ALINE ADAMS
Suivie d'Alexandre, Molly et Mary-Ann, je sors d'un commissariat de police pour la deuxième fois de la journée. Comme ce matin, Ashley nous attends sagement dans la voiture, accompagnée d'Helen.
Nous avons décidé qu'il valait mieux ne pas entrer tous ensemble dans le poste de police : il était inutile d'y être à six, et de toute manière il était préférable de ne pas être trop nombreux pour que Molly ne se sente pas trop étouffée.
Ainsi, nous avons accompagné la jeune fille en nombre limité : évidemment, Mary-Ann était présente en tant que sa mère et sa responsable légale, ainsi que moi et Alexandre, car Molly avait plus besoin de notre soutien à tous les deux en particulier ; Alex est son cousin le plus proche, et elle et moi avons été victimes de la même personne, ce qui fait qu'elle a en moi une confiance particulière – même si, dans mon cas, j'ai eu beaucoup de chance que Nolan se contente de menaces.
- Comment tu te sens ? je lui demande en posant une main sur son épaule.
- Pas très bien... dit-elle dans un souffle en portant une main à sa frêle poitrine, comme si elle arrivait à parler au prix d'un effort surhumain. Ç'a été plus dur que ce que je pensais...
Je souris, compatissante : j'ai l'impression de me voir quelques heures plus tôt.
- C'est normal, ne t'inquiète pas... j'ai ressenti exactement la même chose.
- Vraiment ?
- Oui, je t'assure. On y est allés ce matin, et je devais avoir la même mine que toi quand on a quitté le commissariat.
Je lève les yeux vers Alexandre et, comme pour confirmer ce que je viens de dire, il sourit et adresse un regard appuyé à Molly :
- Je crois qu'elle était encore plus mal en point que toi, ironise-t-il gentiment avant de la serrer légèrement contre lui. Mais plus sérieusement, ne t'en fais pas... ça ira mieux dans les prochains jours. Surtout quand tu seras partie, ajoute-t-il en lui ouvrant la portière de la voiture, dans laquelle elle s'engouffre aussitôt. Ça t'aidera à tourner la page.
Elle acquiesce.
- J'espère que la Californie m'aidera à aller de l'avant, dit-elle en bouclant sa ceinture, installée entre nous deux. De toute façon, j'ai l'impression que je n'irai mieux que quand je reverrai papa... nous nous sommes appelés tous les soirs depuis que j'ai pris ma décision, et j'ai compté chaque jour qui séparaient nos retrouvailles.
Elle sourit largement, tandis que Mary-Ann se tortille nerveusement dans son siège avant de se tourner instantanément vers la fenêtre : chaque fois que Molly mentionne son père, elle a l'air très mal à l'aise.
- Mais... tu reviendras nous voir, moi et Lawra, hein ? demande-t-elle soudainement en se tournant vers sa fille, les yeux empreints d'inquiétude.
On aurait dit qu'un éclair de lucidité vient de la frapper, avec pour effet de lui faire réaliser que le départ de Molly est concret et imminent.
L'intéressée baisse la tête vers ses pieds, comme pour éviter de croiser le regard de sa mère. Molly reste silencieuse pendant un moment, mais, à la plus grande surprise d'Alexandre, elle finit par répondre d'une voix très calme, presque indifférente :
- Oui, peut-être... mais si je reviens, ce sera surtout pour revoir Helen, Alex, Aline et Ashley. (Elle marque une petite pause, avant de relever la tête vers nous.) Et aussi sûrement pour... le procès, s'il y en a un bien sûr.
Dès qu'elle finit de parler, Alexandre se tourne presque aussitôt vers moi, visiblement étonné : il s'attendait sûrement à une réaction plus froide, coléreuse de Molly à l'égard de sa mère, qui, après tout ce qu'elle lui a fait subir, lui demande avec tout le culot du monde si elle reviendra la voir – du moins, je suppose qu'il a dû prendre ainsi la question de sa tante.
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(Sur)vivante
Ficção AdolescentePendant toutes ces années d'enfer, elle était résignée à mourir, mais à présent la vie n'attend plus qu'elle. À quinze ans, Aline est une jeune fille calme et effacée, qui ouvre chaque matin ses yeux clairs sur un désert de solitude. Depuis s...