Les Conquérants du Cercle T2 - La princesse Oubliée. (Terminé)

Daerôn

On le jette à nouveau au fond de sa cellule. Il ne voit plus rien. Depuis des semaines maintenant. Il ne sait même plus depuis combien de temps, il est enfermé. Il a l'impression d'y être depuis des années. Mais le pire serait d'être privé de sa liberté que depuis quelques jours. Il sait que son père la puni à cause de sa rébellion, pour 6 mois. Il ne sait même pas s'il a purgé la moitié.

Ses genoux viennent râper le sol en pierre. Ses plaies se rouvrent. Il se sent pitoyable. On lui a finalement apporté d'autres vêtements. Les anciens sentaient trop fort. Il n'avait plus la force de se laver. Il avait seulement la force de fermer ses paupières lourdes.
Ceux-ci ne sont pas mieux. Ils lui collent à la peau, imprégnés du sang qu'il verse tous les jours.

Qu'espère son père ? Le rendre faible pour retarder son couronnement ? Lui faire comprendre que même son propre fils ne pourra jamais le vaincre ? Le problème, c'est qu'Aegnor ne sait pas que tout un processus est en marche. Il ignore combien de personne ne sont engagés pour lui arracher la couronne. Le prince de feu, son fils unique, est à la tête de ce mouvement. Et sans énergie, cela risque d'être compliqué de tout coordonner. Son père doit le savoir. C'est pour cette raison qu'il la fait enfermer ici. Pour retarder la rébellion. Cette rébellion qui n'est plus la sienne désormais. Il la mise entre les mains de la princesse légitime.

Il s'étonne d'avoir encore des idées cohérentes. Il a maigri. Cela ne fait aucun doute. Il peut sentir ses côtes douloureuses sous ses doigts. Mais ce n'est pas son amincissement qui provoque sa folie. Non. C'est l'être qui le garde dans l'obscurité épaisse de cette prison. Son geôlier. Il le sait, il essaye de le manipuler et son esprit n'est pas aussi fort qu'il ne lavait cru pour résister. Il a beau ériger des barrières mentales, Arwen les brise en moins dune seconde. Il est en train de le transformer en Mérol. Ces créatures à la folie dévorante. Bientôt, il n'aura plus aucune pensée censée. Il se révélera dangereux pour lui, mais surtout pour tous ceux qui l'approcheront. Il ne veut pas être un frein, un danger pour elle. Son devoir était de la protéger. Il se maudit d'avoir failli à sa mission. Il aurait dû la confier à Ardalôn plus tôt. Il le sait. Mais, non, il a voulu voir ce dont elle était capable. Finalement, il n'est pas mieux quArwen. Il a suivi un désir égoïste. Il devrait payer pour ça.

Il se lève, convaincu qu'il prend la bonne décision. Au-dessus de lui, la hache se balance légèrement dans un grincement terrifiant. Daerôn en avait peur avant, puis se sentait rassurer à ce bruit régulier, mais maintenant, ce bruit l'exaspère, lui rappelant sa condition de prisonnier et surtout celle de son impuissance. Il pose ses larges mains sur le mur qui lui fait face. Le regarde comme sil était l'ennemi. Puis dans un craquement sourd, cogne sa tête de toutes ses forces sur la pierre rugueuse. Il s'évanouit dun coup, le front trempé de son sang.

*

Lorsqu'il se réveille, une lumière vive lui brûle les yeux. Il n'a pas vu la lumière depuis des semaines. Il reste aveugle quelques minutes. Quelqu'un en profite pour le rouer de coups. Il se recroqueville, se protège du mieux qu'il le peut. Il tousse, crache le sang qui l'empêche de respirer normalement.

Il essaye de se calmer. Il a mal à la tête. Comme si on lui avait ouvert le crâne et mélanger chaque partie de son cerveau. Il finit par s'accoutumer à la lueur blanche qui brille juste au-dessus de lui. Il se trouve dans une pièce entièrement blanche. Il a l'impression que ses rétines vont se décoller tellement la lumière lui fait mal aux yeux. Daerôn est allongé à plat ventre sur le sol. Il relève difficilement la tête pour chercher son interlocuteur. Il aurait dû s'en douter. Arwen se place juste devant lui. Il n'arrive pas à voir son visage. Il ne peut qu'observer le bout impeccable de ses chaussures, blanches elles aussi.

- Relève-toi !

Il suit les directives sans broncher. Il aimerait lui répondre, mais il y a trop de sang dans sa bouche pour qu'il puisse prononcer un seul mot. Il ressent déjà le besoin de cracher. Il ne peut sen empêcher et lâche une gerbe de sang sur les souliers de son geôlier. Celui-ci le relève violemment. Daerôn, enfin debout, sent ses jambes trembler. Non, il ne doit pas chanceler. Il ne doit pas flancher devant son ennemi.