visage d'ange. En plus d'être très douce, sa grâce et sa fragilité lui donnent une allure de poupée en porcelaine.
   Je ne connais pas son âge, mais estime qu'elle doit avoir aux alentours d'une quinzaine d'années, comme moi.

Après un moment de route, Helen coupe le contact d'un geste sec et se tourne vers nous deux, à l'arrière :

- On est arrivées ! s'exclame-t-elle en souriant.

Ashley sort de la voiture en sautillant, joyeuse, tandis que je descends silencieusement du véhicule, mon casque audio vissé sur la tête et ma musique dans les oreilles.

   Helen attrape son sac à main, jusque-là sagement posé sur le siège avant à côté d'elle, et nous laissons la voiture sur le parking pour entrer dans l'immense centre commercial qui se dresse devant nous, nous dominant de toute sa hauteur.

   Une fois dans le bâtiment, je cache soigneusement mon visage derrière mes cheveux et augmente le son de ma musique, encore plus stressée.
   Je n'aime pas les endroits où il y a du monde, ça me stresse plus qu'autre chose. Je ne suis pas à l'aise. Même si c'est sûrement faux, j'ai la désagréable et étouffante impression que tout le monde me regarde et me juge. Comme si n'importe qui peux se faire un avis sur moi, sur ce que je suis, par le simple fait de poser les yeux sur moi.

   Angoissée, je tapote mes ongles contre ma cuisse pour me calmer, et lève les yeux vers le ciel pour ne plus regarder le monde qui tourne autour de moi : l'immense centre commercial est surmonté d'une énorme coupole de verre, qui englobe tout le dernier étage du bâtiment.
   La glace bleutée est si transparente et si claire que l'on peut presque apercevoir les pas feutrés des gens qui s'agitent et s'affairent juste au-dessus de nous, allant de magasin en magasin.

Le rendu est très joli, mais pourquoi utiliser tant de verre pour une question esthétique ? Je pense qu'avec toute cette glace, il y aurait de quoi faire les fenêtres de dizaines, voire de centaines de maisons...

- Alors, on commence par quoi les filles ? demande Helen, me sortant une fois de plus de mes pensées égarées.

- Les affaires pour le lycée, répond Ashley. Comme ça on pourra se concentrer sur les vêtements après.

- Bonne idée, ça te va Aline ?

J'acquiesce d'un léger mouvement de tête, toujours sans rien dire, et me contente de suivre la mère et la fille à travers les allées bondées du centre commercial.

(Sur)vivanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant