Le monde désolé

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Regina et Marilyn avaient passé leur temps à se dévisager avec mépris.

C'était pour elle une façon d'éviter de regarder autour, de devoir faire face à un monde détruit, anéanti, dévasté.

Hélèna, elle, regardait les choses en face. De toutes façons, qu'avait-elle de plus à perdre qui ne soit pas déjà peine perdue ?

- Vous devriez vous concentrer pour chercher la porte.

Marilyn fut un petit son hautain qui s'accordait parfaitement avec son air de "miss-je-sais-tout" et de "je-suis-la-meilleure" combiné.

- On n'en serait pas là si le génie et sa copine nous avaient prévenu de ce petit... Détail.

- Hé ! C'est de mes amis dont tu parles ! Et de ta sœur, qui plus est !

- Arrêtez de vous chamailler pour des broutilles. On doit trouver le moyen de partir. On discutera du reste après.

- Des broutilles ?! Dis tout de suite qu'on aurait simplement pu jeter un coup d'œil par la porte, comme l'avait fait la verte avec le monde inverse !

Hélèna avait juste envie de lui mettre un poing dans la figure, de déverser toute sa haine, toute sa rage sur elle, mais elle se retenait du mieux qu'elle pouvait. C'était presque un effort surhumain.

- Le monde inverse, cela s'est senti à l'air. De là où nous sommes arrivées, rien n'indiquait que nous n'étions pas dans une partie du monde où Harold se trouve.., interrompit Regina d'une voix faible mais vexée.

- Peuh. C'était évident.

- Ah oui ? Et bien tu aurais pu nous le dire avant dans ce cas !

Hélèna ne voulait pas parler, elle ne voulait même pas agir. Elle avait tué son propre père, et elle était à présent dans un monde où les Démons avaient libre accès pendant leur temps d'ennui. Autant dire qu'elle n'avait aucune envie d'argumenter ce genre de gamineries.

Elle faisait tout son possible pour respirer, pour avancer, pour affronter ce qui allait venir.

Mais la situation n'y était pas vraiment propice.

- Vous devriez baisser d'un ton.

Les deux jeunes filles se turent immédiatement, se rappelant l'endroit où elles étaient. Pour la première fois, Regina et Marilyn décidèrent de poser leur regard sur les alentours.

Quel triste spectacle s'offrait à elle !

À côté, même les vestiges de l'Académie était quelque chose de potable, dans lesquels on pourrait vivre et prospérer.

Ce monde-ci, il ne restait presque plus rien.

Le sol et le ciel étaient noirs, l'un recouvert de suie, de roches volcaniques et de sang, l'autre masqué par la fumée incessante des incendies des Démons, même si ces derniers dataient d'il y a bien longtemps.

Chaque pas était comme un avant-goût de l'Enfer, la demeure des Démons.

Chaque pas leur rappelait ce dont ils étaient capables.

Du pire.

- Partons d'ici au plus vite, s'il vous plaît...

Marilyn commençait avoir peur, ses épaules étaient relevées, presque tremblante.

Regina, elle, était déjà effrayée, mais elle faisait de son mieux pour garder la tête froide.

Quant à Hélèna...

Elle était écœurée par ce spectacle, attristée par ses actes et enragée contre elle-même.

Mais quelque chose ici l'intriguait.

Comme un son, une odeur, une ambiance.

Comme une sensation familière.

Étrangement familière.

La présence des Démons. Comme celle qu'elle avait ressenti face à la porte des Enfers.

- Ne faites aucun mouvement brusque. Ils sont là.

- Comment ça pourrait nous aider, au juste ?!

- Putain, Marilyn, la ferme !

C'était assez surprenant d'entendre ces mots sortir de la bouche de Regina, mais il fallait là se contenter de dire que c'était pour le mieux.

- Mais enfin, s'ils étaient là, ne crois-tu pas qu'ils nous auraient déjà tué ?!

Hélèna s'accroupit et posa sa main sur le sol, sous le regard dégoûtée de la jeune fille aux cheveux bleus.

Imperturbable, elle respira profondément et, en expirant, concentra son énergie magique dans sa main, la transmettant au sol pour détecter d'où venait les Démons.

Elle ne fut pas surprise d'apprendre qu'il n'y en avait qu'un, caché derrière un sort d'invisibilité.

- Je te vois.

On entendit des pas qui commençait à courir, Regina arma ses poings d'une magie qu'elle n'avait jamais utilisé jusque là, mais elle était bien trop concentrée pour se rendre compte de quoique ce soit.

Marilyn, elle, attrapa l'une des potions de diversion à sa ceinture tandis que Hélèna se relevait d'un mouvement vif et rapide, les mains enflammées.

- Je sais où tu es.

Sa magie reliait désormais l'emplacement du Démon à ses yeux, lui permettant de voir exactement où il était.

A sa vue, cependant, Hélèna éteigna ses flammes.

- Qu'est-ce que tu fais ?!

- Ce n'est qu'un petit garçon.

- Génial ! Maintenant elle devient sentimentale !

- Putain Marilyn, je vais te faire bouffer ta langue !

Marilyn se tut, regrettant ce qu'elle venait de dire à la minute où elle l'avait dit, avant même que Regina fasse le moindre commentaire.

Elle essayait, en vérité, de se convaincre elle-même.

Cela avait bien évidemment été vain, rien ne pouvait la convaincre qu'une telle chose était à faire, même pour le bien de tous. Elle se rappela les événements de plus tôt, avec Hélèna et son père, sachant pertinemment qu'elle n'aurait jamais su faire cela, même si sa vie en dépendait.

- Essaye de lui parler, alors., suggéra-t-elle, les sourcils froncés dans une mimique faussement contrariée.

Hélèna observa autour d'elle et planta son regard vers le Démon, que Regina, suite à cette indication, coinça en tapant sur le sol, libérant des plantes qui lui ligotèrent les jambes.

Le Démon, perdant le contrôle de son sort, tomba par terre, plus surpris de voir des plantes que de voir ces trois filles ici.

Il avait un regard curieux face aux petites fleurs qui se mettaient à pousser sur les lianes, mais cela ne dura qu'un instant : il se débattu pour en sortir, il voulait fuir, prévenir les autres, - probablement -, ou encore les capturer comme l'aurait fait n'importe quel autre Démon.

Regina se pencha vers lui pour desserrer les lianes car il avait l'air d'avoir mal à force de gesticuler.

- Arrête ça, tu vas te blesser, elles se resserrent si tu essayes de partir comme cela.

Le garçon pesta quelque chose d'incompréhensible, comme une langue inconnue, qui sonnait comme quelque chose de grinçant et douloureux.

- Hé, tu ne parles pas comme ça, compris ?

Marilyn et Regina se tournèrent tour à tour vers leur amie, le regard pleins de questions.

- C'est une longue histoire.

Elle s'approcha de l'enfant et l'invita à s'assoir pour répondre à ses questions.



- Qui es-tu ?

~Pause~ Witches DescendantsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant