Chapitre 43

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J'ignore ce qu'il va se passer à présent. Je ne sais pas si je dois être excitée de croiser Arwen ou si, au contraire, je dois être pressée d'en finir. J'essaye de chercher les sous-sols au plus vite. La situation me semble désespérée. Je tourne la tête dans tous les sens. Je ne suis pas loin du torticolis.

Soudain, Ingwé me prend par le bras et m'intime de me taire d'un doigt sur sa bouche. Il m'emmène à l'est de la cour intérieure tandis que je hoche la tête. Nous nous retrouvons sous les colonnes en pierre qui longe les murs épais du bâtiment. Il s'accroupit m'entraînant avec lui, jusqu'à ce que je sente un courant d'air froid contre mes genoux.

- Tu le sens ? Dit-il en souriant.

- Oui. Tu penses que l'accès est ici ? Je demande en tâtant le sol pour trouver une entrée.

Il me sourit d'un air vainqueur et commence à marcher à quatre pattes vers la porte Est de la cour.

- Qu'est-ce que tu fais ? Je chuchote.

- Je suis le courant d'air. C'est lui qui nous indiquera l'entrée.

Je soupire et commence à le suivre. Des petits graviers s'enfoncent dans la peau tendre de mes paumes. Je grimace en tentant d'oublier la douleur. Ingwé vérifie que la voie est libre et me fait signe de continuer. Nous entrons dans l'alcôve qui sert d'entrée au côté Est. Je sens le filet d'air froid devenir plus épais. Je le sens contre mes joues alors que je suis au ras du sol.

- Il y a un escalier. Il doit mener aux sous-sols. Dit-il en se relevant doucement.

J'écoute les bruits alentours tout en restant agenouillée au sol. Tout semble très calme. Je ne sais pas si je dois m'en sentir rassurée.

Ingwé se tourne vers moi avec un visage sérieux. Nous venons de rentrer dans le cur de la mission. Nous devons plus que jamais garder notre calme et notre sang-froid. Pas question de faire marche arrière, ni de se faire repérer. Nous n'avons pas le droit à l'erreur.

- Je vais descendre en premier. Compte jusqu'à trois et suis-moi. S'il se passe quelque chose, tu auras le temps de remonter.

- D'accord. Vas-y. Je lui réponds d'une voix ferme.

J'ignore mon estomac qui se contracte et je fais le compte dans ma tête, puis je descends à mon tour. L'air est si glacial qu'il m'arrache un gémissement de surprise. Les marches en pierre sont dans un piteux état. Certaines sont effritées et d'autres complètement cassées. Je suis obligée de regarder ou je mets les pieds pour ne pas tomber. L'escalier est éclairé par des flambeaux de chaque côté des parois. Leur lueur est très pâle donnant au couloir étroit une atmosphère inquiétante. La descente est interminable, j'ai l'impression de descendre six pieds sous terre.

Lorsqu'il semble que je sois enfin arrivée dans les sous-sols, je me heurte à Ingwé resté planté à l'entrée.

- Je comprends pourquoi on appelle cet endroit : « La prison des Ombres ».

Je suis son regard et découvre des milliers de cellules noyées dans une obscurité étrange. Chaque barreau, chaque pierre, chaque porte possèdent une ombre qui vient danser à la lumière des flammes grises des sous-sols. Comme si elles étaient toutes vivantes.

Au centre, trône la tête d'une statue au regard hostile. Je comprends vite qu'il s'agit de la tête de l'édifice de pierre qui surplombe l'entrée du château. Des murmures nous parviennent. Je reconnais là, le cri plaintif des Mérols. De ces Larniens qui sont devenus fous. Ils sont entrecoupés par des cris de douleur. La souffrance et le désespoir semble avoir imprégnés les murs de cette Prison. Un frisson me parcourt et me fais crisper les épaules.

Ce lieu est plein de colère, de tristesse et de solitude.

Je maintiens notre bulle de silence ainsi que notre voile d'invisibilité même s'il semble qu'il ne soit pas necessaire de se cacher. L'obscurité nous maintient déjà dans l'ombre à qui que ce soit.

J'échange un regard déterminé avec Ingwé et nous avançons dans le dédale des cellules et des ombres dansantes de Prison la plus terrifiante du Cercle.

Je m'efforce de ne pas regarder à l'intérieur des cellules. J'imagine des corps sans vie, des esprits vides, des individus desespérés, comptant les jours qu'il leur reste. Ne sachant plus distinguer le jour de la nuit. Priant pour obtenir de l'aide ou pour échapper à leurs propres pensées. Etre enfermé ici doit être très éprouvant et pénible. Je peux presque sentir la souffrance de ces gens dans l'air glacial qui frôle ma nuque.

Daerôn est-il prisonnier de ces minuscules cellules ou se trouvent-ils dans une pièce à part ? L'imaginer entre quatre murs recouvert de barreaux épais me donne la nausée. Qu'allons-nous faire s'il n'est plus ici ? S'il est mort...

Non, je ne veux pas y penser. Il est vivant. Il est forcément vivant.

A force de trop penser, je me suis éloigné d'Ingwé. Je me retrouve devant une cellule vide, dont le mur du fond est recouvert de symbole écrit avec ce qui semble être de la craie. Des bâtons, des milliers de traits sont dessinés. Ce prisonnier semble avoir tenu un compte régulier des jours qu'il a passé ici, de manière méthodique. C'est intrigant. Je m'approche encore, jusqu'à distinguer une écriture épaisse presque illisisible.

« Je vais mourir en ayant eu l'espoir de te revoir un jour E. Existes-tu réellement ? Où as-tu disparu à jamais ? » - Marshall.

Je me recule vivement. Je n'ai pas le droit de lire ces paroles. J'ai l'impression de violer les derniers instants de cet homme. Je me retourne et cherche Ingwé du regard. Je le rejoins rapidement. Il ne semble pas avoir remarqué mon absence. Il s'est stoppé devant une cellule au fond de la prison. Une silhouette semble être adossée à un mur. Sa respiration est lente et régulière. Est-ce que c'est lui ?

La question me brûle les lèvres. Mais je ne peux faire aucun bruit dans ces sous-sols si silencieux.

Ingwé tend le bras vers les barreaux et fait naître une petite flamme au bout de ses doigts. Il approche la lumière vers la silhouette après plusieurs hésitations. Je comprends ses doutes. Si ce n'est pas lui, nous devrons le chercher ailleurs. Et si, au contraire, il s'agit bien de Daerôn, on devra faire face à ce qu'Arwen à fait de lui. Cette deuxième option me terrorise tellement que mes mains tremblent et mon cœur s'affole.

Nous sommes sur le point de découvrir si tout ce que nous avons entreprit en valait la peine. Si nous n'avons pas fait tout cela pour rien... Si nous avons parcouru toutes ses épreuves pour découvrir un corps inanimé.

Je n'ose même plus respirer... Mes yeux sont humides...

La flamme d'Ingwé se précise et vient éclairer la silhouette... Je m'accroche aux barreaux pour mieux distinguer l'homme qui s'y trouve.

Je le reconnais instantanément.

Un soupir m'échappe.

Daerôn.

Et dans un concert de murmures, des milliers d'yeux viennent se poser sur nous. Nous mettant à nu, à découvert. Les prisonniers nous ont repérés.

Des pas se rapprochent.

- Elwing. Je t'attendais.

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Hello les ami(e) s !
Enfin un autre chapitre ! Héhé.
En espérant qu'il vous plaise. La suite arrive Dimanche comme d'habitude ! On arrive à la fin de la fin.
Bonne lecture.
Pookie, en direct de Larn...

Les Conquérants du Cercle T2 - La princesse Oubliée. (Terminé) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant