Chapitre 39

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Point de vue de Chase :

Prouve. Le.

Ces quelques mots résonnent dans mon crâne depuis des heures.

Ces paroles me narguent, m'insultent, prennent un plaisir fou à se moquer de moi. Pour qui se prend-elle exactement ? Pense-t-elle vraiment que le fait que je lui ai écarté les jambes change notre relation d'une quelconque manière qui soit ? Elle rêve !

Pourtant, j'ai apprécié être en elle, pousser encore plus loin, sentir son corps fusionner avec le mien, son souffle chaud me brûler la peau, j'ai aimé toutes ces sensations aussi puissantes et dévastatrices les unes que les autres. Je dirai même qu'elle est mon meilleur coup et comme tout meilleur qui se doit, j'ai déjà envie de renouveler l'expérience.

Sauf que je ne peux pas ! L'histoire n'est pas censée se baser sur la coucherie ou une mauvaise tournure d'une relation purement physique qui deviendrait mielleuse à souhait.

Non ! C'est un grand non ! Ça serait du grand n'importe quoi !

Je dois reprendre mes esprits, j'ai d'autres chats à fouetter comme me le répète si bien mon père lorsque l'envie me prenait de le déranger avec mes faux problèmes d'adolescents pré-pubères et je commence à me dire qu'il a raison. Je ne dois pas perdre mon objectif de vue. Maintenant que je suis au chômage technique, incapable de jouer au hockey pour une durée indéterminée, je dois sérieusement occuper mon temps libre. Étudier ? Je n'ai jamais aimé le faire mais ce que je déteste plus que ne pas pouvoir jouer est le fait de ne rien faire du tout !

Mon père m'a toujours répété que je devais être digne de lui succéder, que je n'avais pas le droit de laisser mourir tout ce qu'il avait durement accompli de sa vie et si toute ma vie je n'y ai jamais pensé, à présent que mon avenir est incertain je me dis que je devrais sérieusement y songer. Si le hockey n'est plus une option, les banques de mon père en deviendront une et je n'ai pas été baigné dans ce milieu toute ma vie pour rien. Contrairement aux apparences et ce que les gens peuvent penser de moi, je sais très bien gérer une entreprise, mes études et mon père ont toujours veillé à ce que je sache tirer les ficelles et maintenant, je commencer à douloureusement entrevoir mon avenir : être bloqué entre quatre murs.

Si j'aime autant le hockey c'est parce que ce sport me donne avant tout le faux sentiment d'être libre, de courir, d'explorer de nouveaux horizons, de nouvelles stratégies. Je ne pensais à rien, je fonçais et je marquais autant que je le pouvais, je comptais sur mes coéquipiers et nos victoires n'en étaient que plus belles mais à présent quoi ?

Que vais-je faire bon sang ! Je suis perdu à tous les niveaux ! Je ne l'ai jamais été !

Je prends une photo entre les mains, une photo d'équipe lorsque notre capitaine, Noah était encore en vie. Nous étions encore en première année et nous avions beaucoup de projets, ensemble on voulait passer pros, jouer dans la même équipe, porter le même maillot, gagner ensemble, perdre ensemble. Noah a eu un accident de voiture qui a signé la fin d'une incroyable carrière qui se dessinait devant lui. Il aurait pu faire autre chose, il aurait pu éviter ce massacre mais lorsque sa petite amie qu'il a rencontré dans un hôpital a succombé à sa maladie, il a décrété qu'il n'avait plus aucune raison de vivre. Faux ! Il nous avait encore nous ! L'équipe ! Ses amis ! Nous étions des frères ! Il a sauté du toit de l'hôpital, les rumeurs disent qu'il est mort souriant, sûrement avait-il hâte de rejoindre son grand amour.

Cette histoire m'a profondément affecté, je n'arrive toujours pas à concevoir comment quelqu'un d'aussi fort et implacable que Noah puisse mettre fin à ses jours aussi facilement, pour une fille en plus. J'ai beau chercher à comprendre, je n'ai jamais pu et à présent que je regarde sa photo, je me demande ce qu'il aurait fait à ma place. Il était un génie, un dieu sur glace, sa réputation le précédait et j'aurai vraiment voulu pouvoir lui parler une dernière fois, jouer à ses côtés, mon capitaine.

Je me lève et m'étire douloureusement, je décide qu'il est temps de parler un peu avec mon père. Je ne suis pas du tout du genre à me morfondre, si je devais abandonner mon rêve de jouer au hockey, autant bien le faire et ne pas mal tourner comme certains autre joueurs. Je ne suis pas idiot, je sais très bien qu'une carrière sportive aussi brillante soit-elle finit toujours plus prématurément que ce que l'on imagine et je n'ai aucune envie d'être entraîneur pour des sales mômes dans mon genre, je dois prévoir un plan de secours, toujours !

J'appelle mon père, je sais qu'il est au courant de ma situation actuelle, c'est lui qui a toujours pris soin de moi. Il décroche à la première sonnerie.

-"je commence à penser que tu n'as pas de travail" je lui lance avec sarcasme. Je l'entends ricaner.

-"bonjour à toi aussi mon fils ! Ravi de voir que tu appelles enfin ton vieux père" je lève les yeux au ciel et commence à tout lui expliquer.

Mon père m'écoute, comme il a toujours su le faire, il ne dit rien tout le long, seul le rythme régulier de sa respiration me dit qu'il est toujours à l'autre bout du fil. Je lui raconte tout et pour une fois je m'autorise à tout déballer : mes craintes, mon avenir qui me semble de plus en plus flou et embrumé. Je suis vraiment perdu.

-"c'est une situation bien délicate" commence-t-il. Je soupire, comme si je ne le savais pas. Je m'apprête à lui dire quelquee chose lorsqu'il me coupe dans ma lancée :

-"écoute Chase je vais être honnête avec toi parce que tu es mon fils et je ne veux pas que tu aies de faux espoirs. Tu ne joueras plus au hoquet..." je jure, j'en avais déjà conscience mais entendre mon propre père me le dire ajoute plus de force à ses propos. Ça fait vachement mal !

-"mais tu peux toujours reprendre mes banques Chase ! Lorsque je ne serai plus en mesure de continuer ou lorsque j'aurai envie de me retirer pour profiter de la vie avec ta mère, c'est toi qui devra continuer parce que tu es mon fils : Chase Shaw ! Viens à New-York, continue tes études ici, ton oncle Aaron et moi-même t'apprendrons tout et tu ne peux pas rêver mieux qu'un directeur de banques multinationales et d'un duc d'Espagne comme professeurs" je réfléchis quelques secondes, sa proposition me semble soudainement être la bonne chose à faire. Après tout qu'ai-je ici à part une équipe que je dirigeais d'une main de fer ? Plus rien. Ici, dans l'État du Massachusetts, je ne suis absolument plus rien.

-"tu as raison papa, je viendrai"

Dévoile moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant