Chapitre 24 : Retrouvaille

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Trois semaines s'étaient écoulées depuis l'incident avec Ryan, tout était rentrée dans l'ordre avec Jugh et nous passions le plus clair de notre temps ensemble. On voulait en profiter avant que les cours ne reprennent. Cependant plus on se rapprochait, plus j'avais une fâcheuse impression qu'il émettait des doutes sur moi, il était soupçonneux de temps en temps mais rien d'alarmant pensai-je.

La deuxième semaine d'août je m'envolais pour la république dominicaine avec Elliot, il avait réussi à obtenir deux semaines de repos, ma mère a donc organisée nos fameuses vacances en famille, et c'était Mady qui avait choisi la destination, cette année c'était son tour. Forcément il avait fallu qu'elle choisisse un endroit où soleil, plage et maillot de bain étaient de rigueur mais je ne lui en voulais pas, ma mère toujours aux petits soins avec moi a donc choisit une magnifique location décorée de bois flottant et très lumineuse, mais ce qui me plaisait le plus c'est la plage privée et l'impossibilité de rencontrer le moindre étranger.

J'étais devant le miroir en pied de ma chambre temporaire que je partageai avec Mady, elle m'avait obligée à mettre un stupide bikini avec des feuille et fleurs tropical dessus. « Mais il n'y a que nous ! tu verras tu seras magnifique ! fait le pour moi s'il te plaît » m'avait-elle dit. Ces compliments quand elle m'avait vu avaient été grandiloquant, cependant je ne les entendais pas. Je lui avais demandé de sortir quelques minutes et à présent j'étais là à me regarder dans ce stupide miroir.

J'étais fine et athlétique, même moi je pouvais le voir, j'avais des seins un peu petits mais ce n'était pas ça qui me dérangeait, non ce qui me dérangeait le plus c'est ce que je ne voyais pas de prime à bord dans le miroir, ce qui faisait de moi un monstre. Je me mis de trois quarts et écartai mes longs cheveux bruns de mon dos pour les placer sur le côté gauche de mon épaule. Là je les vis, ces horreurs que je portais chaque jour sur moi comme le pire fardeau de mon existence, visible à la vue et aux yeux de tous dans ce stupide bikini qui ne cachait rien du tout. Mes cicatrices.

De longs et profonds traits boursouflés zébraient mon dos en partant de mes omoplates jusque dans le bas de mes reins, en les regardant je pouvais encore sentir la morsure de la lame de rassoir sur ma peau, et je l'entendais cirer dans ma tête « je vais faire sortir le démon en toi », c'est comme s'il me criait directement dans les oreilles. En toute objectivité, elles étaient vraiment horribles à regarder, il m'avait si longtemps et si souvent infligé ce traitement que plus une place de peau nue n'apparaissait. La chirurgie esthétique était impossible, trop profonde, trop abîmée avaient-ils dit, je resterais toute ma vie avec ce qui montre aux yeux de tous que je suis un monstre. Jamais je ne les montrerais et surtout pas à Jugh.

Mon cœur se remplit petit à petit d'une haine et d'une colère immenses à force de les observer, jamais je ne serais normal, cadeau de mon cher géniteur pour me rappeler tous les jours de ma vie que je suis un démon selon lui. Je commençais à suffoquer et ma tête me brûlait, je me remis précipitamment face au miroir pour ne plus les voire. Je fermai les yeux, posai mes mains sur le mur de chaque côté du miroir et respira profondément, ce n'était pas le moment de tout casser. Quand je rouvris les yeux, deux grands yeux bleus m'observaient, je les hais ces deux-là aussi, parce que j'ai les mêmes que lui, celui qui m'a fait ça et tant d'autre chose encore, tout comme je le hais lui et que je me hais moi-même. Quand je me regarde dans le miroir j'ai toujours l'impression que c'est lui qui m'observe à ma place, la génétique est très joueuse avec moi apparemment.

Quand Mady entra soudainement dans la chambre j'étais à deux doigts de me mettre à hurler comme un damné et brisé en mille morceaux ce satané miroir tout comme IL m'avait brisé. Quand je vis le regard de ma sœur, je remis instantanément mon masque et me forçai à lui sourire. Je ne devais surtout pas l'inquiéter, elle se sentirait tellement coupable, elle n'a pas à porter tout ce poids sur elle.

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