Twenty Eight

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Je suis assise. Seule. Dans le noir. Je ne perçois rien d'autre que ma propre existence. Aucun souffle de vent. Je n'ai ni chaud ni froid. La seule chose qui subsiste dans cette atmosphère imperméable, ce sont mes pensées. Des pensées fugaces en premier, mais de plus en plus présentes maintenant que je prends un peu plus conscience de moi, de la situation. Je devrais crier, courir, paniquer de me retrouver ici, sans aucune lumière, sans rien pour aiguiller mes sens. C'est pourtant l'inverse. Je me sens bien, je me sens sereine. Je suis seule et je ne ressens aucun danger. Ambrine n'est pas là, elle ne peut plus m'atteindre. Je suis en sécurité dans mes songes.

« Mes songes ? » je pense avec surprise.

Tout commence à s'éclaircir un peu dans ma tête. Je suis en train de rêver... Mais quel drôle de rêve ! Serait-ce un effet secondaire du breuvage ? Ne puis-je plus rêver ? Qu'il en soit ainsi. Je préfère rester ici, quelques minutes pour mon corps qui me sembleront quelques heures, plutôt que de la revoir. C'est un petit prix à payer pour rester en vie.

Soudain, un brouhaha venant d'en haut fait vibrer tout ce qui m'entoure. Je fronce les sourcils avant de me redresser, sans pour autant être inquiétée par ce qui vient de se passer. Je ne me sens toujours pas en danger. Jusqu'à ce que cela recommence et que cela me fasse presque tomber sous les tremblements. Je garde mon calme et fais quelques pas face à moi. Je me heurte alors à une surface rugueuse. Je tente une autre direction et me retrouve à nouveau face à un mur. La panique commence à m'envahir lorsque, en faisant plusieurs tentatives infructueuses, je commence à comprendre que je suis enfermée dans un espace plutôt restreint. Je ne suis pas claustrophobe, mais tout de même : se sentir prisonnière est loin d'être une sensation agréable. Je m'arrête dans mon mouvement et ferme les yeux. Je sais que ça ne sert à rien de paniquer, car ce n'est pas la réalité. Rien ne peut m'arriver ici. Si je ne peux pas sortir d'ici, rien ne peut y entrer... N'est-ce pas ?

— Elyne ! tonne une voix.

Je sursaute bien malgré moi. Le bruit était si fort, qu'une fois encore, j'ai bien failli en tomber à la renverse.

— Elyne !

Je m'arrête de respirer, tentant tant bien que mal de comprendre ce qui est en train de se passer. J'attends que l'événement se reproduise et je me prépare à l'analyser. Tout reste silencieux pendant plusieurs minutes, ce qui m'alerte davantage. Et puis ça recommence, cette fois accompagné par des secousses. La voix se fait de plus en plus forte, les tremblements de plus en plus insistants et constants. Le séisme atteint à tel niveau que je sens des choses tomber à côté de ma cage invisible et puis dessus. Je me laisse tomber à terre, les mains sur la tête et les jambes repliées vers moi. Tel un fœtus dans le ventre de sa mère, j'essaie de me sentir protégée. Tout est si chaos que, bientôt, le fracas et le mouvement incessant du sol font disparaître toute pensée ou toute émotion. Je suis désormais là, à attendre que ça passe. Plusieurs minutes s'écoulent, peut-être même une heure, je ne saurais le dire, quand la noirceur des lieux se fait balayer par l'apparition d'un premier rayon de lumière. Je lève la tête, en premier aveuglée par la lumière si soudaine. L'espace d'un instant, je commence à ressentir du réconfort. C'était sans compter la vision d'une main géante, entrant par ce trou de lumière, et m'arrachant du sol, moi et ma boule de protection. Je me mets à hurler de terreur, Ambrine étant ma première pensée. Maman est la seconde. Maman et tout mon amour pour elle.

Tout redevient noir pendant un moment et puis, la seconde d'après, mon corps endormi ouvre les yeux tandis que ma gorge laisse sortir un cri strident d'une frayeur inégalée. Instantanément, une main se pose sur ma bouche et mon regard trouve le visage d'Allistaire.

— Elyne ! Ne crie pas.

J'ouvre grand les yeux en attendant sa voix. Je peux désormais affirmer à mille pour cent qu'il s'agissait de la même que dans mes rêves. J'étais persuadée qu'il s'agissait d'Ambrine, qu'elle avait causé tout ça. Je ne comprends pas ce qui se passe et tout devient encore plus confus lorsque, en essayant de me relever, je n'y arrive pas. Rien ne bouge, pas même un orteil. Je n'ai l'emprise que sur mes yeux et ma bouche.

Faëra ▬ Tome ✯ © (Les 9 Royaumes)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant