Chapitre 1

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La pleine lune régnait majestueusement dans l'immensité céleste, aux côtés de millions de petites étoiles scintillantes. Elles perçaient ensemble, de leurs douces lumières argentées, l'épaisse obscurité de cette nuit d'été. Éléonore foulait de ses pieds nues, le passage en terre qui traversait un vaste champ de lavande. Les bosquets, légèrement ballottés par le souffle chaud du vent, arboraient de magnifiques couleurs bleutées et magenta et diffusaient dans l'air estival, leur divins parfum ensoleillé.

La longue chevelure incandescente d'Éléonore virevoltait dans les airs et entourait de sa couleur flamboyante, le beau visage de la vampire. Malgré les très nombreuses années écoulées depuis sa transformation, ses traits n'avaient pas subit le moindre affront de la part du temps.

Sa peau étincelait de la même pureté immaculée que la fleur de jasmin étoilée à peine éclose, ses lèvres délicates étaient colorées de la douce teinte rosée de l'aube, ses pupilles étaient animées de la subtile verdoyance des premières pouces printanière.

La vampire était vêtue d'une robe pastel, brodée de motifs floraux. Un large décolleté arrondis dévoilait la naissance de ses seins, sa taille fine était serrée dans un rigide corset et ses épaules couvertes de courtes manches qui se terminaient quelques centimètres au-dessus de ses coudes, dans une profusion de dentelle délicate.

Dans son dos, au sommet d'une petite colline, se dressait d'une plus noble majesté, une bastide provençale. Une large porte et d'immenses fenêtres encadrées de pierre de taille, perçaient la façade carré recouvert d'un enduit ocre. Deux tours rondes aux toits plats se tenaient de chaque côté de la riche demeure et surplombaient de quelques mètres la noble bâtisse entourée d'oliviers et d'amandiers.

Deux siècles, deux siècles s'était écoulés depuis que Marcella avait lancé sa terrible malédiction sur Éléonore. Après la naissance de ses fils, la vampire s'était installée dans cette demeure, la même où sa propre mère avait vu le jour. Elle employait les habitants du village voisin, pour cultivé la lavande, l'olive, l'amande et la vigne sur les vastes terres de son domaine.

La tête baissée, la vampire arrivait au bout du champ de lavande, une larme s'écoula de ses yeux humides pour ruisseler sur ses pommettes parsemées d'une constellation de tache de rousseur. En contrebas de celui-ci s'étendait un petit lac, au centre duquel Éléonore avait fait reproduire à l'identique, le temple grecque qui se trouvait aux abords du château de son enfance. Une petite barque flottait sur l'eau claire et scintillantes, au bout d'un ponton de pierre prolongeant la rive sauvage.

Elle posa le pied dans l'embarcation de fortune et rama sur l'eau calme jusqu'à l'édifice antique. La vampire accrocha le petit bateau à l'une des colonnes, habillée de lierres. Les flammes d'un brasier brûlant dans une vasque, entre les mains de la statue à l'effigie de sa mère, faisaient danser ensemble sur le visage en marbre blanc, reflets incandescents et ombres.

Éléonore s'assit sur le sol, sous le regard bienveillant de sa mère.

— Ma si chère mère, j'ai essayé... souffla Éléonore, une nouvelle larme scintillantes s'écoulant sur sa joue. J'ai essayé d'être heureuse, je vous le jure... J'ai tout ce dont quiconque pourrait rêver, je ne crains ni la faim, ni le manque, ni même le temps et pourtant, je ne trouve pas la paix. Mon cœur s'était apaisé, j'ai réussi à rire de nouveau grâce aux deux merveilleux êtres que Théolias m'a laissé en héritage, mais son absence se fait de nouveau si douloureuse. Je ne peux envisager de continuer à vivre sans lui. Mes fils sont grands à présent, ils n'ont plus besoin de moi, mais comment leur expliquer, comment leur faire comprendre. Je n'ai même jamais eu la force de leur parler de leur père, de leur dire quel homme il était.

Éléonore sécha sa joue glacé, du revers de sa main. Elle posa son regard émeraude sur le visage immobile de la statue de marbre blanc. Ses traits d'une grande beauté, étaient figés sur une expression tristement joyeuse. Ses lèvres sculptées esquissaient un léger sourire, ses grands yeux exprimaient un insouciant bonheur. La vampire laissa glisser ses doigts fins sur la joue en pierre de sa mère défunte. Si seulement la mort ne lui avait pas arraché cette être, sa vie aurait été si différente.

Eleonore's SoulOù les histoires vivent. Découvrez maintenant