Le bruit du monde (Livaï x OC)

Nouveau départ

La vitrine renvoyait le reflet d'une jeune femme aux traits fins, aux lèvres bien ourlées et aux pommettes saillantes surmontées de deux grands yeux verts bien trop ternes pour son âge. Absorbée dans la lecture d'une petite annonce placardée sur la devanture de la boutique, Astal oublia complètement le brouhaha de la foule dans son dos. La rue piétonne du centre-ville de Trost était particulièrement animée en ce samedi matin, jour de marché. La jeune femme écarta une mèche de ses longs cheveux auburn d'un geste souple de la main et leva le nez. La douce lumière du soleil automnal sembla s'accrocher quelques instants dans les reflets cuivrés de ses boucles pour venir y danser avec grâce. Sur le haut de la devanture, écrit dans une calligraphie des plus farfelues, le mot "Pâtisserie" s'offrait à la vue des chalands. 

Astal était arrivée dans cette ville depuis quatre jours seulement. Elle n'y avait jamais mis les pieds auparavant et n'y avait aucune attache - raisons précises pour laquelle elle était ici, d'ailleurs. Pour un nouveau départ. Après avoir trouvé un petit logement de fortune sous les combles d'une vieille demeure du centre ville, la jeune femme s'attelait maintenant à décrocher un emploi. Ce matin, elle n'avait pas fait cinquante mètres qu'elle était tombée sur cette annonce. La pâtisserie en question cherchait un vendeur. 

- Pourquoi pas ... , murmura-t-elle en s'avançant vers la porte du commerce.

Astal avait bien conscience de n'avoir aucun diplôme ni aucune formation professionnelle. Depuis des années, elle vivait de petits boulots et de beaucoup de sacrifices. Mais elle savait aussi que si l'avenir appartenait avant tout à ceux qui avaient les moyens de se l'assurer, il revenait aussi à ceux qui se montraient audacieux. Après tout, qui ne tente rien n'a rien. Lorsqu'elle pénétra dans la boutique, le son d'une clochette retentit. 

- Oui ! J'arriiiiiiiiiive ! , s'éleva instantanément une voix stridente depuis l'arrière boutique. 

La pâtisserie était étonnement calme et vide pour un jour de marché. Astal s'approcha de la vitrine et détailla avec curiosité l'étalage de gâteaux qui s'offrait à sa vue. Elle ne put retenir une moue sceptique en découvrant leurs formes et leurs couleurs, toutes plus loufoques les unes que les autres.  

- Qu'est-ce que ... ? , marmonna-t-elle avant de reporter son attention sur la silhouette qui venait d'émerger en trombes de l'arrière salle pour se positionner derrière le comptoir. 

- Bonjouuuuuuur, ma jolie ! , beugla la pâtissière. 

Astal ouvrit des yeux ronds en découvrant l'accoutrement de la femme qui venait de faire son apparition : des cheveux hirsutes rassemblés en une queue de cheval haute d'où s'échappaient deux mèches folles, des yeux exorbités d'un enthousiasme bouillonnant derrière une pair de lunette à bandeau et un sourire démentiel collé aux lèvres. Elle semblait avoir entre trente-cinq et quarante ans. Astal plissa les yeux en ramenant son attention sur le tablier de la pâtissière, attaché de guingois. Juste au dessus de sa poitrine, la protection arborait la mention : "Come try my". Juste en dessous, à l'endroit supposé de la pointe de ses seins, étaient dessinés deux cookies. Blasée, la jeune femme regrettait déjà d'avoir mis les pieds dans cette boutique. Déjà que l'odeur de nourriture lui collait la nausée depuis des mois voilà qu'en plus, l'énergie qui débordait impétueusement de cette femme avait mis moins de cinq minutes à lui ficher le tournis. Au moins, pensa Astal, c'est une pâtissière honnête : ses créations lui ressemblent ! On ne pouvait pas lui enlever ça. 

- Mais dis moi, poursuivit la femme après avoir détaillé Astal de la tête au pied, un index posé sur ses lèvres. C'est la première fois que je te vois ici ! Tu es de passage à Trost ? Ou bien tu es nouvelle dans le quartier peut être ? Qu'est-ce qui te ferait plaisir ? Je viens de terminer une fournée de -