Chapitre 7

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Les pieds flageolants, Émeraude était debout près du lit. Prenant appui sur la commode pour ne pas s’écrouler sur le sol en raison de la peur, elle priait silencieusement pour que l’ombre de la mort traverse ce lieu. Émeraude tourna la tête une énième fois, les couleurs pourpres qui décoraient la chambre dans laquelle elle se trouvait, ne la calmaient guère. Posant les mains sur les bordures de son vêtement, elle serra très fort le tissu de son kimono contre elle en entendant la porte grisonner. La peur monta à crescendo en elle, lorsqu’elle vit émerger de l’obscurité, un homme. Sauf  au cas où ses yeux
commenceraient à l’abandonner, l’homme semblait âgé. Un sourire hideux rehaussait ses pommettes aplaties pas les années.

-La perle du donjon! J'ai payé des millions pour t'avoir, dit le client d’une voix admirative.

Émeraude observait l’homme la détaillée du regard comme un objet. Se sentant chosifier, elle recula d’un pas pour se plaquer contre le mur. Le regard du client sur elle, commençait à être de plus en plus insistant au point où Émeraude se sentait brûler.

- Retires tes vêtements, ordonna le client.

Avait-il but? Se questionnait Émeraude.
L’homme devant elle, retirait sa chemise d’une manière désordonnée manquant de tact. Il semblait en état d’ébriété et sa démarche était chancelante.

-J’ai dit retire tes vêtements tout suite, gronda le client.

-Non ! murmura Émeraude d’une voix tremblante.

Émeraude sentait son cœur battre à rompre sa poitrine. Jusqu’à maintenant elle s’était soumise sans opposer de résistance à tous les ordres qu’on lui donnait. Elle avait même accepté porter la lingerie de filet que lui avait imposé maitresse Agatha, mais à présent ça s’arrêtait là. Elle n’allait certainement pas coucher avec un vieil homme, qui en plus était bourré.

-Répète-moi un peu ça, grogna le client en s’arrêtant brusquement.

Respirant profondément, Émeraude s’arma de courage.

-Vous êtes vieux, vous êtes saoul et vous êtes hideux, je refuse absolument de me donner à vous peu importe les millions que vous avez payé, lança Émeraude d'une voix impassible.

Ramena ses yeux sur le torse nu de l’homme, son ventre ballonné la rassura encore dans sa décision. Pas question qu’elle se donne à lui.

-Salle pute, tu me payeras tes injures, hurla le client.

L’homme furieux, couru vers Émeraude pour l’attraper. Ne s’étant jamais retrouvé dans une situation pareille, ses larmes ne tardèrent pas à couler. Puisqu’elle devait faire quelques choses pour se sortir de là, Émeraude profita de l’état d’ébriété du client pour le faire courir dans la chambre. Elle était en tête de course et faisait le tour de la chambre en petite foulée. Émeraude avait relevé son kimono pour mieux se mouvoir. Après avoir contourné une dizaine de fois le tapis rond posé au milieu de la chambre, le client réussi enfin à la rattraper et lui serra violemment le bras, lorsqu’elle s’apprêtait pour un autre passage.

-Lâchez moi hurla Émeraude d’une voix affolée.

-Non petite isolante.

Émeraude ouvrit grandement les yeux lorsqu’elle vu ce dernier lever la main pour la frapper. Apeurée, la jeune fille  poussa de toutes ses forces l’homme en face d’elle afin de le faire tomber. Ce dernier déjà chancelant, dégringola aussitôt sur le sol. Debout sur la pointe des pieds, Émeraude prenait conscience peu à peu de ce qu'elle venait de faire. L'homme couché sur le sol ne bougeait pas. Confuse et sur le point de fondre en larmes, Émeraude frappa l'homme à l'aide de son pied pour le réveiller mais en vain. Malgré les nombreux coups qu'elle venait d'asséner à l'homme étendu sur le sol, ce dernier ne se releva pas. Il n'en fallu pas plus à Émeraude pour hurler au secours.

-Je l'ai tué, hurlait-elle d'une voix hystérique.

Elle hurlait si fort que sa voix se faisait entendre dans tout le donjon. Peu de temps après, Dimitrio et des hommes entrèrent en trombe dans la pièce.

-Mais qu'est-ce que tu as encore faire, gronda Dimitrio en fonçant droit sur elle.

Émeraude ne pensait même plus à fuir. Actuellement, tout ce qui comptait pour elle était l'homme étendu sur le sol sans vie. Elle venait de tuer un homme songea-t-elle en se laissant glisser par terre, et adossée contre le mur. Dimitrio s'arrêta au niveau de l'homme pour prendre connaissance de son état. Il s'accroupit près lui et posa deux doigts sur son jugulaire. Émeraude n'osait relever la tête. Elle mourait à l'idée d'avoir tué un homme.

-Sortez-le d'ici, ordonna Dimitrio à ses hommes un moment après.

Se levant précipitamment, Émeraude tournait la tête dans tous les sens cherchant comprendre ce qui se passait.

-Dimitrio, interpella-t-elle d'une voix perdue.

Ce dernier détourna son regard de ses hommes qui partaient en emportant le corps, puis le posa sur Émeraude. Elle était frêle, les yeux rosis par les larmes.

-Dimitrio je t'en prie, implora Émeraude voyant ce dernier s'approcher d'elle à grands pas.

-Je te promets qu'après ce que je vais te faire, tu ne désobéira plus jamais annonça Dimitrio.

Émeraude n'avait pas fini d'assimiler sa phrase, lorsqu'elle senti un coup sur son visage, la faisant basculer. Dans sa chute, Émeraude cogna la tête contre la rambarde du lit avant de s'écrouler lourdement sur le sol.

Avec un long gémissement douloureux, Émeraude finie par ouvrir ses yeux après plusieurs battements de cils. Sa vision était encore flou, mais elle devina qu'elle n'était pas dans sa chambre ni à l'infirmerie. Les murs de cette pièce étaient dépourvus de couleur. Une odeur nauséabonde l'accueillir aussitôt qu'elle inspira sa première bouffée d'air la faisant tousser de dégoût. Lorsque les reflets orangés de la lumière lui parurent clairement, Émeraude remarqua que la porte de la pièce dans laquelle elle se trouvait, était un alignement de barreau de fer tel qu'une prison.

Prise de panique, la jeune fille tenta de se relever brusquement, mais une douleur intense lui vola un cri d’agonie. Émeraude était négligemment allongée sur une paillasse de pierre. Réprimant la douleur, Émeraude réussie à se lever et entrepris de se rapprocher des barreaux de fer alignés parallèlement en face d’elle. A peine avait-elle réussi à avancer de quelques pas, que la jeune fille s’écroula lourdement au sol. De lourdes chaines emprisonnaient ses pieds contre  la paillasse de pierre.

Assise sur le sol souillé de tache d'huile noirâtre, Émeraude posa son front contre ses genoux. Les minutes suivantes, elle n'avait fait que couler des larmes. N'avait-elle pas tué un homme ce soir? Elle méritait bien de se retrouver dans une situation pareille songea-t-elle. Ses sanglots s'entremêlaient au bruit d'égout qui retentissait dans la pièce. Peut-être aurait-elle dû simplement s'offrir à cet homme ce soir. Elle n'aurait certainement pas le moral en pièce actuellement et ne se retrouverait dans une prison. Elle ressentirait peut-être le dégoût, mais peut-être qu'en multipliant ses ébats avec ses clients, elle finirait pas s'habituer à cela. Beaucoup trop de peut-être peuplaient les pensées d'Émeraude, la faisant souffrir intensément. Ses sanglots lents retentissaient comme des bruits de tambour dans le couloir. Ne dit-on pas que la liberté s'arrache?

Émeraude avait désobéir à son père uniquement pour s'octroyer un peu de liberté, connaître le monde, ou encore se permettre de faire des connaissance fructueuse. Hélas, actuellement, les larmes qui jalonnaient son visage symbolisaient sa liberté perdue. Plongée dans ses pensées moroses, Émeraude se leva précipitamment lorsqu'elle sentie quelques choses marcher sur son pieds très rapidement. Devant elle se tenait une famille de souris. Oubliant ses larmes, Émeraude hurla de toutes ses forces au point d'en faire trembler les murs. Ce qui fit fuir d'ailleurs les animaux. Peu de temps après, des bruits de talons aiguilles retentirent dans le couloir. Après s'en suivit des bruits de clé dans la serrure.  Maîtresse Agatha était devant elle, pendue au bras d'Andreï. Voyant la mine sévère de ce dernier, Émeraude resserra les cordes de son kimono puis fit quelques pas en arrière.

-Enfin réveiller, lança Andreï d'une voix dure.

La perle du donjon Où les histoires vivent. Découvrez maintenant