ALINE ADAMS
Je referme mon ordinateur portable et le confie au premier tiroir de mon bureau, où j'ai l'habitude de le ranger depuis maintenant une semaine. Tout comme mon roman, les vacances d'Halloween sont déjà bien avancées, et ma relation avec Alexandre s'est largement concrétisée grâce à ce projet auquel nous nous adonnons chaque jour sans exception.
Vers trois ou quatre heures de l'après-midi, nous nous retrouvons tantôt dans ma chambre tantôt dans la sienne et passons de longues heures à écrire, serrés l'un contre l'autre. Ces contacts m'apportent beaucoup de bonheur et m'exaltent tout entière, me donnant l'impression que chaque journée est un pas de plus vers la résilience la plus totale : je me sens de mieux en mieux ici, entourée de cette famille que j'ai eu du mal à accepter au début mais qui est la mienne désormais.
Le sentiment d'être en sécurité avec les Lewis se renforce de jour en jour, et je suis heureuse de me dire que je me sens suffisamment à ma place avec eux pour me permettre de l'investir vraiment.
Plus question d'être passive désormais ; en acceptant d'être simple spectatrice du déroulement de ma vie jusqu'à maintenant – et ce même depuis que je ne suis plus avec papa –, je suis passée si près de ne pas m'inscrire à ce concours... d'être privée de ces moments privilégiés avec Alexandre – bien qu'ils soient loin d'être le seul ciment de ma relation avec lui, ils ont largement contribué à son développement.
Rien qu'à penser à lui, mes lèvres forment un large sourire et mes joues clignotent dangereusement : il a été si patient avec moi, et si présent que je me sens redevable vis-à-vis de lui.
Je suis fière de lui avoir dit que je l'aimais, et d'être officiellement sa petite-amie. Ce cap est passé, et le bénéfice du doute à propos de mes sentiments pour lui n'est plus possible maintenant que ce statut concret nous lie.
J'ai aussi pu profiter des vacances pour retrouver Mary-Lynn, mon ancienne surveillante au foyer et amie désormais, à qui je parle souvent de notre projet d'écriture.
Elle se porte toujours aussi bien, et nous essayons de nous voir autant que possible pour rattraper le temps perdu toutes les deux ; en effet, nous ne nous sommes pas vues depuis que j'ai quitté l'hôpital, et nous avons beaucoup de choses à nous dire – et entre autre discuter de notre livre à Alexandre et moi, pour lequel elle manifeste un intérêt qui me fait vraiment plaisir.- On descend ? murmure une voix douce à mon oreille, tandis que deux mains masculines pressent légèrement mes épaules.
- Oui, je réponds dans un souffle en suivant Alex hors de ma chambre.
Dès que nous arrivons au salon, Helen, tout juste rentrée du travail, vient aussitôt à notre rencontre. Elle est vêtue d'un large manteau polaire, beige à épaules carrées, et sa chevelure noire ondulée est soulevée par les bourrasques glacées du mois d'octobre.
- Ça avance, votre livre ? demande-t-elle en nous prenant dans ses bras l'un après l'autre.
L'air frais sur ses joues rosies par le froid me fait tressaillir, et un long frisson parcourt mon échine.
- Oui... je pense qu'on en est au moins à la moitié, répond Alexandre en s'affalant sur le canapé. Et toi, ton travail ? Ça se passe bien ?
Elle acquiesce, en souriant, et je me dépêche d'aller fermer la porte qu'Helen avait laissée entrebâillée.
- Au fait, Molly m'a appelée sur le chemin du retour, en voiture, elle ajoute en retirant son manteau.
- Qu'est-ce qu'elle a dit ? je demande le cœur battant.
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(Sur)vivante
Teen FictionPendant toutes ces années d'enfer, elle était résignée à mourir, mais à présent la vie n'attend plus qu'elle. À quinze ans, Aline est une jeune fille calme et effacée, qui ouvre chaque matin ses yeux clairs sur un désert de solitude. Depuis s...