Daishi

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À l'Underground la fête battait son plein. Au centre de la piste, les couples ondulaient au rythme de la musique. Les corps couverts de sueur se frôlaient dans une langueur presque sexuelle. Du haute de la petite mezzanine surplombant les danseurs, Job, le disc-jockey aux muscles apparent sous sa peau translucide, s'activait sur ses platines. Les câbles directement reliés aux prises jack implantés dans ses tempes transmettaient ses directives au système informatique du club qui se chargeait ensuite de donner vie à ses rêves psychédéliques. Tout autour de nous, des hologrammes aux formes kaléidoscopiques naissaient et mouraient en synergie avec les pulsations de la musique.

La sensation d'une langue humide glissant le long de mon coup me tira de ma contemplation. Doucement, je fis glisser ma main droite jusque dans l'échancrure du décolleté de Ty. La jeune femme à la longue crinière blonde émis un gloussement alors que je m'infiltrai sous le tissu vaporeux de son chemisier pour m'emparer de son sein. Sur ma gauche une main inquisitrice vint s'égarer sur la bosse qui commençait à déformer mon pantalon.

— Ne m'oublie pas, me susurra My d'un ton faussement jaloux.

— Comment je pourrai ? répondis-je en soudant mes lèvres aux siennes.

Alors que ma main explorait toujours plus profondément les délices du corps de Ty, ma langue entamait une délicieuse passe d'armes avec celle de sa sœur, aussi rousse que My était blonde. Elle avait un goût de fraise. Bien sûr, toutes deux étaient des professionnelles et j'ignorai même si elles avaient réellement un lien de parenté comme elles le prétendaient. Au final, qui s'en soucie ? Leurs baisés étaient chauds, leur peau douce et elles possédaient un don certain pour électriser la moindre parcelle du corps d'un homme. Quant à la légère touche d'interdit lorsque les deux « sœurs » échangeaient de langoureux baisers, cela valait bien un petit mensonge. Nous nous étions rencontrés trois mois plutôt lors de ma première visite à l'Underground et nous ne nous étions plus quittés depuis. Chaque minute passée hors des bureaux de Kenkou Pharmaceutique leur était consacrée. La vérité, c'était qu'elles seules rendaient mon exil sur Old quelque peu supportable. Bien sûr, le prix était prohibitif, mais j'étais assez riche pour ça.

— Ne vous arrêter pas pour moi, s'exclama une voix aux accent chantants.

— Pourquoi ferait-on ça ? demandai-je en m'écartant de My.

Trevor Blunt accueillit ma question avec son franc sourire coutumier. Malgré ses traits adipeux et sa carrure de sumo, le propriétaire du club dégageait l'énergie d'une super nova sur le point d'imploser. Ses yeux, aux iris si sombres qu'elles en paressaient noires, étaient incapables de se poser un instant sur quelque chose. Il semblait vouloir regarder partout à la fois. Le gros homme était sympathique, intelligent, drôle et plus important : c'était lui qui m'avait offert ma première nuit avec My et Ty. Toujours savoir fidéliser les clients, m'avait-il dit lorsque j'avais fini par le rencontrer après ma nuit avec elles. Bien sûr, je ne lui faisais aucune confiance, mais il ne semblait pas le prendre comme une insulte personnelle. Les affaires sont les affaires. Nous avions rapidement sympathisé et c'est avec plaisir que je me rendais dans son club presque tous les soirs.

La concurrence que se livraient les clubs de la zone rouge était presque aussi féroce que celle qui pouvait opposer deux consortiums terriens et ce n'était pas peu dire. Certains établissements étaient déjà partis en fumée, de manière littérale, pour avoir fait de l'ombre aux mauvaises personnes. Pour les autres, le jeu était simple. L'argent appelant l'argent, leur but était donc de remplir leur club avec un maximum de gosses de riche dans mon genre. Avoir le membre d'une Famille dans son cheptel était une pièce de choix dans la collection de Trevor. Je m'assurai donc de le lui rappeler assez souvent pour en tirer tous les bénéfices.

Point ZéroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant