ALINE ADAMS
Une fois habillée, je m'oblige à prendre un léger petit-déjeuner, attrape mon sac de cours et file dans la voiture d'Alexandre, précédée d'Ashley.
- Ça va les filles ? nous demande-t-il après avoir démarré le véhicule, sans jamais quitter la route des yeux.
Évidemment, la jolie blonde lui répond par l'affirmative, un grand sourire aux lèvres.
Alexandre se tourne vers moi, et réitère sa question en me regardant droit dans les yeux, le noir dans le bleu.- Et toi, Aline ?
Je ne réponds pas, et me contente d'hocher lentement la tête dans le plus grand silence.
Le jeune homme se tourne alors vers sa sœur, et tous les deux se mettent à bavarder gaiement tandis que je m'enfonce un peu plus dans mon siège, une fois de plus totalement effacée.
Depuis que j'ai chassé Alexandre de ma chambre, il n'a pas changé de comportement avec moi : la plupart du temps il se contente de m'ignorer, mais dès qu'il est amené à s'adresser à moi, il reste toujours gentil mais très réservé, comme si nous ne sommes des étrangers l'un pour l'autre. Quant à moi, je suis encore plus intimidée qu'avant face à lui, même si je m'efforce toujours de ne pas le montrer.*Ellipse*
Une fois dans la cour du lycée, je sors mon roman de mon sac et m'assois sur un banc : le coin de la cour où je m'installe habituellement a été inondé par les dernières pluies, déjà très fréquentes pour un début de mois de septembre ; à cause du sol humide, je ne peux plus m'y asseoir.
- Tiens, voilà l'intello ! lance Enola en s'approchant de moi à grands pas, sa voix insupportable emplissant ma tête tel un écho.
Enola est la fille la plus populaire de la classe. C'est elle qui s'amuse à m'embêter depuis la rentrée avec Enzo, Lorena, Sam et Melia, sa bande d'amis.
Si cette fille aussi ridicule que peu crédible avait été seule à s'acharner sur moi depuis le début, je pourrais faire abstraction de sa méchanceté gratuite sans grandes difficultés... toutes mes rentrées précédentes étant similaires, ça n'aurait été qu'une personne mauvaise et immature parmi tant d'autres.
Mais multipliée par cinq avec la haine de chacun de ses amis, ma patience commence à sérieusement s'amenuiser, et je sens l'ultime limite de mon seuil de tolérance approcher dangereusement...- Alors, on dit toujours rien ? ricane Sam en m'arrachant mon livre des mains, mon précieux roman pendu à sa main noueuse tel un vulgaire chiffon.
- Comme toujours quoi, s'empresse d'ajouter Enzo d'une voix faussement assurée.
- Rends-moi mon livre Sam, je demande calmement en me levant pour lui reprendre mon roman, qu'il commence à déchirer sous mes yeux.
- Oh, t'as une voix toi ? raille la meneuse de la bande. (Elle ricane et se tourne vers les deux autres filles, qui ricanent bêtement à ses côtés.) Vous deux occupez-vous d'elle, ordonne Enola, son sourire moqueur laissant place à une expression d'un sérieux inquiétant.
Aussitôt, Melia et Lorena fondent sur moi, chacune me saisissant un bras et le tirant brutalement de son côté.
Choquée, je me débats difficilement et sans grand succès, abasourdie... c'est la première fois qu'elles m'agressent physiquement, et je n'arrive pas à comprendre si leur but est simplement de me pousser à bout, ou si elles cherchent plutôt à me démembrer tant elles me tirent fort.- Lâchez moi ! je hurle.
Pourtant, personne ne vient m'aider malgré mes cris, me laissant à la merci de ses deux furies, qui commencent à donner des coups de pieds réguliers dans mes jambes, tout en griffant mon visage à coups d'ongles laqués.
Elles sont déchaînées, et chaque coup qu'elles me portent me poussent un peu plus dans les abysses gluantes et cauchemardesques de mes souvenirs...
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(Sur)vivante
Teen FictionPendant toutes ces années d'enfer, elle était résignée à mourir, mais à présent la vie n'attend plus qu'elle. À quinze ans, Aline est une jeune fille calme et effacée, qui ouvre chaque matin ses yeux clairs sur un désert de solitude. Depuis s...