Four

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— Vous m'avez promis, lui rappelé-je en arrivant près des chevaux.

Malgré mes nombreuses questions, Robin a insisté pour que nous attendions le matin afin qu'il m'en apporte les réponses. Il m'a prié de manger et d'aller dormir, car une longue route nous attend. Mais croyait-il très sincèrement que j'allais pouvoir accéder à sa requête ?

Eh bien non ! Je n'ai pas dormi de la nuit et le lit de camp, peu confortable, ne m'a pas vraiment aidé à trouver le sommeil. Quoique, à bien y penser, je ne pense pas que l'impression d'être sur un nuage aurait pu m'aider à fermer les yeux de la nuit, ne serait-ce qu'une seconde. Même pleurer, ce que j'ai fait toute la nuit, ne m'a pas donné un coup de main. J'étais pourtant crevée... et je le suis toujours. Mais comment arriver à tomber dans les bras de Morphée quand on se trouve en terre inconnue et entourée de personnes tout aussi méconnues ?

J'étais aux aguets, me retournant dans tous les sens, tentant de trouver des réponses à certaines questions, écoutant les moindres bruits et essayant d'en comprendre l'origine.

La seule chose qui m'a motivée à me lever, c'est les explications que Robin m'a promis de me donner, durant le chemin jusque... jusqu'au « Grand Roi ». C'est d'ailleurs sur ce sujet-là que je vais commencer.

— Dès que nous aurons pris la route, répond-il en montant sur son cheval. Vous devriez d'ailleurs monter sur votre destrier mademoiselle.

— Mon destrier ? dis-je très surprise. Je vais... devoir monter toute seule ?

— Désolée nous n'avons pas de carrosses pour vous princesse, réplique la voix d'Allistaire en arrivant à nos côtés.

— Allistaire, le réprimande Robin soudainement très énervé. Aide-la à monter.

Le fils ne semble même pas vouloir répliquer, ni même s'excuser à bien y réfléchir. Il cache son sourire, mes yeux me font comprendre qu'il semble amusé par sa phrase, ou par sa petite pique. Qu'importe, ce ne sont pas ses mesquineries qui vont me faire quelque chose, il ne me connaît pas après tout.

Il me faut m'y reprendre à trois fois, avec « l'aide » d'Allistaire, pour arriver à enfin me hisser sur la selle. Heureusement que le cheval n'en a pas fait des siennes, sinon je serais très certainement tombée en moins de deux. Le manque d'équilibre naturel risque d'ailleurs de me porter préjudice sur la route, d'où le fort maintien qu'exercent mes mains sur les rênes brunes en cuir.

« Promis le cheval, je ne te ferai pas de mal. Je ne fais que les tenir ! » pensé-je comme si l'animal pouvait vraiment m'entendre, « c'est juste que... tu vois, je n'ai pas envie de tomber et... sois pas trop brusque avec moi, c'est la première fois... Et puis ça ferait trop plaisir à l'un des autres cavaliers ».

Voilà que je me mets à parler télépathiquement à animal. De toute façon, même s'il se mettait à me répondre, je ne crois pas que j'en serai très choquée. Pas après hier. Non, c'est certain, plus rien ne peut me surprendre. Je suis dans un autre monde, après tout.

« Ouverture d'esprit Elyne, ouverte d'esprit » je me répète en prenant une profonde respiration.

Alors que je cherche la position la plus stable possible, diminuant le pourcentage de chance de me rétamer durant le voyage, j'observe également ce qui m'entoure, du moins sur la petite troupe qui est presque prête à démarrer. Un seul cavalier manque encore à l'appel, c'est du moins ce que je suppose en voyant un cheval sellé, mais non monté. Je me laisse à admirer l'animal un court instant. Sa robe, entièrement noire, semble briller dans l'aube. Il est immobile, froid, concentré. Il a à peine l'air vivant. À peine, car c'est sans compter sur son mouvement de tête vers moi et ses yeux qui croisent les miens. Instinctivement, je ne peux m'empêcher de détourner mon visage, choquée par l'intensité de son regard, même s'il a été des plus brefs.

Faëra ▬ Tome ✯ © (Les 9 Royaumes)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant