P2: Chapitre 6

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Je suis crevé. Je n'ai pas beaucoup dormis, car j'ai parlé des heures avec Colin cette nuit. J'ai du mal à rester éveillé en cours.

Après le cours d'histoire des arts, je rejoins Colin au portail. On a décidé de manger ailleurs que dans le restaurant universitaire aujourd'hui.

Quand je le rejoins, je remarque qu'il a l'air moins fatigué que moi.

Je lui dis :

-Salut.

-Hey. T'as l'air épuisé.

-C'est parce que j'ai passe la nuit à parler avec un idiot.

-Hé, c'est méchant !

Je ris et lui répond:

-Non, en réalité, c'est surtout à cause de mon cours d'histoire des arts. Mon prof est un vieux au bord de la retraite qui a le don d'aspirer ton énergie vitale avec ses paroles.

-Un bon repas te remettra sur pied ! Tu veux qu'on aille où ? McDo ?

-Dans un resto japonais.

-Oh... Ok.

-Quoi ? Tu n'aimes pas les sushis ?

-J'en ai jamais goûté.

-Sérieusement ? ! Bah, c'est l'occasion de te faire découvrir. Après tout, tu ne peux pas dire que t'aime pas sans avoir essayé. Dis-je en riant.

Lui à l'air gêné. Je lui réponds :

-Je te charrie. On y vas !

⏳⌛

-Pffff

-Pourquoi tu ris ? ! Me dit Colin, vexé.

-Si tu continues de tenir tes baguettes comme ça, on est encore là demain.

Ça fait quelques minutes que Colin tente en vain de soulever un sushi avec des baguettes. Il me dit :

-Il est où le serveur ? Je vais demander une fourchette...

-Tu oserais faire un tel affront à tout le peuple japonais ? Tout un héritage cultuel de plusieurs millénaires gâché d'un coup par un petit européen.

Colin semble vraiment hésiter. J'ajoute :

-Je rigole. Ils en ont rien à faire si tu manges avec une fourchette. Dis-je en mangeant mes ramen.

Colin observe ma façon de tenir des baguettes et tente de faire de même et miraculeusement, il y arrive. Il mange enfin son premier sushi et je lui demande :

-Alors ?

-Che chuper bon ! Dit-il la bouche pleine et l'air enjoué. 

Je ris face à sa voix d'enfant. Je suis content de voir que notre relation devient doucement comme avant même si on ne peut ignorer la distance qui c'est crée entre nous. C'est peut-être le fait de lui enlever ses fantômes qui le mettent plus à l'aise.

Il prend ensuite un maki et me mange. Je lui demande :

-Au fait, ce week-end, tu veux toujours venir avec moi prendre des photos ?

Il hoche là tête, ne voulant pas répondre de nouveau la bouche pleine.

Je lui demande ironiquement :

-Ça ne te fais pas trop peur d'être seul dans une forêt avec un gay ? On ne sait pas ce que je pourrais te faire.

Il manque de s'étouffer et tousse bruyamment, surpris. J'ajoute :

-Hey ! C'était une blague ! Ne meurs pas s'il-te-plaît ! Et mange proprement.

Je passe une main sur sa joue pour enlever, de mon pouce, un grain de riz qui s'était déposé. Colin me regarde surpris puis tourne la tête avant de me dire d'un visage sérieux :

-Ne fais pas ça.

-N'en fait pas toute une scène. Je voulais juste être sympa.

Je soupire et continue de manger en silence. Je déteste ça. J'ai l'impression qu'on est chacun des deux côtés d'un gouffre, mais qu'on continue de parler comme si de rien était. Je vois bien le gouffre qu'il y a entre nous.

C'est comme s'il voulait rester mon ami, mais que mon homosexualité lui faisait peur.

Je soupire.

Enfant, nous combattions des monstres ensemble et maintenant, je suis le monstre qu'il tente de combattre.

Dans la paume [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant