XXX.

338 16 0
                                    

Point de vue Lomepal.

Je serres ma chaîne entre mes dents.
L'or le vrai a un goût si puéril.
Cette nana parle que deux mots d'anglais et moi pas un seul d'italien.

Adina ouvre la portière et s'assoit côté conducteur, elle essaie de saisir les instructions de l'hôtesse en hochant la tête.
Adina.
Quand elle rabat ses cheveux sur le côté, j'aperçois le petit anneau scintillant à son oreille. Un reflet doré court sur son cou et je m'égare jusqu'au début de son décolleté.

Pourquoi j'arrive pas me contrôler?
Elle mord sa lèvre inférieure et j'me sens suer jusqu'aux os.
Pourquoi j'arrive pas à décrocher ?

Je remonte vers ses yeux, ennuyés et méprisants.

L'hôtesse parle de plus en plus vite en rabattant sa mèche blonde derrière son oreille toutes les 15secondes exactement.
Elle parle, elle parle encore
jusqu'à croiser mon regard.

Manquait plus que ça.
Elle caresse sa nuque, baisses puis relèves les yeux en souriant.
Tout en parlant, parlant, parlant...

Un bruit aigu et assommant résone, je tourne la tête vers Adina qui reste la main vissée au klaxon.
La petite blonde sursaute et se tait aussitôt.

- Grazie mile.

Elle claque la porte et je monte à côté d'elle encore béat de la situation.
Adina démarre et part en vitesse, les deux mains accrochés au volant comme je m'accroche à ma ceinture.
Pourquoi d'un seul coup elle éclate, en plein silence ?

On fait plusieurs kilomètres dans le même silence.
Elle finit par s'arrêter à une station service, la voiture était déjà à plat.
Tous les regards se sont rivés sur nous quand la plus belle des énergumènes s'est arrêtée en pic pile à côté de la pompe à essence.

Elle sort de la voiture, fait le plein puis part jusqu'au petit magasin.

Qu'est ce qu'elle fout?
Ma main se met à trembler contre la portière et je me forces à la stopper.
Et merde voilà que ça commence.
J'ai peur, inlassablement terriblement peur.
Qui dit qu'elle ne trouvera pas un italien bien meilleur que moi et qu'elle restera dans le magasin pour toujours ?
Qui dit qu'elle ne repartira pas ce soir à Paris pour retrouver l'amour de sa vie ?

Le sentiment majeur qu'elle m'inspire et la peur, chaque seconde.
Tout est si fragile entre nous, depuis le début.
Même la douceur est brutale entre nos mains.

Je la vois ressortir du magasin, une cigarette au bout de ses lèvres.
Pas besoin de plisser les yeux pour imaginer le goût de cette Vogue qu'elle grille avec un plaisir indescriptible dans les yeux.

Elle entre dans la voiture toujours la clope au bec. Je me demande rapidement si cette voiture est appropriée aux fumeurs avant de me souvenir que non, rien n'est approprié à Adina.
Elle m'observe la fixer du coin de l'œil.

- Je voulais un joint mais il avait rien sur lui. Mais bon, ça fait deux paquets de vogue gratuits.
- Gratuits ?
- Il a pas pu résister à mon charme qu'est ce que tu veux.

Je sais que je devrais rire mais je me glace aussitôt.

- T'es à chier. Elle lâche avec déception.
- Merci.

Elle rigole mais je l'ai jamais vue aussi peu convaincue.

- Antoine, tu penses sérieusement que je t'appartiens ?

Oui.

- Bien sûr que non.

Arrêtes de mentir putain.

- Si j'avais la terrible envie d'embrasser ce mec, t'aurai rien à dire par exemple.
- Ouais.

Embrasser qui ?!
Elle se rapproche de moi et je sais que dans sa tête tout est déjà clair, le jeu s'est déjà formé je suis son unique pion et il n'y a qu'une seule fin possible.

- Et si par exemple j'avais l'horrible envie de déboutonner sa chemise ça serait pas ton problème...

J'ose même plus répondre.
Elle est là, face à moi, sans que mes yeux osent quitter les siens.
J'ai peur d'y perdre la raison si j'ose baisser les yeux.

- Si... par exemple il passe sa main sous mon tshirt, ce serait encore moins un soucis pour toi...
- Arrêtes.
- Et si par exemple...
- Et si par exemple tu pouvais juste te contenter d'être ma copine et laisser personne te regarder !!?

Je tourne aussitôt la tête vers la fenêtre grande ouverte pour ne pas voir sa réaction.
Elle ne dit plus rien le temps de redémarrer la voiture puis rejoindre l'autoroute.

- Je suis pas ta copine. Elle dit simplement en prenant le virage la menant à l'autoroute toute neuve.

J'essaie de répliquer mais elle me coupe la parole aussitôt.

- J'espère que tu comptais pas me reconquérir en m'emmenant ici.
- C'est pas mon genre.

Je me tente a sourire et en tournant la tête je vois qu'elle aussi.

Ce genre de sourire qu'elle semble s'interdire en secouant la tête de gauche à droite.

***

Elle se tient là, face à la mer endormie.
Le satin rose pâle de sa robe qui redessine son corps gracieusement, le soleil colorant la peau de son dos nu d'un doré éclatant.

J'enfonce mes mains dans le sable sombre en décroisant les jambes.
Elle détache son chignon et ses cheveux retombe en cascade sur la vision de rêve de sa peau illuminée.

Adina avance d'un pas, puis d'un autre, et s'enfonce dans l'eau jusqu'à ce que sa robe forme un halo autour de ses hanches.

Je me lève pour la rejoindre, laissant mon short couler dans l'eau obscure.
Elle ne se retourne pas, ne m'accorde pas d'attention.

Son profil se détache du couché de soleil, il reste si lumineux, si chaud.
Ses pommettes rebondies qui épousent les contours creux de sa mâchoire, tandis que ses lèvres charnues restent entrouvertes, affamées de mots imprononçables.
Son nez grec si discret, tellement droit qu'il en souligne les yeux sombres et profonds d'Adina.

J'aurai aimé lui murmurer des mots qu'elle n'a jamais entendu.
Imperturbable je la contemplais quand elle a osé briser le silence.

- J'ai faim.
- Tu penses choper un poisson à l'envolée ?
- J'ai tellement faim que je pourrais te dévorer.

De simples mots qui me font décoller à l'intérieur. Et merde qu'est ce que j'ai chaud.

- Ton short est trempé, c'est con.
- Ta robe aussi.
- Rien ne m'empêche de l'enlever.

Ça devient indispensable qu'elle arrête de parler.
Chaque mot qui sort de sa bouche me paraît comme un appel hormonal horriblement sauvage.

Je passe ma main le long de son dos dans une caresse qui la fait frissonner.
Elle s'approche de moi dans un bruissement d'eau, je baisse la tête et nos lèvres s'effleurent, je m'avance un peu plus mais elle m'interromps aussitôt.

- J'ai faim.

Je souris en essayant de paraître le moins déçu possible.

- Pizza ?
- Pizza.

Ils l'appellent PalpalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant