Dans la paume [BxB]

P3: Chapitre 3

-Prêt pour la séance du jour ? Me demande Nils.

-Je ne sais pas...

-Ça va aller.

J'entre dans l'appartement de Nils. Tout semble neuf et il y a encore certains cartons non-ouverts. Nils et Nathan ont récemment décidé de vivre ensemble. Depuis le... le... le décès de Colin, Nils me fait des psychothérapies.

Mes parents veulent que j'aille voir un vrai psy, mais, parler à un ami est plus simple.

Je demande à Nils :

-Nathan n'est pas là, j'espère.

-Ne t'en fais pas. Je l'ai viré avant que tu arrives.

Je m'allonge sur son canapé tandis que Nils place une chaise à mes côtés et s'assoit dessus, un calepin et un stylo à la main. Je dis :

-J'en reviens toujours pas... Vous vivez ensemble...

-Ça va faire un an et demi qu'on est ensemble, on s'est juste dit qu'il était temps... Mais je ne devrais pas parler de ça.

Étrangement, il ne semble pas convaincu de ce qu'il dit.

-On est là pour toi. Sur une échelle de zéro à dix, à combien tu estimes ton envie de mourir ?

-Quarante-huit. Répondis-je, pareillement ironique.

-Oh, ça a baissé. C'est bon signe. Et sur la même échelle, à combien tu estimes ta motivation ?

- Moins cent-trois.

-Est-ce que tu ressens une amélioration depuis le début de nos séances ?

-Je sais pas trop. J'ai l'impression que non, mais je ne dis que, si on ne faisait pas ses séances, je me sentirais pire.

-Tes tremblements de mains, ça se calme ?

-Pas du tout. Dis-je en levant mes mains devant moi.

Elles tremblent énormément, encore, tel des feuilles accroché à un arbre tentant de ne pas se faire arracher par une tempête. Il continue :

-Et tes cauchemars...

Je ne réponds rien. Il me demande :

-Tu ne veux toujours pas en parler ?

Je hoche la tête en signe de négation. Il note ça dans son calepin. Je lui dis :

-Cependant, je n'ai pas pleuré hier, et je n'ai toujours pas pleuré aujourd'hui. C'est un exploit.

-Wow bravo. Et, puis-je te demander quel en est la raison ? Tu es plus heureux... Enfin, je veux dire, tu es moins malheureux et tu commences à pleurer moins. Y a-t-il une raison particulière ?

-J'ai rencontré quelqu'un.

-Ah oui ?

Je pose mes mains sur le canapé et fixe le plafond. Je dis ensuite :

-J'ai rencontré quelqu'un... Comme moi. Il a perdu quelqu'un qu'il aimait et... Quand je lui parle, ça me fait du bien, car je me sens compris. Quand je te dis que je me sens mal, tu me réponds juste "ça va aller". Avec lui, quand je lui dis que je vais mal, il me dit "Je comprends" et... Ça fait du bien de se sentir... Compris.

Le visage de Nils perd son expression professionnelle pour reprendre son masque d'ami et il me répond :

-Mais... Eli... Je te comprends aussi...

-C'est faux. Tu ne peux pas imaginer ce que ça fait de perdre la personne qui compte le plus à tes yeux. Tu as perdu ta grand-mère que tu n'as jamais connue et une tante que tu as vue trois fois dans toute ta vie...