XXIX.

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Point de vue Adina.

9:24
De Antoine :
Tu vas rater l'avion.

9:25
À Antoine :
Je t'ai dis que je prendrais pas le même que toi.

9:27
De Antoine :
Dans ma proposition, que tu as accepté d'ailleurs, le voyage est compris.

9:30
De Antoine :
Oh, déjà 9:30? Je crois que tu vas devoir faire le voyage tout seul.

Je pose mon portable sur le lavabo avant de prendre en main le stick, me tartinant les lèvres d'un nude assez foncé.

En jetant un coup d'oeil dans le miroir, je rive les yeux sur la bretelle de mon soutien-gorge tout juste tombée.
Je la relève tout doucement en fixant mon reflet.

Est-ce que c'est vraiment une bonne idée ? Est-ce que je devrais vraiment y aller?
J'attache mes cheveux péniblement en priant pour qu'ils tombent tous d'un coup.

Antoine.
Qu'est ce qu'il pourrait se passer ?

Je n'ai pas peur de retomber sous son emprise, juste de retomber, tout court.
De ne plus vouloir me réveiller d'un sommeil trop lourd et rempli de regrets.

Je finis par laisser mes cheveux lâchés quand mon portable vibre.

Votre Uber est arrivé à votre domicile.

Je prends ma veste et ma valise avant de descendre en trombe jusqu'à la rue.
Dans la voiture, le chauffeur essayait tant bien que mal de maintenir la conversation, mais mes yeux suivaient la route, imperturbables, comme si se serait mon dernier chemin, mon dernier trajet.
Comment je reviendrais ?

Je n'osais plus fermer les yeux.
J'ai regretté chaque minutes à partir de celle où j'ai décidé de me réfugier dans cette putain de cage d'escalier, ou ce putain de mec étranger nous a tous secoués.
Cette minute ou je l'ai laissé effleurer mon bras la première fois, m'embrasser la première fois, caresser ma nuque pour la première fois.
Cette minute ou je l'ai laissé revenir dans ma vie, épouser mes lèvres et m'inviter à des putains de vacances.

Un flux de pensées trop important qui me pousse à ouvrir la fenêtre.

- Vous allez bien ? Tente le chauffeur, sûrement pour la seconde ou troisième fois.
- Oui, je me demande juste si je ferais pas mieux de faire demi tour.
- Pourquoi ça ?

Dans le rétroviseur avant je vois son regard se poser sur moi, il lève les sourcils d'un air sérieusement concerné.
Ma main pend à travers la vitre, du bout des doigts je touche la carrosserie brûlante.
Je détourne le regard vers celle-ci.

- Vous croyez que si on suit vraiment le soleil on arrive à un endroit précis?
- Je n'en sais rien madame.
- Qui sait, peut être qu'on arrive dans une nouvelle vie merveilleuse.
- Le soleil n'est qu'un astre de plus parmi l'univers entier.
- Vous êtes bien chiant vous.

Il rit toujours lorsqu'il pose ma valise sur le goudron chaud.
Son sourire me fait un peu penser à Sneazz, à ce sourire si réconfortant et chaleureux dont je n'oserais jamais recevoir la totale générosité.
Mes talons claquent sur le sol, je me trouve beaucoup trop grande maintenant.
Je fléchis un peu les genoux pour me rétrécir mais rien n'y fait.

L'Aéroport de Beauvais craint vraiment, je tente un passage au duty free mais j'en ressors aussitôt a cause du mélange infernal des odeurs de parfums et eaux de toilettes mélangées entre elles.

Après une petite heure je m'installe dans l'avion, les écouteurs déjà fixés aux oreilles.
La tête contre le hublot je réalise que, ça y est, plus de demi tour possible.
Je m'endors aussitôt, mais le réveil fut moins doux, happée par une odeur, un parfum.
Je me redresse sur mon siège puis tournes la tête plusieurs fois.

L'odeur ne vient pas de la droite, c'est comme si elle se tenait juste derrière moi.
Le temps d'à peine réfléchir une main saisit ma veste l'entraînant vers le fond de mon siège.
Je me retournes aussitôt, voyant se dresser tout juste au dessus du fauteuil des cheveux ondulés.

- J'aurai dû m'en douter...
- Viens. Dit-il dans un souffle souriant.
- J'ai acheté une place.
- Et moi deux.

Je retombe contre le dossier, mes mains mimants des cris de colère inaudibles.
En m'asseyant à côté de lui et de ses yeux qui n'osent plus me lâcher, j'ai presque apprécié l'instant.
J'avais oublié ces moments où ses yeux ne me quittaient plus, ou sa jambe effleurait simplement la mienne.

- Je m'ennuie si t'es pas là.
- Je compte rien dire de spécial.
- Ok.

Il prend ma main mais je la lâche aussitôt, avec la peur au ventre qu'il marque ma peau rien qu'au touché.

- T'es venue.
- On dirait ouais, j'me sens conne.
- Ça va ?
- Ouais super, je pars dans une villa en Sardaigne avec mon ex.

Le silence s'installe durement quand je commence à rire.
C'est sûrement la situation la plus conne que j'ai vécue.
Je ris un peu plus fort lorsque je pose les yeux sur lui, ébahi. C'est de la honte ou de l'exaspération dans ses yeux?
Il passe une main entre les mèches de ma frange. Je déteste ça.

- Moi je pars avec une Nathalie Portman névrosée, ça me dérange pas tellement.

Il est doué.
Je mets mes écouteurs en le regardant écrire quelques vers dans ses notes.
Et je me suis endormie comme ça, bercée par ses doigts qui parcourent le clavier et le rythme lent d'une musique douce.

Je sentais son regard sur moi même les yeux clos.

Qu'est-ce que ça va donner tout ça ?
Pourquoi on se fait autant de mal pour si peu de raisons ?

Je ne lui dis pas, mais à ce moment là c'est Danse que j'écoute.

Pauvre de moi je me souvenais pas que mon cœur pouvait encore battre comme ça.
Rien qu'au son de sa voix.
Rien qu'au craquement qu'il émet quand il chante.


Et quand il y avait un croisement elle disait : Allez, on suit le soleil.

Ils l'appellent PalpalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant