Chapitre 18

4K 177 26
                                    

Point de vue de Chase :

Qu'est-ce qu'un fragment de poussière pouvait-il représenter à côté de l'immensité de l'univers ? Sûrement rien je le conçois, alors je ne vois pas pourquoi cette idiote continuait de me faire face, de me contredire ou même d'oser ne serait-ce que mal me parler. Qu'est-ce qu'elle y gagnait à se faire humilier de la sorte ? À se faire rabaisser ? Sa détermination ne faisait que renforcer mon désir de la démolir et on savait tous les deux que c'était comme ça que cette histoire allait se finir, lorsque l'on me côtoie on finit toujours pas avoir mal.

John assis près de moi but cul sec son ver et se servit un autre en mixant je ne sais plus quels alcools forts entre eux, sa copine venait de le quitter et il avait décidé de se changer les esprits, mais ce genre de choses étaient bien derrière lui, il n'était jamais atteint, il voulait simplement picoler comme il savait le faire sans se sentir coupable. Sauf qu'un alcoolique ne se sentait jamais coupable de picoler, c'est bien ça l'erreur qu'il commet inlassablement depuis qu'il a quinze ans, il ne rend pas compte qu'il fout sa vie en l'air, le pire dans l'histoire c'est que John ne voyait pas qu'il était alcoolique bien au contraire, pour lui il n'étais qu'un simple étudiant de vingt trois ans et était en dernière année de la fac et donc il devait en profiter au maximum.

-"t'as pas intérêt à te foirer demain !" l'avertis-je en le regardant du coin de l'œil, il sourit et laissa tomber son ver pour prendre une bouteille entière entre ses mains. John était de ces spécimens qui pouvaient boire comme des trous la veille et avoir une remarquable prestation le lendemain, il disait que c'était un don mais je n'en étais pas convaincu à mon avis il avait sérieusement besoin d'une cure s'il voulait espérer un jour jouer pour les Bruins avec moi.

-"t'inquiète mec, après Noah il n'y a pas plus rapide que moi sur la glace" lança-t-il d'une voix pâteuse, le soudain souvenir de Noah jouant avec nous provoqua un étrange sentiment de vide dans mon cœur, les journées interminables que nous passions à nous entraîner sous ses ordres me manquaient en quelque sorte et sa voix rauque nous traitant d'incapables et de bons à rien résonna soudainement comme un écho à l'intérieur de mon esprit.

-"c'est bien vrai, dis tu ne veux pas savoir pourquoi il a fait ça ?" demandai-je d'une voix rauque, John soupira tristement et croisa ses jambes avant de rejeter sa tête en arrière.

Nous n'avions jamais proprement parlé de ce qui s'était passé, chacun de nous avait fait le deuil à sa manière, j'avais pleuré pour la première fois de ma vie. Lorsque le coach nous a tous rassemblé au gymnase pour nous annoncer la mort de Noah notre têtu mais super capitaine, j'ai senti le sol se dérober sous mes pieds, je n'y pas cru une seule seconde et j'ai préféré faire moi-même le déplacement jusqu'à l'hôpital paumé dans lequel il devait se trouver. Je m'étais retrouvé entre deux chambres atrocement vides mais étrangement pleines de souvenirs, comme si Noah et sa copine s'y trouvaient toujours à se chamailler depuis leurs deux chambres respectives ou à faire l'amour comme si leur temps ensemble était compté. C'était finalement vrai.Je me rappelle de leur complicité, de la manière dont ils se regardaient comme si chacun était le monde de l'autre, ils me disaient qu'ils n'arriveraient pas à vivre l'un sans l'autre. C'était vraiment le cas pour lui on dirait car lorsque Meredith est morte en succombant à sa maladie, Noah a mis fin à ses jours le soir-même.

-"il n'avait plus aucune raison de vivre après la mort de sa copine je présume" dit John en buvant un autre gorgée, il devait avoir raison, si Noah avait fait une chose pareille c'était qu'il devait sûrement avoir une bonne raison de le faire et dieu seul savait que Noah était lucide lorsqu'il s'agissait de prendre n'importe quelle décision. Je me levai et regagnai ma chambre en quelques secondes, je refermai la porte et m'y adossai quelques temps afin de mieux profiter du calme ambiant, tout semblait étrange lorsqu'on prenait le temps de bien y penser, qui aurait cru qu'en quelques années tout changerait aussi vite, que le Noah que nous avions l'habitude de respecter et d'idolâtrer allait finir par ne plus être la, que John allait picoler de plus en plus et que j'allais finir par devenir capitaine de l'équipe. Lorsque le coach m'avait confié le poste j'avais catégoriquement refusé car personne ne pouvait être un capitaine de l'envergure de Noah, il était un génie du hockey et avait une belle carrière devant lui mais lorsque je me suis souvenu de ses paroles j'ai finalement accepté cette tâche, cela m'a pesé quelques temps mais dans l'ensemble j'essayais de faire honneur à mon ami et de faire vivre ses exploits car si la gloire de l'équipe de Hockey de l'Université du Massachusetts est à son zénith c'est grâce à son capitaine qui s'est démené comme un taré lors des entraînements.

-"tu vivras toujours mon pote" dis-je en lançant un rapide regard à la photo de nous trois qui reposait sur mon bureau. Je m'allongeai sur mon lit et pris mon téléphone entre mes mains, j'eus rapidement entre mes mains la fameuse vidéo d'Emma Snow en train de me supplier de l'épargner, pour être honnête c'était assez marrant de la voir ainsi apeurée et à ma merci, son expression horrifiée me décrocha un énorme sourire béat rien que d'imaginer ce que les deux molosses auraient pu lui faire si je ne les avais pas arrêté. Ils l'auraient baisé. Fort. J'aurais bien voulu filmer cela mais j'étais d'humeur conciliante et j'avais préféré l'épargner cette fois-ci. Je sais que mon comportement est étrange, que tant de méchanceté envers une personne que je ne connaissais pas devait se révéler incompréhensible voir perverse pourtant ce n'était pas personnel, Emma "pute" est arrivée à un moment de ma vie où je n'avais aucune distraction, aucun jouet et j'avais décrété dés l'instant où elle avait osé lâcher son chien sur moi que cette fille allait devenir mon souffre-douleur et qu'elle allait en baver, ce n'est pas juste c'est vrai mais la vie est injuste, le plus fort doit dominer le plus faible et j'étais plus fort qu'elle dans tous les domaines. N'oublie pas ce que tu as enduré. Je n'oublierai jamais ce qu'on m'a fait vivre, l'enfer quotidien dont j'étais victime, c'est pour cela que je m'étais promis d'être fort. Être fort pour m'affirmer, être fort pour survivre. Écraser Emma, la crucifier, l'anéantir, la pousser vers la folie voir la démence ne me posait aucun problème, elle me rappelait trop la personne que j'étais pour la laisser indemne, elle me rappelait constamment à quel point j'avais été faible et il était impossible pour moi de ne pas réagir. J'avais regardé cette vidéo un nombre incalculable de fois et le ton de sa voix, son regard brisé, son teint pâle, son expression morose, ses lèvres tremblantes, littéralement tout en elle me donnait l'envie irrépressible de lui écraser la gueule contre quelque chose de dur, de tranchant. Tu étais comme ça toi aussi. Je secouai la tête et envoyai la vidéo à une personne qui l'envoya à une autre et en quelques secondes cette même vidéo fut relayée à plusieurs personnes voir la fac entière. Ce n'était pas très juste mais encore une fois qui peut décider qu'une chose est juste ? Personne, il n'y ni bon ni mauvais côté seulement le côté qui nous convient, moi j'avais choisi le mien et il était opposé à celui de tous ceux qui comme elle pensent pouvoir avoir une chance contre les gens comme moi.

-"putain mec !" s'écria John en débarquant dans ma chambre avec une nouvelle bouteille neuve à laquelle il n'avait pas encore touchée.

-"la vidéo ! C'est horrible" tente-t-il sans chercher à cacher le rictus qui trahissait son expression amusée, je ne l'avais peut-être pas mentionné avant mais John sous alcool était le pire hypocrite qui pouvait fouler le sol de cette foutue planète, un jour il tentait de défendre cette fille sous prétexte qu'il était galant, un autre il rêvait de lui écarter les jambes.

-"sois spectateur, ça ne fait que s'améliorer" lui dis-je en esquissant un large sourire, il me fit un doigt d'honneur et leva sa bouteille en l'air pour trinquer. Oui, ça ne peut définitivement que s'améliorer.....

Dévoile moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant