VII.

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Point de vue Lomepal.

- Eh tu l'as laissée partir ? Après ça ?! Mais t'es qu'un pauvre con!
- Tu voulais que je fasse quoi putain... j'étais déchiré.
- Je crois que le pire c'est que tu lui ai payé un verre. Payer une bière à Adina non mais je rigole encore, c'est du SUICIDE de faire ça mon gars !

Roméo avait plaqué sa main sur son grand front.
Ouais, j'avais été un gros con hier soir.
Mais quand je l'ai vue, là, sur scène, en petit corset laissant entrevoir ses jambes si fines... Je me suis demandé si je rêvais, ça aurait été presque normal que je plane vu la dose que je venais de fumer. Mais c'est quand elle m'a regardé dans les yeux avec son putain de regard, de regard qui te fait même regretter d'être né, eh ben là j'étais sûr que c'était bien elle.

Tous les soirs je me rendais dans un petit bar avec cabaret clandestin. À Paname y en a pas des masses. Comment c'était possible que je tombe sur elle. Sans déconner combien de chances pouvait-il y
avoir pour que ce soit son cabaret, son numéro?

- C'est le destin mec.
- Arrêtes tes conneries.
- Nan mais sans déc, t'as ressenti quoi quand tu l'a vue ?
- J'étais DÉ-CHI-RÉ!
- MÊME DÉCHIRÉ TU PEUX RESSENTIR DES PUTAINS DE CHOSES!

Il s'est levé et a fait les cent pas dans le studio d'écriture. J'avais l'impression d'être face à mon daron, à deux doigts de m'en mettre une.

- Je... Je sais pas. Elle était maquillée avec presque rien sur le dos et pourtant c'était tellement... Tellement elle tu vois. Elle dansait et elle avait du chien, clairement. Ça m'a rappelé trop de choses. Tout la mettait en valeur elle sortait d'un putain de rêve jte dis. Depuis j'ai besoin d'elle, comme un gros joint tu vois. J'ai besoin d'elle tout le temps, chaque seconde, qu'elle soit à côté de moi, où n'importe où ailleurs tant que c'est avec moi. C'est trop beau pour être vrai, je sais que ça se passera pas comme ça, mais je la veux pour moi tout seul je commence à en avoir conscience.
- T'es amoureux tu sais.
- Steuplait épargnes moi le speech du meilleur pote beauf qui va ramener la nana dans le lit de son meilleur pote.

Il a rit doucement.
Je me suis allongé de tout mon long sur le canapé. Les bras derrière le crâne.
J'ai soufflé puis fermé les yeux.
Je la revoyais presque comme en vrai,l'imaginais encore en train de danser, ses cheveux lâchés et sauvages.
La couleur de sa peau brillante, sous le projecteur bleu. Qu'est-ce que j'aurai aimé la prendre dans mes bras.

Je me suis redressé pendant que Roméo quittait la pièce. J'ai pris mon portable qui avait toujours la notification indiquant une nouvelle messagerie. Je me suis décidé à enfin l'écouter.
Et là, le chaos complet.
Mon dernier message datait de la soirée où Angèle était repartie de la ress complètement paniquée.
Pourtant c'était pas elle,non, c'était la voix de 'Dina.
Ça me faisait mal de l'entendre m'insulter encore une fois, comme des coups de poignards répétés. Elle était complètement saoule.
Et merde, pourquoi je lui cherchais encore et toujours des excuses ?
Elle m'avait linché, ridiculisé, largué, et moi je la voulais toujours. Quel con.
Mon téléphone a sonné dans mes mains.
Égo surdimensionné oblige, j'ai laissé tourner la sonnerie quelques instants histoire de me faire désirer.

- Antoine Valentinelli.
- Bonjour Monsieur Valentinelli, je suis Sarah Losde de la radio France Inter ça fait dix minutes qu'on vous attend sur le plateau.
- Oh merde! Excusez-moi, je suis assez occupé en ce moment ça m'est sorti de la tête. J'arrive immédiatement.

J'en oubliais mes interviews putain.
Ma veste en jean sur le dos j'ai commandé un Uber avant de partir pour France Inter.
« Sors là de ta tête » disait mon cerveau tandis que je regardais son compte insta dans la voiture.

* * *

- Bonsoir sur France Inter il est 18h.

Le jingle retentit pendant que je tape du pied sur le sol en verre. Ce studio était bien classe, le gamin en moi jubilait un peu mais ma tête était ailleurs. Je n'avais pas eu le temps de relire les questions que l'on m'avait envoyée, j'étais vraiment le pire des invités.

- Ce soir nous recevons Lomepal sur notre plateau, bonsoir Lomepal on est très ravis de vous avoir avec nous.
- Bonsoir je suis ravi aussi.
- Alors vous avez annoncé récemment la préparation d'un nouvel album, peut-être la suite de flip votre dernier album?
- Je ne compte pas dire trop de choses là dessus pour le moment, confidentialité oblige ahah. Mais non non je compte pas faire de Flip2 ça ne m'intéresse pas vraiment, je veux évoluer dans mes écrits comme dans ma personnalité et je pense que c'est important de contraster un peu avec mon image de rappeur qui crie en gros.

Des questions... des tonnes de questions tournant encore et toujours sur les chiffres. Ça me saoulait un peu jusqu'à ce qu'une question me trouble particulièrement.

- Alors vous nous parlez là d'un album plein d'émotions, est-ce qu'on aura droit à des chansons d'amour ?

Mon coeur avait commencé à battre un peu fort.

- Un album c'est plein de souvenirs et de pensées, c'est pour ça aussi que c'est vraiment dur à écrire.
Après, j'ai vécu récemment de nouvelles émotions, j'ai revu tout le mal que je faisais encore et toujours aux mêmes personnes. Le mal se propage et ça ronge complètement. Moi par exemple je fais partie de ces gens qui... qui aiment en brûlant un peu l'autre vous voyez. Les humains ont ce truc degueulasse qu'on appelle l'égo, certains le manie mieux que d'autres, moi je ne sais pas gérer ça. Alors bon au début t'aimes bien faire du mal aux filles quand t'es gamin, puis après tu fais que perdre les choses jour après jour.
C'est un sujet que je veux assez présent dans ce nouvel album.

J'avais un peu plus mal à chaque mot prononcé, c'était la première fois que j'étais si explicite à une interview. J'ai jamais aimé ça, c'est toujours les mêmes questions, toujours les mêmes attentes.
Le type a finit son interview puis je suis reparti.

Dans le Uber du retour j'ai voulu l'appeler mais j'ai renoncé.

C'était la première fois que je pensais autant à elle.

Ils l'appellent PalpalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant