Chapitre 4

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Au rythme de la marche rapide et énergique d'Olenne et malgré le lourd bagage qu'elle portait sur son dos, les vastes plaines verdoyantes sur lesquels étaient installés le campement des nomades, laissèrent lentement leur place à une forêt d'immenses pins. Olenne s'enfonça dans ces bois, guidé par son instinct.

Après plus d'une heure de marche sur le sol ensablé et couvert d'épine de pins, la jeune femme vit apparaitre devant elle, une petite clairière baignée de lumière. Des rires d'enfants résonnaient entre les arbres, elle les avait trouvé. Elle s'approcha de quelques pas de plus, mais resta dissimulée derrière les arbres.

Une large tente se dressait au centre de l'étendu herbeuse, un petit potager se devinait d'un côté et les cendres d'un feu de camps de l'autre. Deux enfants, un garçon et une fille, tous deux de moins de dix ans, couraient l'un après l'autre, sous le regard tendre de leur mère, tandis que le père récoltait quelques légumes dans la terre sablonneuse.

Olenne les observait déjà depuis de longues minutes, lorsqu'elle écrasa une brindille de bois. Le craquement fit immédiatement se lever la tête de l'homme. La femme appela ses enfants à elle et les serra contre ses jambes.

— Il y a quelqu'un ? s'écria le père de famille, en fixant l'orée des bois les sourcils froncés.

La chef des nomades s'avança lentement jusqu'à la clairière.
— Pardonnez mon interruption, je m'appelle Olenne et je sais ce que vous êtes, s'exclama-t-elle.

Ces mots n'eurent pas l'effet escompté. L'homme et la femme échangèrent un regard, l'instant d'après, le corps de celui-ci se déforma, se transforma en un énorme loup, au pelage plus noir que la plus sombre des nuits.

— C'est impossible, il fait jour, se souffla-t-elle à elle-même, impassible face à l'animal qui posait sur elle un regard féroce.

La femme fit rentrer ses enfants dans la tente et se plaça au côté de son mari.
— Que nous voulez-vous ? Vous faites partie des chasseurs, c'est ça ? lança-t-elle sèchement.
— Non, je ne vous veux aucun mal ! Je suis comme vous, je suis une louve moi aussi.

L'énorme loup s'approcha d'Olenne, il renifla la peau de la jeune femme de ses larges narines avant de se reculer vers sa femme. Il tournait le dos à la nomade, lorsqu'il reprit sa forme humaine.

— Elle dit la vérité, s'exclama-t-il en attrapant le vêtement que lui tendait la femme.
— Pardonnez notre méfiance, on entend parler de beaucoup d'exécutions d'hommes loups depuis quelques temps, fit la jeune femme d'une voix adoucie.
— Comment vous appelez-vous ? demanda Olenne.
— Mon nom est Lupus et voici ma femme, Bérangère, quant à eux, dit-il en désignant les deux enfants qui arrivaient en courant. Ils s'appellent Tristan et Caelessa.
— J'ai connu un Lupus et une Caelessa par le passé, je présume que ce sont vos ancêtres.
— Si cela était vrai, vous devriez être bien plus vieille, lança-t-il.
— Il ne faut pas se fier aux apparences, répondit Olenne avec un sourire énigmatique.
— La nuit va bientôt tomber, pourquoi ne resteriez-vous pas dînez avec nous et nous donnez la raison de votre présence, proposa Bérangère.
— Avec plaisir, j'ai moi-même plusieurs questions à vous poser.

***

Le regard alangui et fixé sur les motifs géométriques du tissu brodé, qui recouvrait l'intérieur de la cabine de la berline hippomobile, Éléonore ne pouvait s'empêcher de penser ses fils. Elle imaginait dans son esprit, leur réaction lorsqu'ils apprendront sa prétendue mort. Cela la désespérait d'avoir dû les abandonner ainsi, mais elle n'avait pas d'autre choix, ils ne l'auraient jamais laissé faire sinon. Elle fut soudain tirée de ses pensées par le brusque arrêt de la calèche.

Eleonore's SoulOù les histoires vivent. Découvrez maintenant