ALINE ADAMS
Je viens de monter dans la voiture d'Alexandre.
Helen et Nolan m'ont appelée cet après-midi pour me dire qu'il allait passer me chercher ; il est arrivé très rapidement à l'hôpital, vers dix-huit heures trente.À l'instant même où il est entré dans ma chambre, j'ai bien vu qu'il était malheureux : ses yeux étaient humides, et si rouges que les nerfs de ses globes oculaires semblaient prêts à s'arracher. Il avait l'air triste, et semblait prêt à éclater en sanglots à tout moment.
Ayant trouvé plus judicieux de ne pas le lancer sur le sujet, j'ai juste pris le temps de dire au revoir à monsieur Miller ainsi qu'aux infirmiers qui se sont occupés de moi avant de le suivre à travers les couloirs du bâtiment, pour regagner la voiture garée sur le parking.- Écoute... j'ai un truc à te dire, me dit Alexandre, m'arrachant à mes réflexions.
- Je t'écoute.
- ...
- Tu peux tout me dire, tu sais... j'essaye maladroitement de l'encourager.
Je lui pose une main sur l'épaule. C'est un des premiers contacts physiques que j'ai avec lui, et je reconnais qu'il me demande un effort. Mais il a l'air si éteint... je ne peux pas m'en empêcher.
Comme si mon geste l'avait réveillé, il me regarde d'un air aussi troublé qu'interrogateur, comme si, dans mes yeux, il cherche à lire une réponse à un doute. Je comprends tout de suite qu'il hésite à me parler.
Il finit par prendre un virage et se garer dans l'allée d'un parc, avant de retirer la clef de contact de la voiture.
Il se retourne alors vers moi, les yeux remplis de larmes.- Ma tante est morte, il lâche d'une seule traite.
Sans pouvoir m'en empêcher, je détache aussitôt ma ceinture de sécurité et le regarde avec de grands yeux écarquillés, étonnée. Ses yeux sont emplis d'une profonde détresse, qui me fend le cœur.
Confusément et un peu timidement, je le prends dans mes bras et le serre contre moi... ça, en revanche, je le fais spontanément, sans réfléchir.C'est la première fois que je fais ce genre de choses... mais dès que j'ai vu le regard perdu d'Alexandre, j'ai eu l'impression de revenir des années en arrière, au moment où j'ai perdu ma mère... ça m'a fait l'effet de me replonger dans ce chagrin.
- Oh... je suis désolée... je murmure.
- C'est pas ta faute, il répond tout doucement, la voix cassée. Mais... je peux te demander de me rendre un petit service ?
- Bien sûr, dis-moi.
- L'enterrement est après-demain, et... je me demandais si tu voulais bien venir avec nous.
- Oui, bien sûr, dis-je en le serrant plus fort contre moi. Ne t'inquiète pas, je serai là.
- Merci...
Je ne réponds pas et nous restons un moment comme ça, serrés l'un contre l'autre, sans se parler, sans rien se dire. C'est un moment de silence, de repos.
Je sens qu'il a besoin de moi, de ma présence, et je suis là pour lui. Je fais de mon mieux pour le consoler.Au bout d'un long moment de silence, on se sépare doucement et Alexandre redémarre la voiture.
Il emprunte le chemin qui mène à la maison, et, une fois garés dans la rue, je descends de voiture et entre directement dans la cour, dont le portail extérieur est ouvert.
Quand Helen me voit à travers la baie vitrée de la véranda, elle accourt vers moi et me prend légèrement dans ses bras, faisant attention à me laisser un peu d'espace.
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(Sur)vivante
Teen FictionPendant toutes ces années d'enfer, elle était résignée à mourir, mais à présent la vie n'attend plus qu'elle. À quinze ans, Aline est une jeune fille calme et effacée, qui ouvre chaque matin ses yeux clairs sur un désert de solitude. Depuis s...