Chapitre 22

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Un nuage de sable fin s'éleva dans la nuit alors qu'une puissante onde de choc frappa Éléonore et Lilith de plein fouet et les projeta au sol.

— Vous ne pensiez quand même pas que j'allais me laisser faire sans me défendre ? s'exclama Ernestine avec le plus de contenance dont elle pouvait faire preuve.
— Au contraire, je l'espérais, souffla Éléonore en se redressant lentement, ses longs cheveux ardents recouvrant son sourire cruel. J'ai terriblement envie de me défouler sur ton visage !

Une expression de terreur pouvait se lire sur le visage de la sorcière. Ernestine se retourna et s'élança vers le chemin qui traversait la forêt et menait au village, mais la vampire s'était déjà relevée et l'a rejoignit en un battement de cils. Éléonore saisit sa proie par ses longs cheveux châtains et la jeta violemment au sol. La jeune femme glissa sur le sable sur de longs mètres et termina sa course contre le tronc d'un pins épineux.

La sorcière était sonnée, mais malgré sa vision flou, elle vit la longue silhouette d'Éléonore venir dans sa direction. Elle leva les bras devant elle tout en récitant les paroles anciennes d'une incantation. Les branches de l'arbre dressé derrière elle se mirent à craquer alors que ses aiguilles se détachaient et se regroupaient pour former des semblants de pieux en bois.

Ces projectiles plurent sur la vampire dont rapidité surnaturelle ne lui permit pas de les éviter tous. Plusieurs de ces aggloméras d'épines transpercèrent sa peau de la couleur de l'ivoire et tachèrent sa robe blanche de sang vermeil. Éléonore les arracha de sa chair un à un sans montrer le moindre signe de douleur. Une fureur terrifiante brûlait dans son regard aux pupilles sanguines.

Elle reprit sa marche vers la sorcière. Ernestine se leva, les jambes tremblantes. Les yeux brûlants qu'Éléonore dirigeait sur elle lui glacèrent le sang, mais il était hors de question qu'elle abandonne sans se battre. Elle brandit sa main vers la vampire tout en récitant une formule occulte.

L'ancienne reine à la chevelure enflammée ne se soucia pas de la menace que représentait le sortilège que sa proie répétait encore et encore et poursuivait sa progression sur la petite plage de sable bordant le lac. À mesure qu'elle approchait de la sorcière, elle commença à sentir une chaleur de plus en plus intense s'élever du sol. Le regard de la vampire se baissa, sous ses pieds le sable entrait en fusion et l'engloutissait lentement dans son magma fumant.

Au contact de cette substance, la robe immaculée d'Éléonore s'embrasa et se consuma en quelques instants, la vampire quant à elle, était emportée dans les profondeurs bouillonnantes de ce puits de magma jusqu'à finir par disparaître sous sa surface.

Lorsque le crâne de son ennemie fut recouvert du sable en fusion, Ernestine s'écroula sur le sol d'épuisement. Cette incantation avait siphonné toute son énergie, sa respiration était haletante et bruyante, sa peau s'était recouverte de sueur et ses membres ne pouvaient cesser de trembler.

— Non ! Ce n'est pas comme ça que ça devait se passer, Éléonore devait te retenir... Tu n'aurais pas dû la battre ! s'égosilla Lilith de l'autre côté de la plage.
— Comment as-tu pu me faire ça ? clama Ernestine malgré sont essoufflement. Toi, ma propre sœur, tu as aidé cette vampire à tenter de me tuer !

Lilith s'avança dans la direction de sa sœur d'une démarche lente et sinueuse. Son visage empreint d'une fureur froide fut soudain éprit d'un rire bruyant et diabolique.

— Tu crois que c'est Éléonore qui est à l'origine de tout ça ? Tu es encore plus bête que je ne le pensais déjà. C'est moi qui ait tout imaginé, tout planifié !
— Toi ! Mais pourquoi ?
— Pourquoi ? Tu oses me demander pourquoi ? gronda Lilith. Toi, mère et Rosaline n'avaient fait que me rabaisser depuis ma naissance car je n'ai pas de pouvoir, vous m'avez traité comme une esclave toute ma vie et tu me demandes pourquoi je te hais, pourquoi je veux votre mort à toutes les trois ?
— Ne joue pas à la victime avec moi, s'emporta Ernestine. C'est toi qui a toujours été jalouse de nous et de nos pouvoirs, tu ne supportais pas que l'on soit puissante et toi non, tu mériterais la mort pour ce que tu as essayé de faire et je suis sûr que mère sera d'accord avec moi.

Les pupilles sombres de Lilith s'animèrent d'une bestialité féroce. Elle se jeta sauvagement sur sa sœur, mais celle-ci prononça quelques paroles qui projetèrent la sorcière sans pouvoir contre la barrière d'arbre dressée autour de la plage.

Ernestine s'approcha d'un pas lent de sa sœur.
— Je te laisse une chance de t'enfuir, mais sache que je vais raconter ce que tu as fait à mère, père et Rosaline, si l'on te revoit dans ce village, nous te tuerons ! lui cracha-t-elle au visage.

La sorcière contourna la petite mare de sable refroidit et se dirigea vers l'embouchure du chemin conduisant au village. Sa démarche était lente et hésitante, l'affrontement avait éprouvé son corps bien plus qu'elle ne s'y attendait.

Dans son dos, une immonde main ensanglantée et couverte de pustules purulents brisa la surface du puits de sable fumant.

Un pieu d'épine amalgamée fusa dans l'air et transperça l'épaule d'Ernestine. La sorcière s'écrasa sur le sable en hurlant de douleur. Elle rampait pitoyablement sur le sol, n'osait tourner son regard vers la créature dont elle entendait les grognements. De lamentables larmes coulaient sur ses joues rondes, de pathétiques gémissements quittaient ses lèvres.

Éléonore se dressait derrière elle. Son corps n'était plus qu'une horrible cloque de laquelle suintait une immonde substance rougeâtre. La longue chevelure rousse de la vampire repoussa de son crâne et vint vêtir son corps nu, sa peau se régénérait lentement mais ses brûlures étaient tellement importantes que même ses capacités de guérison surnaturelle ne suffisait à réparer son corps.

Alors que les pas de cette créature se faisait de plus en plus proche, Ernestine prit une profonde inspiration et la fixa tout en entamant la récitation d'une incantation. Mais la vampire ne lui laissa pas le loisir d'aller au bout de ses paroles, la main gauche d'Éléonore se referma sur la gorge de la sorcière et comprima ses cordes vocales pour étouffer sa voix. Elle souleva sa proie au-dessus du sol et l'approcha de son visage féroce.

— Comment vas-tu te défendre si tu ne peux pas parler ?

Ernestine tenta de se débattre, mais la vampire plongea sa main libre dans la bouche de la jeune femme. Ses doigts se serrèrent autour de sa langue, elle tira violemment, arracha se lambeau de chair dans une épouvantable effusion de sang vermeil scintillant sous les rayons de la lune.

Éléonore lâcha sa prise autour du cou de la sorcière et la laissa s'écraser sur le sable. Une mare rougeâtre imbiba la silice fine autour de la pauvre sorcière.

— Elle est à toi, lança-t-elle à Lilith qui avait assister à la scène accroupie contre un arbre. Lorsque tu auras fini, tu me laissera son corps, j'ai affreusement soif !

La sorcière sans pouvoir se releva avec un empressement hystérique, elle s'accroupit au côté de sa sœur, décrocha le pendentif qu'elle avait créé la veille et le plaça sur la gorge de sa victime. Le regard injecté de sang d'Ernestine la suppliait de l'épargner, ses lèvres bougeaient faiblement mais ne libéraient aucune parole, seulement une l'hémoglobine mousseuse dans laquelle elle ne tarderait pas à se noyer. Les supplications pathétiques de sa sœur n'atteignirent en rien la motivation de Lilith, au contraire elles ne firent qu'attiser la jubilation de la sorcière.

Au contact de la peau de la jeune femme et des paroles d'une langue oubliée que récitait Lilith, la pierre violacée qui ornait le médaillon rayonna d'une lumière sombre et dévorante. La peau d'Ernestine se marbra du tracé bleuâtre de ses veines, le bijou absorbait les pouvoirs de son sang. Alors que le rituel touchait à sa fin, la sorcière à la chevelure de la couleur du sang enfonça la lame d'un long couteau dans le cœur de sa sœur.

Le ciel jusque-là dégagé sur le paysage céleste, s'assombrit d'épais nuages sombres et grondants annonçant un orage imminent, un vent violent et glacé s'éleva et fit se tordre en d'odieuses contorsions, les troncs les plus robuste de la forêt.

— Nous avons réussi ! jubila Lilith. Je dois rentrer, faites ce qu'il vous plaira de son corps, mais assurez-vous que l'on ne le retrouve pas.

Éléonore regarda la sorcière désormais dotée du pouvoir de récitation disparaitre derrière les arbres avant de reporter son attention sur le corps gisant à quelques pas d'elle. La vampire se lécha les lèvres desquelles dépassaient deux longues canines immaculées.

Eleonore's SoulOù les histoires vivent. Découvrez maintenant